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    2. Ulysses
    3. Chapitre 112
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    d’apophtegmes de goût douteux pour ramener à la santé une génération de jeunes éhontés, que ses pratiques s’accordent mieux avec les doctrines qui l’occupent à présent. Son cœur d’époux est le réceptacle de secrets que la bienséance répugne à mettre en lumière. Les propositions déshonnêtes de quelque beauté flétrie113 le peuvent bien consoler d’une compagne dédaignée et pervertie, mais ce nouveau champion des bonnes mœurs et guérisseur des plaies sociales n’est tout au plus qu’un arbre exotique qui, lorsque ses racines plongeaient dans son Orient natal, prospérait et florissait, et regorgeait de baume, mais qui, transplanté sous un climat plus tempéré, a vu ses racines perdre leur vigueur passée tandis que la matière qui en découle est dormante, aigre et sans effet.

    Avec une circonspection qui rappelait le cérémonial en usage à la Sublime Porte114, la nouvelle fut communiquée par l’infirmière en second au cadet des chirurgiens de service qui à son tour annonça à la délégation qu’un enfant mâle venait de naître. Quand il se fut transporté dans les appartements des femmes pour assister par devoir à la cérémonie de l’arrière-faix en présence du secrétaire d’État pour l’intérieur et des membres du Conseil privé, silencieux dans leur lassitude et leur approbation unanime, les délégués, échauffés par la durée et la solennité de leur veille et espérant que le joyeux événement excuserait une licence que l’absence à la fois de suivante115 et d’officier facilitait, se lancèrent soudain dans un furieux débat116. En vain se faisait entendre la voix de M. le Courtier Bloom qui tentait d’exhorter, d’adoucir, de mettre un frein. Le moment était trop favorable au débordement d’une argumentation qui semblait être le seul trait d’union entre des natures si diverses. Tous les aspects de la question passèrent successivement sous leur scalpel : l’aversion prénatale des frères utérins, l’opération césarienne, les cas de naissance posthume du côté paternel, et cette forme plus rare du côté maternel, le fratricide connu sous le nom d’affaire Childs et rendu célèbre par la plaidoirie émouvante de Mc Bushe qui obtint l’acquittement de l’innocent accusé, les droits de primogéniture et les allocations en ce qui concerne les jumeaux et les triplets, avortements et infanticides, simulés et dissimulés, fœtus acardiaque in fœtii, aprosopie résultant d’une congestion, agnathie de certains Chinois nés sans menton (cités par M. le Candidat Mulligan) en raison d’une insertion vicieuse des protubérances maxillaires le long de la ligne médiane, au point que (disait-il) ce qui sortait par une oreille entrait dans l’autre, bienfait de l’anesthésie ou sommeil crépusculaire, prolongation des douleurs dans la grossesse avancée par suite de la pression sur la veine, la perte prématurée du liquide amniotique (dont le cas actuel offrait un exemple) ayant pour conséquence une menace d’infection de la matrice, la fécondation artificielle à l’aide de seringues, l’involution de la matrice consécutive à la ménopause, le problème de la perpétuation des espèces dans les cas de fécondation par viol, ce terrible procédé de délivrance nommé par les Brandebourgeois Sturzgeburt, les exemples de monstres multigéminaux, bispermatiques, dus à des conceptions pendant la période cataméniale, ou à des unions consanguines, en un mot toutes les anomalies de la naissance dans la race humaine qu’Aristote a cataloguées en son chef-d’œuvre illustré de planches en chromolithographie117. Les plus graves problèmes d’obstétrique et de médecine légale furent passés en revue avec autant d’entrain que les croyances populaires sur la grossesse, telles que l’interdiction à une femme enceinte d’escalader un échalier de peur que ses mouvements ne causent la strangulation du fœtus par le cordon ombilical, et cette recommandation, dans le cas d’une envie nourrie avec ardeur et non satisfaite, d’appliquer la main sur cette partie de sa personne qu’un usage immémorial a consacrée comme siège des châtiments corporels. Les anomalies du bec de lièvre, taches de naissance, polydactylie, maladie bleue, fraises et taches de vin furent invoquées par quelqu’un comme étant de prime abord une explication hypothétique et naturelle d’enfants à tête porcine (le cas de Grissel Steevens était encore dans toutes les mémoires118) ou à poils canins qui naissent de temps en temps. L’hypothèse d’une mémoire plasmique119 mise en avant par l’emplové calédonien, et digne des traditions métaphysiques du pays qu’il représentait120, envisageait en de tels cas un arrêt du développement de l’embryon à un stade antérieur à l’humain. Un délégué aussi étrange qu’étranger soutint contre l’une et l’autre de ces théories, avec une telle chaleur qu’elle faillit convaincre, celle de la copulation entre femmes et animaux mâles, puisant le crédit de ses assertions dans des fables telles que celle du Minotaure que le génie de l’élégant poète latin nous a transmise dans les pages de ses Métamorphoses121. L’impression causée par ces paroles fut soudaine mais éphémère. Elle fut aussi vite effacée que produite, par une allocution de M. le Candidat Mulligan empreinte de ce génie du badinage que nul ne pouvait manier avec autant de maîtrise, qui affirmait que pour la satisfaction de ses plus chères convoitises rien n’était au-dessus d’un petit vieux bien propre. Dans le même temps une chaude discussion ayant éclaté entre M. le Délégué Madden et M. l’Assesseur Lynch au sujet du dilemme juridique et théologique que pose le décès d’un frère siamois avant l’autre, d’un commun accord le débat fut porté devant M. le Courtier Bloom pour être immédiatement soumis à M. le Sous-Diacre Dedalus. Jusque-là silencieux, que ce fût pour mieux montrer par une extraordinaire gravité cette singulière dignité de l’habit dont il était revêtu ou pour obéir à une voix intérieure, il énonça brièvement, et sembla-t-il à quelques-uns avec désinvolture, le précepte évangélique qui enjoint à l’homme de ne pas séparer ce que Dieu a uni.

