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    2. Ulysses
    3. Chapitre 229
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    la scène affola les censeurs. Cependant, l’obscénité, au sens du Georges Bataille de L’Érotisme, tient moins à certaines précisions physiques qu’à la proximité qui s’affirme entre sexuel et sacré, puisque tout est ici scandé par les litanies à la Vierge. L’outrage n’est pas d’abord dans les notations de perceptions choquantes, qui heurtent jusqu’au principe de plaisir au profit d’une jouissance plus obscure (« Alors elles te jettent un de ces relents tu peux y accrocher ton chapeau », p. 610). Pas non plus dans certains détails qui ne sont pas là pour glorifier le sexe en majesté mais dire sa gravité ou son poids, voire son caractère encombrant et malcommode (« Ça commence à devenir froid et gluant. Suite pas très agréable. Encore qu’il faille bien évacuer ça quelque part », p. 602). Ce sont bien plutôt dans tous les glissements qui nous font passer de Gerty la vierge impudique à la Vierge, mère de Dieu et figure de l’intercession entre les humains et l’Éternel, ou du passage de l’élévation de l’hostie à l’orgasme de Bloom que réside le « scandale ». Il ne faudrait pas néanmoins sous-estimer que le rapport à la chair, ou l’état de la chair dont témoigne « Nausicaa », n’était pas si courant en son temps, et suffirait même à distinguer Ulysse de la littérature « érotique » ou « pornographique » à laquelle certains voulurent l’assimiler.

    En fait, plusieurs scènes se jouent simultanément. D’abord, les rêveries sentimentales de Gerty ouvrent complaisamment au mystérieux inconnu qui la regarde les portes de son théâtre féminin, théâtre qui est tout autant le lieu d’une « mascarade féminine6 », d’une « performance » qui tente de faire exister la femme7, que d’une aliénante identification. Bloom, voyeur actif, dont le monologue intérieur est beaucoup plus direct, cru et charnel, utilise Gerty de deux manières. Elle est, d’une part, une femme à partir de laquelle il essaie de percer l’énigme du désir féminin, en s’aidant du discours de la science, avec un succès tout relatif. Mais la question du désir et de la jouissance sont indéniablement en jeu et le tirent quelque peu du côté du féminin : « Mais des tas d’entre elles n’arrivent pas au septième ciel, je crois. Gardent ça en suspens durant des heures. Pour moi c’est une sorte de fourmillement qui me gagne et m’envahit jusqu’au milieu du dos8 » (p. 609).

    En outre, Bloom tente d’oublier une autre scène qui met en jeu Molly et Boylan au domicile conjugal, sans y parvenir toutefois, comme l’indiquent assez les « Coucou » de la fin de l’épisode. De manière assez classique, serait-on tenté de dire, il se détache de Gerty pour retourner à sa femme, mais c’est ici qu’il faut revenir à l’Odyssée. En effet, le poème homérique contient l’idée d’une union quasi mystique entre Ulysse et Nausicaa. Au moment des adieux, Nausicaa dit à Ulysse : « Quand tu seras rentré, garde mon souvenir ! car c’est à moi d’abord que devrait revenir le prix de ton salut9. » À quoi Ulysse répond que ses vœux lui « resteront fidèles : tu me seras un dieu, tous les jours d’une vie que je te dois, ô vierge10 ! ».

    On peut faire l’hypothèse de ce que Joyce inscrit sa propre sentimentalité en créant avec Gerty un double romanesque de Nora infiniment plus complaisant que son épouse. Deux notations, discrètes, dans cette débauche de signes et de chair imagée, confirmeraient cette lecture. D’une part, les remerciements muets de Bloom à Gerty, « Jamais nous ne nous rencontrerons de nouveau. Mais ce fut délicieux. Adieu, chérie. Merci. Tu m’as donné de me sentir si jeune » (p. 622), où se dit assez sa reconnaissance toute ulysséenne pour la vie donnée, sinon sauvée. D’autre part, l’allusion à une chanson de Thomas Moore, « The last glimpse of Erin », que Joyce interpréta publiquement mais, surtout, devant Nora qui l’entendait chanter pour la première fois 11.

    M.C. et P.B.

    a

    Nausicaa

    L’Odyssée d’Homère. Fille du roi Alkinoos, Nausicaa, qui a grand air et beauté, aime au lit passer le plus clair de son temps, son corps lascivement posé sur de doux coussins, tandis que veillent sur elle deux adorables chambrières s’abandonnant aux montants de sa couche. Paresseuse, nonchalante, ointe d’huile et d’aromates, Nausicaa prend la vie par son bon côté, l’horizontal. C’est en quelque sorte une jeune Pénélope qu’on voudrait bientôt voir mariée au plus beau et au plus riche de ses prétendants. Athéna aux yeux pers lui rend visite : Toi, la fille sans souci que ta mère enfanta ! Toi qui laisses là, sans soin, tant de linge moiré ! Sans attendre l’aurore, presse ton noble père de te faire apprêter la voiture et les mules pour emporter les voiles, draps moirés et ceintures. Toi-même, il te vaut mieux aller en char qu’à pied : tu sais que les lavoirs sont très loin de la ville. Ainsi fait Nausicaa, comme Athéna le lui a suggéré, emportant, dans une fiole d’or, une huile bien fluide pour se frotter après le bain, elle et ses femmes.

