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    2. Ulysses
    3. Chapitre 216
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    les gens que croisent Bloom dans les rues de Dublin sont faméliques. De la peau sur des os, telle cette sœur de Stephen Dédalus qui, habillée de guenilles, court après son père afin de lui soutirer quelques guinées qui lui permettraient de se nourrir et de nourrir ses misérables sœurs. Et comme ça se passe chaque fois que Bloom est confronté à des enfants que le pain et le lait leur manquent, il songe à sa fille Millie. Quand il lui faisait prendre un bain chaud, son petit corps dodu et bien modelé, qui lui donnait le goût de mordre dans la chair et de l’avaler par petites bouchées. En se masturbant peut-être aussi ? Père cannibale et incestueux. Personne n’est quelque chose, sinon de la chair à canon, guerrier ou religieux ou profane, à manger au nom du Dieu Tout-Puissant, père obèse et gourmand qui a donné au monde son Fils à dévorer. La harpe qui jadis a fait de nous des gueux. Faut manger. Après ça ira mieux.

    Entre donc chez Burton, Léopold Bloom : L’odeur le saisit à la gorge : sauces de viande pénétrantes, lavasse de légumes verts. Le repas des fauves. En l’occurrence de sales ouvriers qui s’empiffrent de n’importe quoi et n’importe comment. Ils en ont plein les moustaches, plein le poitrail, plein les doigts, et leurs gros yeux de poissons morts sont une insulte à l’intelligente beauté de la nourriture. Un ogre aussi raffiné que Léopold Bloom ne mange pas que pour s’emplir la panse, mais parce que ce faisant l’Univers se tend comme une supercorde et que cette supercorde-là enrobe le corps d’une musique bienveillante qui favorise l’ingestion et la digestion. Chez Burton, trop de fausses dents qui claquent, trop de rots intempestifs, trop de pets mal déguisés en courants d’air. Un Lestrygon ne mange pas de cette viande-là, avariée. Aussi bien faire patienter sa faim en allant boire un verre de bourgogne chez le grippe-sous Dany Byne. S’y sustenter d’abord des nouvelles de Dache Boylan qui organise des combats de boxe pour payer ses tournées d’opéra. Devrais-je me méfier de lui, cet ogrillon qui tourne autour de ma femme sous le prétexte d’en faire une diva ? Rien à craindre : Dache Boylan n’est qu’un serin à grande gueule et à petite quéquette. Aussi bien l’oublier, celui-là. Et manger ce sandwich comme amuse-bouche avant d’aller voir dehors si j’y suis.

    L’ogre n’a pas satisfait sa faim comme ne l’a pas apaisée non plus le roi des Lestrygons en pays homérien puisqu’Ulysse s’est défilé et que lui seul mérite d’être cannibalisé. S’il entre à la bibliothèque, Léopold Bloom aura-t-il meilleure veine ?

    a

    La lecture de Nabokov

    Heure : Une heure passée, le début de l’après-midi.

    Lieu : Diverses rues au sud de la colonne de Nelson.

    Personnages : Bloom, et différentes personnes qu’il rencontre par hasard.

    Action : Partant de la colonne de Nelson, Bloom se dirige à pieds vers le sud, en direction de la rivière. Un sombre jeune YMCA met un prospectus « Elie arrive » dans « une main de M. Bloom ». Pourquoi cette bizarre construction, « dans une main de M. Bloom » ? Parce que, pour le distributeur de prospectus, une main n’est jamais qu’un endroit où déposer quelque chose : que cette main appartienne à M. Bloom est secondaire.

    « Un mot cœur à cœur.

    « Bloo… Moi ? Non, Blood, sang.

    « Sang de l’agneau.

    « Insensiblement pendant qu’il lisait ses pieds le portaient vers la rivière. Êtes-vous sauvé ? Tous lavés dans le sang de l’agneau. Dieu veut des victimes sanglantes. Naissance, hymen, martyre, guerre, fondation d’un monument, les sacrifices, holocauste de rognon brûlé, autel des druides. Elie arrive. Dr. John Alexander Dowie, restaurateur de l’église de Sion, arrive.

    Il arrive ! Il arrive !

    Soyez les bienvenus. »

    Suivons à présent le destin de ce prospectus, appelé en anglais un throwaway.

    En chemin pour aller déjeuner en ville, Bloom croise quelques personnes. La sœur de Stephen est devant la salle des ventes Dillon, en train de vendre quelque vieillerie. Ils sont très pauvres.

    Il n’y a plus de mère, et le père, un vieil égoïste, n’a pas l’air de s’en préoccuper. Bloom met le pied sur le pont O’Connell et voit des mouettes qui tournoient et battent des ailes. Il a toujours à la main le prospectus que lui a donné le jeune YMCA, annonçant le sermon du Dr. Dowie, évangéliste qui va parler sur le thème « Élie arrive ». Bloom froisse le papier en boule et le jette du haut du pont pour voir si les mouettes vont foncer dessus : « Élie trente-deux pieds à la seconde arri. » (Bloom le scientifique.) Les mouettes ignorent la boule de papier.

