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    2. Voyage avec un âne dans les Cévennes
    3. Chapitre 18
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    mon excursion.

    Quelques pas plus loin, je fus rejoint par un vieillard en bonnet de coton sombre, aux yeux clairs, au teint halé, au léger sourire émouvant. Une petite fille le suivait, conduisant deux brebis et un bouc, mais qui resta dans notre sillage, tandis que le bonhomme marchait à mon côté, et parlait de la matinée et de la vallée. Il n’était pas beaucoup plus de six heures et, pour des gens en bonne santé qui ont dormi leur content, c’est là une heure d’expansion et de franc et confiant bavardage.

    – Connaissez-vous le Seigneur ? me dit enfin le brave homme.

    Je lui demandai de quel seigneur il voulait parler. Mais il répéta seulement sa question avec plus d’emphase et, dans les yeux, un regard significatif d’espoir et d’intérêt.

    – Ah ! fis-je, pointant un doigt vers le ciel, je vous comprends maintenant. Oui, oui, je le connais. C’est la meilleure de mes connaissances.

    Le vieillard m’assura qu’il en était heureux. « Tenez, ajouta-t-il, frappant sa poitrine, cela me fait du bien là. Il y en a peu qui connaissent le Seigneur dans ces vallées, continua-t-il, pas beaucoup, un peu tout de même. Beaucoup d’appelés, cria-t-il, peu d’élus.

    – Mon père, dis-je, il n’est point facile de préciser qui connaît le Seigneur et ce n’est point en tout cas notre affaire. Protestants et Catholiques, voire ceux qui idolâtrent des pierres, peuvent le connaître et être connus de lui, car il est le créateur de toutes choses. »

    Je ne me savais pas si bon prédicateur.

    Le vieillard m’affirma qu’il pensait comme moi et renouvela l’assurance du plaisir qu’il éprouvait de ma rencontre. « Nous sommes si peu, dit-il. On nous appelle des Moraves ici ; mais, plus bas, dans le département du Gard, où il y a également bon nombre de croyants on les appelle des Derbistes, du nom d’un pasteur anglais. »

    Je commençai à comprendre que je faisais figure, dans une réalité suspecte, de membre de quelque secte de moi inconnue. Mais j’étais plus heureux du plaisir éprouvé par mon compagnon qu’embarrassé par ma situation équivoque. Je ne saurais trouver déloyal, en effet, d’avouer ne saisir aucune différence particulièrement dans ces matières transcendantes en qui nous avons tous la certitude que si d’aucuns peuvent se tromper, nous ne sommes nous-mêmes pas assurés d’avoir raison. On parle beaucoup de vérité, mais ce vieillard en bonnet de coton brun se montrait si ingénu, doux et fraternel que je me sentais presque disposé moi-même à professer son prosélytisme. C’était, comme par hasard, un frère de Plymouth. Ce que le terme peut signifier au point de vue dogmatique, je n’en avais pas la moindre idée, – ni le temps de m’en informer. Toutefois, je sais bien que nous sommes tous embarqués sur la mer démontée du monde, tous enfants d’un même père et qui s’efforcent sur beaucoup de points essentiels, d’agir de même et de se ressembler. Et quoique ce fut, en un sens, par une sorte de malentendu qu’il me serrât si souvent les mains et se montrât si enclin à entendre mes propos, c’était là l’erreur d’une sorte de quêteur de vérité. Car la charité débute les yeux bandés ; ce n’est qu’à la suite d’une série de méprises de ce genre, qu’elle s’établit enfin sur un principe raisonnablement fondé d’amour et de patience et une confiance absolue en notre prochain tout entier. Si j’avais trompé ce brave homme, j’eusse volontiers continué à en tromper d’autres de la même manière. Et si jamais, en fin de compte, hors de nos voies individuelles et désolées, nous devons nous rassembler tous dans une demeure commune, j’ai l’espoir auquel je m’accroche avec ferveur, que mon frère montagnard de Plymouth s’empressera de m’y serrer les mains une fois de plus.

    Ainsi discourant comme Chrétien et Fidèle, chemin faisant, lui et moi parvînmes à un petit hameau à proximité du Tarn. Ce n’était qu’une humble localité du nom de La Vernède, comprenant moins d’une douzaine de maisons et une chapelle protestante sur une butte. Ici habitait le vieillard et ici, à l’auberge, je commandai mon déjeuner. L’auberge était tenue par un aimable jeune homme casseur de pierres sur la route, et par sa sœur, jeune fille jolie et avenante. L’instituteur du village s’amena pour bavarder avec l’étranger. Toutes ces personnes étaient des Protestants, – fait qui me plut au-delà de ce que j’en eusse attendu. Et ce qui me fit encore davantage plaisir, c’est que tous semblaient des gens simples et honnêtes. Le Frère de Plymouth m’entoura d’une sorte de sollicitude affectueuse et, par trois fois au moins, il revint s’assurer que j’étais satisfait de mon menu. Sa manière d’agir me toucha profondément et, maintenant encore, son souvenir m’émeut. Il craignait d’être importun, mais il ne quittait pas volontiers ma compagnie une minute et il semblait ne jamais se lasser de me serrer les mains.

