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    2. Ulysses
    3. Chapitre 109
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    portèrent leur récompense, dit M. Vincent, car pour compenser il lui enseigna un tour qui en valait deux, si bien qu’il n’est fille, épouse, abbesse ou veuve qui n’affirme à présent qu’elle ne préférerait en quelque moment du mois que ce fût lui soupirer à l’oreille dans l’obscurité d’une étable ou se faire lécher la nuque par sa grande langue sacro-sainte que de coucher avec le mieux fait et le plus jeune séducteur des quatre cantons de toute l’Irlande84. Un autre, alors, dit son mot : Et ils l’habillèrent, dit-il, d’une chemise à dentelles et d’un jupon, ajustement qui se rehaussait d’une palatine, d’une ceinture et de manchettes, et tondirent son toupet et le frottèrent sur tout le corps avec du blanc de baleine et lui bâtirent des étables à tous les tournants de route et mirent dans chacune d’elles une mangeoire d’or pleine du foin le meilleur qui fût au marché afin qu’il pût pioncer et bouser son cœur content. Entre-temps, le père des fidèles (car ainsi l’appelait-on) était devenu si pesant que c’est à peine s’il pouvait aller au pâturage. Pour y porter remède nos rusées dames et demoiselles lui apportaient son fourrage dans leurs devantiers et sitôt que son ventre était plein il se cabrait sur ses quartiers de derrière pour montrer à leurs seigneuries un beau mystère, et mugissait et beuglait en langage de taureau, et toutes se mettaient après lui. Oui da, fit un autre, et il était si dorloté qu’il ne pouvait souffrir que rien poussât par le pays qu’herbe verte à son usage (car c’était la seule couleur qui fût de son goût) et il y avait un écriteau placé sur un monticule en plein milieu de l’île et qui portait cette inscription en caractères d’imprimerie : Par Henry-le-Diable, grâces au raygrass qui gratis nous engraisse85. Et, dit M. Dixon, si d’aventure il avait vent d’un larron de bêtes aumailles de Roscommon ou des Landes de Connemara ou d’un métayer de Sligo qui semait la valeur d’une pincée de moutarde ou de une once de graine de navette, il se ruait dans un accès de folle rage sur la moitié du pays, déracinant de ses cornes tout ce qui se trouvait de plantations et tout cela sur l’ordre d’Henry-le-Diable. Ils se prirent d’abord de querelle, dit M. Vincent, et Henry-le-Diable envoya le fermier Nicolas à tous les diables et le traita de vieux bordelier qui a sept putains dans sa maison, et j’aurai l’œil sur lui, disait-il. Je lui mettrai le nez dans son ordure à cet animal, avec le secours de ce fameux nerf que me légua mon père. Mais, dit M. Dixon, certain soir qu’Henry-le-Diable s’occupait de brosser son pelage royal pour s’en aller dîner après avoir gagné une course nautique (il disposait quant à lui de pelles en guise d’avirons mais la règle première de la course portait que les autres devaient ramer avec des fourches à foin) il se trouva une merveilleuse ressemblance avec un taureau et étant venu à ramasser un livre de chevet marqué de traces de pouce crasseux qu’il serrait dans la dépense, il découvrit en effet qu’il était un authentique descendant par la main gauche du fameux taureau champion des Romains, Bos Bovum, qui signifie en bon latin de latrine le patron de la boîte86. Après quoi, dit M. Vincent, Henry-le-Diable plongea la tête dans une auge à faire boire les vaches en la présence de tous ses courtisans, et la retirant, apprit à tous son nouveau nom87. Puis, tout ruisselant d’eau, il passa une vieille chemise et une jupe qui avait appartenu à sa mère-grand et s’acheta une grammaire de la langue taureau pour se familiariser avec elle, mais il ne put jamais en apprendre un traître mot à l’exception de la première personne du pronom personnel qu’il transcrivit en lettres majuscules et finit par savoir sur le bout du doigt, et quand il lui arrivait de sortir pour faire un bout de promenade, il bourrait ses poches de craie à seule fin de l’écrire où bon lui semblait, que ce fût sur la paroi d’un rocher, ou sur une table de maison de thé, ou sur une balle de coton, ou encore sur le bouchon de liège d’une ligne88. Bref lui et le taureau irlandais devinrent bientôt aussi compères et compagnons que le cul et la chemise. C’est pure vérité, dit M. Stephen, et le fin de l’histoire, c’est que les hommes de cette île, voyant qu’il n’y avait pas de secours à espérer, puisque toutes ces ingrates femelles étaient d’un même sentiment à cet égard, construisirent un radeau de passage, y embarquèrent eux et leurs biens meubles, dressèrent les mâts, parèrent les vergues, vinrent au lof, prirent la panne, amenèrent du vent dans les voiles, mirent le nez entre vent et marée89, hissèrent l’ancre, mirent la barre à bâbord, arborèrent le pavillon tête de mort, poussèrent trois fois trois hourras, larguèrent la bouline, poussèrent sur leur gabare et prirent la mer pour redécouvrir l’Amérique90. Ce qui fut l’occasion, dit M. Vincent, pour un contremaître de composer cette gaillarde chanson de matelots :

    Le pape Pierre il n’est qu’un pisse-au-lit.

