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    2. Ulysses
    3. Chapitre 19
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    poussière de morts, dévore les abats pisseux de tous les morts. Hissé tout raide sur le plat-bord, il exhale vers le ciel la puanteur de sa tombe verte, sa narine lépreuse ronfle à la face du soleil.

    Une déferlante de changement tout ça, yeux marron bleuis par le sel. Mort en mer, la plus douce de toutes les morts connues de l’homme. Vieux Père Océan168. Prix de Paris169 : méfiez-vous des imitations. Regardez touchez essayez un peu vous allez adorer. On s’est marrés incroyable.

    Viens. J’ai soif170. Ça se couvre. Pas de nuages noirs à l’horizon, si ? Orage. Étincelant il chute, orgueilleux éclair de l’intellect, Lucifer, dico, qui nescit .occasum171 Non. Mon chapeau à coquille, mon bourdon et sesmes sandalants croquenots172. Où ? Vers les terres du soir. Le soir finira bien par se trouver.

    Il saisit sa canne par la poignée, esquissant mollement quelques attaques, lambinant encore. Oui, le soir finira bien par se trouver en moi, sans moi. À chaque jour sa fin. Au fait le prochain quand est-ce que ce sera ? Mardi sera le jour le plus long173. De toute la joyeuse nouvelle année, maman, et ron et ron174. Tennyson-gazon, gentleman-poète. Già. Pour la vieille sorcière aux dents jaunes. Et Monsieur Drumont, gentleman-journaliste. Già. Mes dents sont dans un état lamentable. Pourquoi, je me le demande ? Sens. Celle-là se déchausse aussi. Coquilles. Devrais-je aller chez le dentiste, je me demande, avec cet argent ? Celle-là.

    Ça. Kinch l’édenté, le surhomme. Comment ça se fait, je me le demande, un sens à voir là-dedans peut-être ?

    Mon mouchoir. Il l’a jeté. Je m’en souviens. Je ne l’ai pas ramassé ?

    Sa main tâtonna en vain dans ses poches. Non. Ferais mieux d’en acheter un.

    Il colla la crotte séchée curée de sa narine sur l’arête d’un rocher, soigneusement. Maintenant regarde qui veut.

    Derrière. Peut-être quelqu’un.

    Il tourne la tête par-dessus l’épaule, issant yeux regardant en arrière175. Déplaçant dans le ciel ses hauts espars, un trois-mâts, voiles mises en croix176, rentre au port, remontant le courant, se déplaçant en silence, vaisseau silencieux.

    II

    L’ODYSSÉE

    a

    M

    onsieur Léopold Bloom1 se régalait des entrailles des animaux et des volatiles. Il aimait une épaisse soupe d’abats, les gésiers au goût de noisette, un cœur farci rôti, des tranches de foie panées frites, des laitances de morue frites. Plus que tout il aimait les rognons de mouton grillés qui lui laissaient sur le palais la saveur légèrement acidulée d’un délicat goût d’urine.

    Il avait les rognons en tête tandis qu’il se déplaçait à pas légers dans la cuisine et installait sur le plateau bombé ce dont elle avait besoin pour son petit déjeuner. Dans la cuisine l’air et la lumière étaient glacés, mais dehors c’était partout la douceur d’un matin d’été. Ça lui donnait un petit creux.

    Les braises rougeoyaient.

    Une autre tranche de pain beurré : trois, quatre : bien. Elle n’aimait pas une assiette trop pleine. Bien. Il se détourna du plateau, prit la bouilloire sur la plaque où elle se tenait au chaud et la posa de guingois sur le feu. Elle y resta, maussade et trapue, le bec tendu. Tasse de thé bientôt. Très bien. Bouche sèche.

    Raide sur ses pattes, la chatte faisait le tour du pied de la table, la queue dressée.

    — Mkgnao !

    — Ah ! te voilà, dit M. Bloom en se détournant du feu.

    La chatte répondit par un miaulement et, raide et digne, fit à nouveau en miaulant le tour du pied de la table. C’est ainsi qu’elle se pavane sur mon bureau. Rrron. Gratte-moi la tête. Rrron.

    M. Bloom observait avec une curiosité bienveillante l’agile silhouette noire. Si propre à voir : l’éclat de son pelage lustré, le bouton blanc sous la naissance de la queue, les éclairs que lançaient les yeux verts. Il se pencha vers elle, les mains sur les genoux.

    — Du lait pour la minette ! dit-il.

    — Mrkgnao ! se plaignit la chatte.

    On dit qu’ils sont stupides. Ils comprennent ce que nous disons mieux que nous ne les comprenons. Elle comprend tout ce qu’elle veut. Et rancunière avec ça. Cruelle. Sa nature. Curieux que les souris ne couinent jamais2. Semblent aimer ça. Me demande de quoi j’ai l’air pour elle. Aussi haut qu’une tour ? Non, elle peut sauter plus haut que ma tête.

    — A peur des poulets, dit-il d’un ton moqueur. A peur des pillots-pillots. Je n’ai jamais vu une minette aussi stupide que cette minette.

    — Mrkrgnao3 ! fit la chatte d’une voix forte.

    Elle leva la tête, clignant ses yeux avides à demi fermés de honte et, avec de longs miaulements plaintifs, lui montra ses dents blanc-lait. Il observait les fentes sombres des pupilles que rétrécissait la convoitise jusqu’à ce que les yeux devinssent des jades verts. Il alla ensuite jusqu’au buffet, prit le pot que le laitier de Hanlon venait de lui remplir, versa du lait tièdemousseux dans une soucoupe et lentement la posa sur le sol.

