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    2. Ulysses
    3. Chapitre 204
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    les exploits d’Ulysse. Ce qui le fait tant pleurer que le fils d’Alkinoos croit avoir affaire à une femme et lui cède son glaive-phallus doré pour qu’il puisse redevenir homme et ainsi raconter, en guise de remerciement, quelques-unes de ses houleuses aventures.

    L’Ulysse de James Joyce. Dès qu’apparaît Léopold Bloom, à huit heures le matin, dans la cuisine du logement qu’il habite au 7 Eccles street, on sait à qui on a affaire : M. Léopold Bloom se nourrissait avec délectation des organes internes des mammifères et des oiseaux. Il aimait une épaisse soupe d’abatis, les gésiers au goût de noisette, un cœur rôti avec sa farce, des tranches de foie frites dans la chapelure, des œufs de morue rissolés. Par-dessus tout il aimait les rognons de mouton au grill qui flattaient ses papilles gustatives d’une belle saveur au léger parfum d’urine. Un ventre, qui crie souvent famine, tel est Léopold Bloom. Tout son monde tourne autour de la nourriture. Est-ce parce qu’il est juif et qu’il passe ses journées à errer dans les rues de Dublin à cause de son job de rabatteur d’annonces pour L’Homme libre, le quotidien nationaliste de Dublin ? Pourquoi à l’Ulysse d’Homère, si grec, cet Ulysse-là de Joyce, si juif ?

    On sait déjà qu’à Rome et à Trieste, quelques-uns des meilleurs amis de Joyce étaient des Juifs ; on sait aussi que chaque fois que Joyce rêve à une relation extraconjugale, il s’amourache de plantureuses Juives. À la différence de Léopold Bloom toutefois, les amis juifs de Joyce à Rome et à Trieste étaient tous riches, aristocrates et arrogants. Leurs femmes et leurs filles ne pouvaient pas frayer vraiment avec un écrivain irlandais presque inconnu, simple professeur de langues en exil et pauvre comme Job. Ce refus de l’autre avait humilié Joyce, et sans doute l’esprit de la vengeance l’habitait-il quand il créa Léopold Bloom, l’anti-héros par excellence : un homme tout ce qu’il y a de plus ordinaire, qu’on ne saurait pas reconnaître de tous ceux-là qui, dès que se lève l’aurore aux doigts de roses, déambulent dans les rues de Dublin pour se rendre ou pour revenir de leur travail. Bloom est un mari ordinaire aussi, un père distrait qui ne pense pas souvent à sa fille Milly en allée de la maison, ni à son fils Rudy à peine né que déjà mort. C’est en cela qu’il ressemble à l’Ulysse d’Homère dont la paternité ne compte pas pour grand-chose entre son départ d’Ithaque et son retour, Télémaque n’occupant guère son esprit, pas plus d’ailleurs que ne le fait Pénélope. Ulysse ne cherche pas à séduire les femmes : ce sont elles qui vont vers lui et l’obligent presque à faire l’amour avec elles. Si Ulysse s’y résout, c’est par la faiblesse de sa nature d’homme. Vaincre les éléments et les monstres que le destin met sur sa route, voilà par quoi s’exprime véritablement la virilité d’un homme-dieu, voilà par quoi il triomphe, tandis que succomber aux charmes d’une femme, fut-elle déesse, n’a rien de victorieux, bien au contraire.

    Léopold Bloom est un homme trop ordinaire pour que les femmes s’intéressent à lui et veuillent le séduire. Trop velléitaire pour prendre les devants avec elles, ainsi se retrouve-t-il libidineux de pensées, fétichiste, voyeur et amateur de romans pornographiques. L’obsède le bas du corps de la femme, de ses entrailles au bout de ses pieds. Quand Bloom lape sa soupe d’abatis, mange ses gésiers de volaille ou ses rognons de mouton, c’est le jus animal de la femme qu’il suce, ce sont ses viscères et ses tripes qu’il dévore. Ça goûte pareil dans sa bouche et ça le fait bander bien plus efficacement que n’importe quelle provocation femellement sexuée.