    Suivons brièvement au long de trois chapitres le thème d’Élie, le destin de ce bout de papier. Il est tombé dans le courant de la Liffey et servira à marquer le passage du temps. Il commence à descendre la rivière vers l’est, vers la mer, aux environs d’une heure et demie. Une heure plus tard, filant légèrement au courant de la Liffey, il est arrivé jusque sous le pont de l’Embranchement, à deux pâtés de maison à l’est de son point de départ : « Un léger esquif, prospectus froissé, Élie arrive, descendait la Liffey, passait sous le pont de l’Embranchement, par-dessus les rapides, là où l’eau bouillonne rageuse autour des piles, et voguait plein est, laissant derrière lui les carènes et les chaînes des ancres, entre le vieux bâtiment de la Douane et le quai George. » Quelques minutes plus tard : « North Wall et quai de Sir John Rogerson, carcasses de bateaux et chaînes d’ancre, voguant vers l’est voguait un esquif, un prospectus froissé, roulé dans le sillage du ferry-boat, Élie arrive. » Enfin, un peu après trois heures, il arrive dans la baie de Dublin : « Élie, esquif léger, prospectus froissé, voguait plein est au flanc des grands voiliers et des chalutiers, et dans un archipel de bouchons, au-delà de New Wapping street, et du bac de Benson, et le long du trois-mâts schooner Rosevean venu de Bridgewater avec un chargement de briques. » À peu près au même moment, M. Farrell, juste avant qu’il ne bouscule le jeune aveugle, lance un mauvais regard « au nom d’Élie affiché sur le Metropolitan Hall », où doit parler l’évangéliste.

    Autre thème « synchronisateur », une procession d’hommes-sandwiches en blouses blanches qui défilent lentement vers Bloom dans les parages de Westmoreland street. Bloom broie du noir à la pensée de la proche infidélité de Molly, et pense en même temps à des publicités : « Tous est bon pour mettre des affiches. Ce charlatan de la chaude-pisse qui était collé aux murs de tous les urinoirs. […] Dr. Hy Franks. Ça ne lui coûtait pas un radis […]. » Cette idée l’amène à se demander avec terreur : et si Boylan avait une gonorrhée ? Ces hommes-sandwiches vantant la papeterie Wisdom Hely vont eux aussi se promener tout au long du livre. Dans l’esprit de Bloom, ils sont associés à son passé heureux, du temps où il travaillait chez Hely dans les premières années de son mariage.

    Dans ce même chapitre 5, se dirigeant vers le sud pour aller déjeuner, Bloom rencontre une de ses anciennes amours, Mme Denis Breen, ex-Joséphine Powell. Elle lui raconte qu’un plaisantin anonyme a envoyé à son mari une carte postale injurieuse, avec ce message : « Foutu. » Bloom change de sujet et demande à Mme Breen si elle a des nouvelles de Mina Beaufoy. Vous voulez dire Purefoy, corrige-t-elle, Mina Purefoy ? Le lapsus de Bloom vient de ce qu’il pensait à Philip Beaufoy, le nom pseudo-élégant du type qui a écrit « Le coup de maître de Matcham », la nouvelle primée dans Pêle-Mêle que Bloom a lue au cabinet après son petit déjeuner. Tout en causant avec Mme Breen, Bloom s’en remémore même des passages. Apprenant que Mme Purefoy est à la maternité, en proie depuis trois jours aux douleurs d’un accouchement difficile, le compatissant Bloom se promet d’aller la voir à l’hôpital, ce qu’il fera huit heures plus tard, au chapitre 11. Une chose en amène une autre dans ce merveilleux livre. Et le fait de rencontrer Joséphine Powell, devenue Mme Breen, déclenche dans l’esprit de Bloom tout un train de pensées rétrospectives, le passé heureux, à l’époque où il a connu Molly, et aujourd’hui le présent, laid et amer. Il se rappelle une soirée récente, au cours de laquelle Molly, Boylan et lui-même se sont promenés le long de la Tolka, une rivière près de Dublin. Elle fredonnait. Peut-être est-ce alors que ses doigts et ceux de Boylan se sont touchés, qu’une question fut posée, et que la réponse fut : oui. Le changement chez Molly, le changement dans leur amour, s’est produit quelque dix années auparavant, en 1894, après la naissance de leur petit garçon et sa mort dix jours plus tard. Il pense à offrir comme cadeau à Molly une pelote à épingles, peut-être pour son anniversaire, le 8 septembre : « Les femmes ne ramassent pas les épingles. Disent que ça pique l’am. » Le mot amour a été tronqué pour montrer ce qui se passe. Mais il ne peut pas empêcher sa liaison avec Boylan : « Inutile de revenir en arrière. C’était fatal. Dis-moi tout. »

    Bloom entre dans le restaurant Benton, mais c’est bruyant, bondé, sale, et il décide d’aller déjeuner ailleurs. Attentif cependant à n’offenser personne, pas même le puant Benton, Bloom se livre, pour lui-même, à une petite pantomime de courtoisie : « M. Bloom, hésitant, porta deux doigts à ses lèvres. Ses yeux signifiaient :

    — Pas ici.

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    Tags:
    Classique, Fiction, Littérature, Roman
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