    Mais la relation de Malachias commençait de les pénétrer d’horreur122. Il fit apparaître la scène à leurs yeux. Le panneau secret à côté de la cheminée s’ouvrit en glissant et dans le retrait apparut… Haines ! Qui de nous ne sentit son poil se hérisser ! Il tenait d’une main un portefeuille bourré de littérature celtique, de l’autre un flacon avec le mot Poison. La surprise, l’horreur, le dégoût étaient peints sur tous les visages cependant qu’il les observait avec un rictus macabre. Je m’attendais à quelque réception de ce genre, débuta-t-il avec un rire démoniaque, dont la faute est sans doute à l’histoire. Oui, c’est la vérité. Je suis le meurtrier de Samuel Childs. Et quel châtiment est le mien ! Les enfers ne me font pas peur. Voici ce qui se lit sur mon visage. Pennanenda ! quand connaîtrai-je enfin quelque répit ? marmottait-il d’une voix sourde, moi qui durant le temps que je retraversais Dublin avec ma collection poétique le sentais attaché à mes pas comme s’il eût été un succube ou un bisclavaret123. Mon enfer et celui de l’Irlande, c’est cette vie. Voilà ce que j’ai tenté pour effacer mon crime. Les plaisirs, la chasse aux corneilles, la langue erse124 (il en déclame quelques phrases), le laudanum (il porte le flacon à ses lèvres), les nuits à la belle étoile. En vain ! Son spectre me pourchasse. La coco, voilà mon lot… Ah ! L’anéantissement ! La panthère noire ! En poussant un cri il disparut soudain et le panneau se referma. Un instant plus tard sa tête apparut à la porte opposée et il dit : Venez me retrouver à la station de Westland row à onze heures et dix minutes. Il avait disparu ! Les larmes jaillissaient des yeux de tous ces libertins. Le voyant leva la main vers le ciel et murmura : La vendetta de Mananaan ! Le sage répéta Lex talionis. Le sentimental est celui qui voudrait le profit sans assumer la dette accablante de la reconnaissance. Malachias, vaincu par l’émotion, s’interrompit. Le mystère était dévoilé. Haines était le troisième frère. Son vrai nom était Childs. La panthère noire était elle-même le spectre de son propre père125. Il prenait des stupéfiants pour effacer. Pour ce bon office, grand merci. La solitaire maison près du cimetière126 est inhabitée. Pas une créature humaine ne voudrait vivre là. L’araignée file sa toile dans la solitude. Le rat nocturne montre son museau au bord de son trou. Elle est maudite. Elle est hantée. Propriété du meurtrier.

    Quel est l’âge de lame humaine127 ? De même qu’elle a la vertu du caméléon de changer de couleur à chaque voisinage nouveau, d’être gaie avec ceux qui se réjouissent et triste avec ceux qui sont abattus, de même son âge varie avec son humeur. Le Léopold qui est assis-là à ruminer, à remâcher ses souvenirs, n’est plus cet agent de publicité rassis qui est porteur de modestes rentes sur l’État128. Il est le jeune Léopold, comme dans un arrangement rétrospectif129, miroir dans un miroir (hé, hop !) il se contemple. Cette jeune silhouette d’alors, mâle avant l’âge, il la voit qui par un matin de gel va de la vieille maison de Clanbrassil Street au collège, son cartable en bandoulière, et dedans un bon quignon de pain blanc taillé à la miche, attention maternelle. Ou bien c’est la même silhouette, un an ou deux plus tard, avec son premier castor (ah, quelle date dans sa vie !) qui fait déjà sa tournée en qualité de voyageur en pied pour la maison de commerce paternelle, muni d’un carnet de commandes, d’un mouchoir parfumé (pas seulement pour la montre), d’un écrin de brillants brimborions (choses, hélas, du passé !) et d’un plein carquois de sourires complaisants pour telle ou telle ménagère à moitié convaincue qui calcule le prix en comptant sur ses doigts, ou pour une vierge fraîche éclose qui accepte timidement (mais le cœur y était-il ?) ses savants baisemains130. Le parfum, les sourires mais plus encore les

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