    Une fois arrivées sur le bord du fleuve, on lave le linge sale de la famille puis, pour se désouiller soi-même, on prend le bain, se frotte d’huile, se laisse, en bronze et or, teindre par le soleil, puis au ballon à jouer l’on se met, dans les rires. Endormi dans les broussailles, Ulysse se réveille, nu comme un ver : sa forte main casse dans la dense verdure un rameau bien feuillu qu’il donnera pour voile à sa virilité. Tel en sa nudité, Ulysse s’avance vers les filles bouclées : le besoin le pousse. Loin de le trouver beau, les filles ne voient en lui qu’un étranger repoussant et, comme à tire-d’ailes, s’enfuient. Seule reste Nausicaa. Et Ulysse, aussitôt, de lui faire la cour. Il ne croit pas grand-chose de ce qu’il dit, mais ses flatteuses paroles séduisent Nausicaa qui accepte de le conduire jusqu’à son père. Ulysse demande à se laver et à s’oindre d’huile et, lorsqu’il revient s’asseoir, à l’écart, sur la grève, il est rayonnant de charme et de beauté. S’il y avait dans mon pays un homme pareil à cet Ulysse béni des dieux, comme je serais heureuse ! se dit Nausicaa. Pour éviter qu’on ne cancane à leur sujet, il va suivre Nausicaa de loin, le séduisant Ulysse, et entrer au château du père, abasourdi par autant de richesse : Que de trouble en son cœur, devant le seuil de bronze ! Car, sous les hauts plafonds du fier Alkinoos, c’était comme un éclat de soleil et de lune ‘. Du seuil jusqu’au fond, deux murailles de bronze s’en allaient, déroulant leur frise d’émail bleu. Des portes d’or s’ouvraient dans l’épaisse muraille : les montants, sur le seuil de bronze, étaient d’argent – sous le linteau d’argent, le corbeau était d’or et les deux chiens du bas, jeunes à tout jamais, étaient d’or et d’argent.

    Pour un peu, Ulysse en pleurerait de félicité, quoiqu’on peut se fier à Homère, on ne perd rien pour attendre. Quand Ulysse s’assoira dans la cendre, ce sera pour se faire le plus petit des hommes et le plus pitoyable. Ainsi séduira-t-il le père comme il a séduit la fille, en se donnant, larme à l’œil, la plus valeureuse des parts, la plus courageuse et la plus généreuse, de tous les aventuriers ayant jamais navigué du Ponant vers le Levant. Conquis, Alkinoos lui offre Nausicaa à marier (car Ulysse, jamais n’avouera l’être déjà, et père de Télémaque par surcroît), puis l’envoie se coucher sur le cadre ajouré, dans l’entrée résonnante, sous des draps de pourpre, des tapis par-dessus et des feutres laineux pour les couvrir encore. Ulysse va dormir du sommeil du juste et, dès l’aurore aux doigts de roses levée, prendre part aux jeux des Phéaciens, boxer, lancer les poids et lutter, mais se désistant pour la course à pied : Ulysse ne court pas, sinon dans sa tête ; la Ruse s’entend mal avec la Rapidité physique, on ne peut pas penser à comment tromper le monde et, en même temps, se faire aller le jarret. Et puis, courir vous oblige à faire carême et Ulysse n’a pas qu’une grosse tête, mais un estomac et un ventre en équipollent. Aussi aime-t-il mieux raconter ses aventures, un grand bonheur pour Alkinoos chez qui jamais l’étranger n’aborde. À beau mentir, vraiment, qui vient de loin ! Et si Ulysse y met autant de temps, c’est que, aussi longtemps que va durer ses contes, les gens d’Alkinoos vont remplir son vaisseau noir d’innombrables trésors. Plus on en mettra et plus son retour à Ithaque sera fameux. Ulysse en jouit tellement par avance qu’il en oublie jusqu’à l’existence de Nausicaa à qui il ne fera même pas ses adieux avant de reprendre la mer !

    L’Ulysse de James Joyce. Trois jeunes femmes, en bordure de mer, par un soir du bel été, deux s’occupant des jumeaux enfants qui se chicanent dans leur petite voiture, et la troisième qui, se tenant un tant soit peu à l’écart, n’ose regarder l’homme, plutôt vieux que jeune, qui les observe, en apparence discrètement, du haut du promontoire sur lequel il s’est assis. L’homme n’est nul autre que Léopold Bloom. À elles trois, les femmes forment une divinité, celle de la Vierge-Marie pour qui, dans une église voisine, on chante psaumes et cantiques. Deux des Vierge-Marie se nomment Cissy Caffrey et Edy Boardman ; l’une est nourrissante et l’autre très torchante, en rien ne se distinguant des autres femmes de Dublin, porteuses d’enfants au propre et au figuré, bonnes petites épouses, faiseuses de ménage et de repas, plus instinctives

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