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    2. Ulysses
    3. Chapitre 220
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    glissée une autre notation, mais sans plus de détails : « Bloom qui se trouvait là pour certaine langueur qui lui était venue mais déjà dissipée, de ce qu’il avait eu le soir d’avant un songe singulier de sa dame Mme Moll, laquelle lui était apparue portant babouches rouges et pantalons à la turque, ce qui dans l’esprit des clairvoyants est signe de mutation […]. »

    Donc, durant la nuit du 15 au 16 juin, Stephen Dedalus dans sa tour à Sandycove, et M. Bloom dans le lit conjugal de son appartement d’Eccles street, ont fait le même rêve. Pourquoi donc ce double rêve, quelle est ici l’intention de Joyce ? Il veut montrer que dans son rêve oriental Stephen a vu par avance un étranger brun lui offrir les charmes opulents d’une femme qui est sa propre femme. Cet étranger brun est Bloom. Voyons un autre passage : lorsqu’il sort, avant le petit déjeuner pour aller s’acheter un rognon, Bloom évoque une vision orientale très voisine : « Quelque part en Orient : le petit jour ; partir à l’aube, marcher en avant du soleil, lui dérober un jour. Et toujours ainsi théoriquement n’être jamais plus vieux d’un jour. Suivre un rivage, en pays inconnu, atteindre la porte d’une ville, là une sentinelle, vieux troupier aussi, les grosses moustaches du vieux Tweedy [le père de Molly], appuyé sur une longue espèce de lance. Flâner par des rues ombragées de bannes. Des figures passent enturbannées. Cavernes sombres où on vend des tapis, un hercule, Turco le Terrible, assis les jambes croisées, fumant une pipe serpentine. Cris des vendeurs dans les rues. Eau parfumée au fenouil, sherbets. Errer à l’aventure tout le jour. Rencontrer peut-être un voleur ou deux. Eh bien, va pour la rencontre. Voilà le crépuscule qui approche. Les ombres des mosquées le long des piliers ; Iman avec son parchemin roulé. Un frisson dans les arbres, signal, le vent du soir. Je continue. Ciel d’or qui se fane. Mère au guet sur sa porte. Elle rappelle ses enfants dans son idiome obscur. Mur élevé : derrière, des cordes nasillardes. Nuit ciel lune, violet, couleur des jarretières neuves de Molly. Instruments à cordes. Écoutons. Une jeune fille jouant d’un de ces instruments qui s’appellent comment déjà, tympanons ? Je passe. »

    Aux environs de deux heures, Bloom se rend à la Bibliothèque nationale, et Stephen, qui sort avec Mulligan, voit pour la première fois de la journée Bloom, qu’il connaît vaguement. Et, là, Stephen reconnaît en Bloom l’étranger de son rêve.

    « Un homme passa entre eux, saluant poli.

    — Re-bonjour, dit Buck Mulligan.

    « Le porche.

    « Ici, j’ai guetté les oiseaux, cherchant l’augure. Aengus des oiseaux. Ils vont, ils viennent. Hier soir je me suis envolé. Aisément envolé. Les hommes s’étonnaient. Puis la rue des filles. Il me tendit un melon crémeux. Entrez, vous verrezB.

    — Le Juif errant, chuchota Buck Mulligan avec un effarement de pitre. Avez-vous remarqué ses yeux ? » Et il lance une plaisanterie obscène. Quelques lignes plus loin :

    « Un dos noir les précédait… Pas de léopard, qui descend, qui passe le portillon sous la herse barbelée.

    « Ils suivaient. »

    Le dos noir de Bloom, son pas de léopard. La boucle est fermée.

    Plus loin, dans le chapitre du cauchemar dans la maison mal famée, nous trouvons un écho du double rêve Bloom-Stephen. Les indications de mise en scène portent : « [(Bloom] lève les yeux. À côté d’un mirage de palmiers-dattiers se dresse devant lui une belle femme habillée à la Turque. Ses opulentes rondeurs gonflent ses pantalons écarlates et sa veste lamée d’or. Une ample écharpe jaune la ceinture. Un yashmak blanc que la nuit violacé couvre son visage, ne laissant voir que ses grands yeux noirs et sa toison d’ébène.) » Bloom appelle : « Molly ! » Puis, beaucoup plus tard dans la même scène, Stephen dit à l’une des filles : « – Écoutez, j’ai rêvé d’un melon d’eau », ce à quoi la fille répond : « – C’est un voyage et vous aimerez une dame étrangère. » Les melons auxquels Stephen a rêvé, originairement fruits crémeux qu’on lui offre, s’identifient finalement aux courbes opulentes de Molly dans le chapitre des questions et réponses, chapitre 2 de la troisième partie. Bloom « embrassa les ronds mamelons melons melliflons de sa croupe, chaque rond et melonneux hémisphère à son tour, et leur sillon minon marron, avec une osculation ténébreuse, prolongée, provocante, melon-odorante. »

    Le double rêve de Bloom et de Stephen se révèle prophétique, parce que, dans l’avant-dernier chapitre du livre, l’intention de Bloom est de faire exactement ce que voulait faire l’étranger dans le rêve de Stephen – autrement dit, Bloom souhaite réunir Stephen et Marion, la femme de Bloom, dans l’espoir d’évincer ainsi Bolan, thème qui est particulièrement souligné dans le chapitre de l’Abri du Cocher, au début de la troisième partie.

    a

    Notes de Jean-Michel Rabaté

    1. Voir la préface de Richard Ellmann à l’édition d’Ulysse confiée à Hans Walter Gabier, Ulysses, éd. de Hans Walter Gabier, avec la collaboration de Wolfhard Steppe et Claud Melchior, New York, Random House, 1986, p. XII-XIII.