    — Gurrhr ! fit la chatte en se précipitant pour le laper.

    Il regardait les moustaches qui brillaient d’un éclat métallique dans la faible lumière tandis qu’elle baissait la tête à trois reprises et lapait à petits coups. Je me demande s’il est vrai qu’ils ne peuvent plus chasser les souris si on les leur coupe4. Pourquoi ? Peut-être qu’elles brillent dans le noir, les pointes. Ou peut-être que ça leur sert d’antennes dans l’obscurité.

    Il écoutait ses coups de langue qui lapaient. Des œufs au jambon, non. Pas de bons œufs avec cette sécheresse. Besoin d’eau pure et fraîche. Jeudi : pas non plus un bon jour pour un rognon de mouton chez Buckley. Frit au beurre, avec une tombée de poivre. Mieux vaut un rognon de porc chez Dlugacz5. Pendant que l’eau chauffe. Elle lapait plus lentement, puis elle passa sa langue sur la soucoupe pour la nettoyer. Pourquoi ont-ils la langue si râpeuse : pour mieux laper, des trous poreux partout. Rien qu’elle puisse manger ? Il jeta un coup d’œil autour de lui. Non.

    Ses souliers craquant faiblement, il monta l’escalier jusqu’au vestibule et s’arrêta près de la porte de la chambre. Peut-être aimerait-elle quelque chose qui ait du goût. De fines tranches de pain beurré, voilà ce qu’elle aime le matin. Cependant peut-être : de temps en temps.

    Il dit à voix basse dans le vestibule vide :

    — Je vais au coin de la rue. Reviens tout de suite.

    Et après qu’il eut entendu sa voix le dire, il ajouta :

    — Tu ne désires rien pour ton petit déjeuner ?

    Un faible grognement ensommeillé répondit :

    — Mn.

    Non. Elle ne désirait rien. Il entendit alors un chaud soupir profond, plus léger, tandis qu’elle se retournait et que les anneaux de cuivre desserrés cliquetaient6. Dois vraiment les faire resserrer. Dommage. Tout ce chemin parcouru depuis Gibraltar. Oublié le peu d’espagnol qu’elle savait. Me demande combien son père l’a payé. Modèle ancien. Ah oui, bien sûr. L’a acheté à la vente aux enchères du gouverneur. Lui a été prestement adjugé. Sacrément dur en affaires, le vieux Tweedy7. Oui, monsieur. C’était à Plevna8. Je sors du rang, monsieur, et j’en suis fier. Et pourtant il a été assez futé pour faire sa pelote avec les timbres. Ça c’était voir loin !

    Sa main prit son chapeau à la patère à laquelle étaient accrochés son lourd pardessus portant ses initiales et son imperméable acheté d’occasion aux objets trouvés. Les timbres : images au derrière collant. Je dirais que des tas d’officiers sont dans le coup. Bien sûr, et comment ! L’inscription tachée de sueur à l’intérieur de son chapeau lui dit de façon muette : Plasto, les meilleurs cha aux9. Il jeta un coup d’œil rapide sous la bande de cuir. Petit papier blanc. Pas de risque.

    Sur le pas de la porte il tâta sa poche de derrière à la recherche de la clé. Pas là. Dans le pantalon que j’avais hier10. Dois la récupérer. La pomme de terre je l’ai11. L’armoire grince. Inutile de la déranger. Elle avait encore sommeil quand elle s’est retournée tout à l’heure. En sortant, il tira derrière lui la porte d’entrée très lentement, un peu plus jusqu’à ce que le rabat du jet d’eau vienne doucement recouvrir le seuil, flasque couvercle. À l’air fermé12. De toute façon, ça ira jusqu’à ce que je revienne.

    Il traversa pour rejoindre le côté ensoleillé, évitant la trappe descellée de la cave du numéro soixante-quinze. Le soleil se rapprochait du clocher de George’s church13. M’est avis qu’il va faire chaud. Particulièrement sensible avec ces vêtements noirs. Le noir conduit, reflète (réfracte non ?) la chaleur14. Mais je ne pourrais pas y aller avec ce costume clair. Serait comme aller à un pique nique. Ses paupières s’abaissaient souvent doucement tandis qu’il marchait dans la tiédeur béate. La camionnette de Boland le boulanger qui livre sur des plateaux notre quotidien15, mais elle préfère les miches d’hier les chaussons croustillants à la croûte encore chaude. Vous donne l’impression d’être jeune. Quelque part en Orient16 : la pointe du jour : se mettre en route à l’aube, faire le tour de la terre en allant en avant du soleil, lui ravir une journée. Toujours continuer ainsi, ne jamais vieillir d’un jour, techniquement. Longer une grève, pays inconnu, arriver à la porte d’une ville, une sentinelle là, lui aussi un vieux briscard, les grosses moustaches du vieux Tweedy, appuyé sur une longue sorte de lance. Aller au hasard des rues, à l’ombre des auvents. Des visages enturbannés qui passent. Cavernes obscures des magasins de tapis, malabar, Turco le terrible17, assis en tailleur qui fume un narghilé au tuyau en spirale. Cris des vendeurs dans les rues. Boire de l’eau au fenouil, de la limonade. Flâner tout le jour. Pourrais rencontrer un voleur ou deux. Bon, va pour la rencontre.

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