    Lorsque tous les autres furent partis à leur travail, je m’assis pendant près d’une demi-heure à deviser avec la jeune patronne de l’établissement. Elle parla gentiment du produit de sa récolte de châtaignes et des beautés du Tarn et des antiques attaches de famille qui se brisent sans cependant cesser de subsister quand les jeunes gens s’éloignent de leur chez soi. C’était, j’en suis certain, une excellente nature, d’une franchise campagnarde qui cachait beaucoup de délicatesse ; qui l’aimera sera, sans doute, un jeune homme heureux.

    La vallée en dessous de La Vernède me plaisait de plus en plus, au fur et à mesure que j’avançais. Tantôt les montagnes nues et couvertes d’éboulis se rapprochaient de part et d’autre et emprisonnaient la rivière entre des falaises. Tantôt, la vallée s’élargissait et verdoyait comme une prairie. La route me conduisit au-delà du vieux château-fort de Miral, situé sur un éperon, au-delà d’un couvent crénelé depuis longtemps détruit et converti en église et presbytère ; au-delà aussi d’un groupe de toits noirs, le village de Cocurès assis parmi les vignobles, et les prés et les vergers riches de pommes rouges. Là, au long de la chaussée, des gens gaulaient des noix aux arbres d’un côté de la route et en remplissaient sacs et paniers. Les montagnes, quoique la vallée demeurât spacieuse, étaient toujours hautes et dénudées aux dentelures âpres, avec, çà et là, des aiguilles qui pointaient. Et le Tarn murmurait toujours parmi les pierres sa chanson montagnarde. Je m’étais attendu, d’après des touristes à l’humeur pittoresque, à trouver une région horrifique selon le cœur de Byron. À mes regards d’Écossais, elle semblait riante et généreuse, tandis que la température donnait à mon corps d’Écossais, une sensation d’arrière-été. Pourtant les châtaigniers étaient déjà dépouillés par l’automne et les peupliers qui commençaient ici à s’y mêler, étaient devenus d’or pâli aux approches de l’hiver.

    Il y avait dans le site un aspect souriant malgré sa rudesse qui m’expliquait l’esprit de ces Covenantaires du Midi. Ceux qui, en Écosse, se réfugièrent dans les montagnes pour la paix de leur conscience, étaient tous d’humeur mélancolique et troublée, car une fois qu’ils avaient reçu assistance de Dieu, ils avaient au moins deux fois été en lutte avec le diable. Mais les Camisards n’avaient que de claires visions auxiliatrices. Ils trempaient davantage dans le sang, à la fois comme vainqueurs ou vaincus ; pourtant je ne vois dans leurs archives nulle possession diabolique. Ils continuaient de vivre la conscience tranquille dans ces rudes temps et malgré les circonstances. L’âme de Séguier, ne l’oublions pas, ressemblait à un jardin. Ils se savaient à la droite de Dieu, avec une certitude sans égale chez les Écossais. Car les Écossais, bien que assurés de leur cause, n’avaient jamais confiance en eux-mêmes.

    « Nous courions, raconte un vieux Camisard, lorsque nous entendions le chant des psaumes, nous courions comme si nous avions des ailes. Nous ressentions, à l’intime de nous, une ardeur exaltante, un désir qui nous soulevait. Des mots ne peuvent traduire nos sentiments. C’est quelque chose qu’il faut avoir ressenti pour le comprendre. Aussi harassés que nous pouvions être, nous ne pensions plus à notre fatigue et nous devenions enthousiastes dès que le chant des psaumes arrivait à nos oreilles. »

    La vallée du Tarn et les gens rencontrés à La Vernède m’expliquèrent non seulement ce texte, mais les vingt années de souffrance que ceux-là qui étaient si obstinés et sanguinaires dès qu’ils s’étaient engagés au combat, endurèrent avec une douceur d’enfants et une constance de paysans et de saints.

    IV – FLORAC

    Sur un affluent du Tarn est situé Florac, siège d’une sous-préfecture, qui possède un vieux château-fort et des boulevards de platanes, maints quartiers anciens et une source vive qui jaillit de la falaise. Cette ville est renommée, en outre, par ses jolies femmes et comme l’une des deux capitales, – l’autre étant Alais, – du pays des Camisards.

    Le propriétaire de l’auberge me conduisit après le déjeuner, à un café voisin où je devins, ou plutôt mon voyage devint le thème de la conversation de l’après-midi. Tout le monde avait quelques suggestions à faire au sujet de la direction à prendre. On alla chercher, à la sous-préfecture même, la carte de l’arrondissement et elle fut bien maculée de traces de pouces parmi les tasses de café et les petits verres de liqueur. La plupart de ces conseillers bénévoles étaient protestants. Cependant, je remarquai que Catholiques et Protestants avaient les rapports les plus aisés du monde. Je ne fus pas peu surpris de voir comme persistait là, vivace, le souvenir des guerres de religion. Parmi nos montagnes du Sud-Ouest, près de Mauchline, Camnock et Carsphairn, dans des fermes isolées ou des cures, de graves Presbytériens se remémorent toujours les temps de la grande persécution et les tombes des martyrs locaux ne cessent d’être

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