    Huit heures du matin et Bloom rêve d’autre chose que de simples rôties pour son petit-déjeuner. Après avoir jeté un coup d’œil à sa femme Molly, lascivement endormie, Bloom sort sans ses clefs (comme Dédalus est parti de la tour de Sandycove sans prendre les siennes), mais avec une pomme de terre en poche (n’est-ce pas le symbole de l’Irlande, qui protège de la faim ultime ?). Dehors, un soleil Home-Rule se levant au nord-ouest dans la ruelle derrière la banque d’Irlande. Des commerces par rangées de chaque bord des rues que Bloom traverse, sans jamais oublier qu’il est Juif : aussi calcule-t-il le coût des marchandises étalées et le prix de vente qu’on en demande puis, soustrayant l’un de l’autre, peut-il se faire une idée du profit réalisé sur chaque item comme un château de cartes qu’il érige dans sa tête, mais qu’il va laisser s’écrouler quand il se retrouve devant l’étal du boucher : Fixant les chapelets de saucisses, le boudin blanc et noir. Ses yeux se nourrissaient des chaînons luisants de chair hachée et il humait paisiblement la tiède exhalaison de sang de cochon cuit et aromatisé. Un rognon suintait goutte à goutte sur un plat à dessin genre chinois, bleu et blanc. Tandis que le boucher, bien sûr allemand, aux yeux de furet, sert une grosse femme aux biceps et aux mollets en forme de jambonneaux. Puis meugle une vache. De l’entendre fait venir vers Bloom le marché aux bestiaux où, chaque jour, il aime à se rendre : une jouissance secrète l’habite quand il voit, criantes, les bêtes dans leurs parcs, les moutons marqués, fiente qui flaque et choit, les éleveurs en souliers à clous qui pataugent dans la litière, faisant claquer leur paume sur un quartier arrière de viande à point. Et ceci étant dit, on comprend mieux pourquoi Bloom aime manger tandis qu’il peut voir sa femme Molly faire ses bruyants besoins, assise sur le siège des toilettes. Comme Joyce, Bloom a une fixation sur les excréments, de préférence chauds et puants quand ils sortent du corps. Comme Joyce aussi, sa vision du monde négativiste ne peut aller au bout de sa logique que si se manifestent, de l’humaine espèce, les parties honteuses. Par exemple, ce que pense Bloom de la terre de ses ancêtres en pays de Judée : une terre stérile, un désert, lac volcanique, la mer morte ; ni poissons, ni plantes marines ; profonde en la terre. Une mer morte dans une terre morte, grise et vieille-vieille à présent. Elle a porté la plus ancienne, la première race. Le peuple le plus ancien. Errant de par la terre, de captivité en captivité, multipliant, mourant, et partout naissant. Et la voilà maintenant cette terre. Désormais elle ne peut plus enfanter. Mort. Celui d’une vieille femme : con gris et avachi du monde.

    Ses rognons de mouton sous le bras, rentre à la maison Léopold Bloom. Sa femme restée au lit, il lui apporte son petit-déjeuner ; pendant qu’elle va manger, Bloom regarde ses formes rebondies et l’intervalle entre les tétons volumineux et doux. Fléchis dans sa chemise de nuit comme les mamelles d’une chèvre. La chèvre a reçu une lettre de Dache Boylan avec qui elle partira peut-être en tournée, car l’habite le rêve de devenir une diva de l’opéra. Pour un peu d’amour. Et celui qui, libidineux, zieute la chèvre, doit expliquer ce que signifie le mot métempsycose lu dans un livre de Paul de Kock (coquin de nom pour un coquin d’auteur) : Les Grecs anciens croyaient qu’on pouvait être changé en animal ou en arbre, aussi que nous vivons après la mort. Ça s’appelle la transmigration des âmes. N’y comprend pas grand-chose, Molly Bloom, et métempsycose devient en son peu de cerveau mes tempes si chaudes. Pendant ce temps, brûlent sur le poêle les rognons de mouton. Bloom les sauve in extremis de la carbonisation, s’assoit et, tout en mangeant, lit la lettre qu’il a reçue de sa fille Milly. Raconte des banalités d’adolescente de quinze ans dans des phrases tout aussi banales. Pourtant Bloom ressent un faible regret malaise qui s’insinue dans ses mouelles, et pourquoi donc ? Le mari libidineux serait-il aussi un père incestueux ? Le jour que Bloom s’est rendu compte que Milly avait un sexe. Le jour qu’il a vraiment vu ses belles jambes nues. Le jour qu’il l’a peut-être embrassée sur la bouche : douceur des légères lèvres de jeunes filles. Lèvres baisées. Lèvres de la femme, baiseuses, baisées, pleines, prenantes, collantes. Le sentiment de Bloom est si trouble qu’il admet que cela vaut mieux pour Milly de rester au loin. De penser ainsi à sa fille lui procure une douce détente des entrailles. Ça l’a déconstipé. Il peut maintenant se rendre au fond du jardin où se trouvent les bécosses tout en pensant encore au fumier dont on devrait engraisser le potager. Ne jamais manquer de légumes verts. Sont excellents contre la constipation et contre les hémorroïdes si souffrantes quand elles assaillent Bloom. Assis sur le siège percé, déféquant tout en contentant le voyeur en lui : par une fente, regardant ce qui se passe chez la voisine. Puis remontant son pantalon après s’être torché d’une page de journal, comme par hasard celle sur laquelle on a imprimé une nouvelle parlant de jeunes filles en gaze grise.

    Ses entrailles ainsi apaisées, de même que ses pensées incestueuses, Bloom peut donc sortir de sa cache et reprendre la rue. Sonne le glas de l’église Saint-George. Tantôt, ce sera l’enterrement de Paddy Dignam et Bloom ne peut pas ne pas y assister. Avant de se joindre au cortège, passera par le bureau de poste. L’y attend une lettre de Martha, sa maîtresse, avec qui il correspond sous le pseudonyme d’Henry Fleury. Que de la banalité encore parce que la passion ne fait pas partie de l’univers de Bloom. Il lit la lettre de sa maîtresse comme il lit les nouvelles publiées

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    Tags:
    Classique, Fiction, Littérature, Roman
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