    Un homme est un homme malgré ça.

    Notre digne connaissance, M. Malachie Mulligan, faisait maintenant son apparition sur le seuil91, tandis que les écoliers terminaient leur apologue, en compagnie d’un familier qu’il venait justement de rencontrer, Alec Bannon était son nom, qui venait d’arriver en ville, avec l’intention d’y acheter une charge d’enseigne ou de cornette dans le corps de la milice et de s’enrôler pour faire campagne. M. Mulligan fut assez honnête pour y donner quelque approbation d’autant qu’il se trouvait que cela concordait avec un sien projet pour la guérison du mal même dont il avait été question. Sur quoi il fit passer entre les mains de la compagnie un lot de cartons qu’il avait eus le jour même de l’imprimerie de M. Quinnell et qui portaient cette suscription imprimée en beaux caractères italiques : M. Malachie Mulligan, Fertiliseur et Incubateur, île Lambay92. Son projet, ainsi qu’il entreprit de s’en expliquer, était de se retirer du cercle des plaisirs oiseux tels que ceux qui constituent la plus sérieuse occupation en ville de sir Paon Papegai et de sir Pâtemolle Lecurieux, et de se consacrer à la plus noble tâche pour laquelle notre machine ait été créée. Eh bien, parlez-nous de cela, mon brave ami, dit M. Dixon. Je gage que cela fleure le putanisme. Allons, asseyez-vous tous les deux. Il n’en coûte pas plus de s’asseoir que de rester debout. M. Mulligan agréa l’offre, et, s’étendant sur son dessein, confia à ses auditeurs qu’il avait été amené à cette conception par un examen des causes de la stérilité, inhibitoires et prohibitoires, soit que l’inhibition découle de persécutions conjugales ou tout aussi bien d’une mauvaise balance, soit que la prohibition provienne de vices congénitaux ou d’habitudes acquises. Il était profondément affligé, disait-il, de voir la couche nuptiale frustrée de ses gages les plus chers ; et de méditer sur le sort de tant d’aimables créatures nanties de riches douaires, proie désignée pour la prêtraille la plus vile, qui ont mis leur flambeau sous le boisseau dans un cloître qui leur est contraire ou gaspillent la fleur de leur âge dans les bras d’un impertinent quand-pour-Phillis alors qu’il leur serait loisible d’ouvrir sans cesse à la félicité de nouvelles perspectives, et qui font bon marché de l’inestimable joyau de leur sexe quand tant et tant de gentils compagnons s’offrent à leur prodiguer les caresses, voilà, ils en pouvaient être assurés, qui lui fendait le cœur. Pour mettre ordre à ce funeste état de choses (qui selon ses conclusions était dû à une retraite de la chaleur latente) et après avoir pris l’avis de conseillers émérites et fait de cette matière un examen approfondi, il avait décidé d’acquérir par bail perpétuel le fief de l’île Lambav de son détenteur lord Talbot de Malahide, un gentilhomme Tory, des plus distingués et qui jouissait d’un grand crédit auprès de notre parti tout-puissant93. Il proposait d’établir en ce lieu une ferme nationale de fécondation qui serait nommée Omphalos, avec un obélisque taillé et érigé à la mode d’Égypte, et d’offrir ses respectueux offices de féal fécondateur à toute femme, quel que fût son rang dans la société, qui viendrait lui confier le désir de faire remplir ses fonctions à son quoniam bonus94. Ce n’était nullement là une entreprise d’argent, disait-il, pas plus qu’il n’eût toléré qu’on le payât en rien de ses peines. La plus humble fille de cuisine aussi bien que la plus authentique grande dame, pour peu que leurs formes et leurs tempéraments plaidassent chaudement leur cause, trouveraient en lui leur homme. Quant à ce qui est de son alimentation, il exposa comment il entendait se contenter pour son ordinaire de savoureux tubercules, de poisson et de lapereaux, la chair de ces prolifiques rongeurs étant particulièrement recommandable pour le dessein qu’il poursuivait, grillée ou bouillie avec une pointe de macis et une capsule ou deux de poivre de Guinée. Après cette homélie qu’il prononça sur le ton de la plus grande conviction, M. Mulligan en un tournemain enleva de dessus son chapeau un mouchoir avec lequel il l’avait garanti. Tous deux, à ce qu’il semblait, avaient été surpris par la pluie et nonobstant leur allure accélérée s’étaient vus percés par ce déluge, ainsi qu’on pouvait l’observer par les culottes de droguet de M. Mulligan qui pour lors avaient tourné au pie. Entre-temps son projet s’était vu favorablement accueillir de son auditoire et avait conquis les chaleureux suffrages de tous, encore que M. Dixon de Sainte-Marie en prit le

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