    2. Nous n’avons qu’une partie de ces notes : voir Œuvres, Bibl. de la Pléiade, t.I, p. 1877-1895.

    3. Oscar Wilde, Le Portrait de M. W. H., traduit et annoté par Jean Gattégno, d a n s Œuvres, Paris, Gallimard, Bibl. de la Pléiade.

    4. Maurice Maeterlinck, La Sagesse et la Destinée (1899), Paris, Fasquelle, 1941, p. 35.

    Notes sur la lecture de Nabokov

    A. V.N. écrivait : « Ceux qui, par pure curiosité artistique, liront le chapitre 12 dans la maison mal famée, verront à un moment donné Bloom apercevoir son visage dans le miroir sous le reflet d’un portemanteau orné de bois de cerf – et ce visage de cocu est fugitivement identifié comme le visage de Shakespeare ; les deux thèmes, Bloom trompé et Shakespeare trompé, se rejoignent dans le miroir d’une putain. »(NdFB)

    B. Dans son exemplaire annoté, V.N. note en marge de ce paragraphe : « N.B. : Stephen se rappelle son rêve au moment où il remarque Bloom qui s’incline, salue. » (NdFB)

    X. LES ROCHERS ERRANTS

    Notice Gallimard (2013)

    En confrontant l’Ulysse dublinois aux deux dangers que Circé présentait comme mutuellement exclusifs, Joyce abandonne le modèle odysséen. « Les Rochers Errants » est un épisode excédentaire divisé en 19 sections dans lesquelles on est tenté de voir un microcosme du roman tout entier, mais là aussi il y a surnombre. D’entrée de jeu, le texte se présente comme une mise en abyme de l’écart. Nous avons atteint la seconde moitié de l’œuvre dont les deux parties figurent ces rochers entre lesquels il est périlleux de s’aventurer. Le lecteur téméraire qui entend continuer un voyage qui s’apparente à une quête du sens ne devra plus se concentrer sur ce qui est dit mais sur la manière dont cela est dit. Et Jason n’est-il pas là pour nous rappeler que c’est des usurpateurs qu’il faut triompher, ceux qui en ce 16 juin 1904 ont lancé les deux protagonistes à l’assaut des rues de la capitale ?

    Curieusement, on trouve les lieux et les objets dans la colonne que le schéma de Linati consacre aux personnages. Ceci est d’autant plus paradoxal que c’est dans l’épisode X que l’on rencontre le plus grand nombre de citoyens prisonniers d’une ville-labyrinthe que nul ne quittera ce jour-là. À terme, la paralysie guette ces errants presque chosifiés dont les trajets, devenus trajectoires, apparaissent comme bornés et balisés par les deux « sur-parcours » qui délimitent et encadrent l’épisode : celui qui conduit le Père Conmee à Artane et la cavalcade du vice-roi qui se rend à l’inauguration d’une kermesse. C’est une mission charitable qu’accomplissent ces deux représentants d’un pays étranger, mais on s’aperçoit que ceux qui incarnent les deux forces qui oppriment l’Irlande se refusent à reconnaître l’Autre. Le jésuite s’emploie à nier ou à réduire l’altérité chaque fois qu’elle se manifeste, et l’Irlande colonisée par l’Angleterre a perdu toute identité. Dans une section où la densité du texte est symbolique de la pression qui s’exerce sur les citoyens, le vice-roi n’est jamais reconnu comme tel par ceux qui le saluent. Leur repérage spatial paraît d’ailleurs plus important que leur nom, comme si Joyce souhaitait laisser le dernier mot à ce Dublin fantasmé, réduit in fine à la page du livre.

    De façon symptomatique, Bloom et Stephen n’apparaissent pas dans la dix-neuvième section, rappel du « non serviam », ce refus blasphématoire et luciférien de servir que ce dernier lançait dans le Portrait de l’artiste et prélude à ce même cri lancé à sa mère dans « Circé ». Quant à Bloom, c’est grâce à son statut de métèque (au sens grec de metoikos) qu’il échappe à l’emprise des deux forces qui broient l’Irlande. Les deux personnages évitent les mirages et les illusions nés du mouvement des rochers qui s’entrechoquent. En effet, nombreux sont les leurres qui jalonnent l’épisode. Le risque est grand de trébucher sur les peaux de banane que glisse Joyce : polysémie, homonymie, méprise sur le contenu d’une marmite, changement de toponyme au cours d’une histoire qui semble échapper totalement aux Dublinois, confisquée qu’elle est par les Anglais ou par la religion. À ces périls s’ajoutent les trente-deux interpolations, ces fragments venus d’ailleurs qui affleurent à la surface du texte. Ils fonctionnent de manière rétrospective ou prospective : il faudra par exemple attendre le dernier épisode, « Pénélope », pour acquérir la certitude que c’est effectivement Molly qui a lancé la pièce au marin unijambiste. Les premiers critiques de Joyce avaient été déroutés par ces interpolations qui participent d’une technique cinématographique. Paradoxalement, ces notations, perçues comme des facteurs de discontinuité, sont mises

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