62 et 61 : « Mon frère détestait le rugby [le sport des écoles de qualité], la boxe et la lutte, qu’il considérait, non comme un exercice de maîtrise de soi, comme l’affirment les Anglais, mais une école de violence et de brutalité […]. Il se distinguait [néanmoins] dans les sports. Lorsque, après quatre ans il quitta le collège, nous eûmes à la maison une desserte chargée de coupes, d’une théière et d’une cafetière en argent (c’est-à-dire plaquées argent) qu’il avait gagnées dans les épreuves scolaires de marche et de courses de haies. » Voir également ci-dessous p. 88 et le « Portrait de l’artiste » (1904), p. 33.
19. C’est-à-dire la troisième division, à laquelle Stephen appartient en raison de son âge. Voir n. 36.
20. Ce nom, comme ceux de Roche, Cantwell, Thunder, Lawton, Wells, Saurin, Fleming, Rath, Magee, l’Espagnol (José Araña y Lupardo), Kelly, qui apparaîtront plus loin, a pu être retrouvé dans les listes d’élèves de Clongowes Wood College pour la période où Joyce y séjourna.
21. Rillons : greaves. Le mot peut également désigner des jambières.
22. Dedalus. Sur la suggestion d’Ezra Pound, semble-t-il, Joyce abandonne dans ce roman la graphie classique « Dædalus », qu’il avait adoptée dans Stephen le Héros et pour signer les premières nouvelles de Dublinois publiées dans The Irish Homestead.
23. Voir p. 57 et n. 50, et p. 105.
24. James Joyce arriva à Clongowes Wood College le 1er septembre 1888.
25. Le bâtiment principal de Clongowes Wood avait jadis été un château.
26. Le nom bien réel de ce recteur, le père John Conmee, 1847-1910, n’est donné que p. 110. Il fut recteur de Clongowes Wood College avant de devenir préfet des études à Belvedere College, où Joyce acheva sa scolarité, puis supérieur de Saint-François-Xavier, la résidence des jésuites de Upper Gardiner Street (voir p. 243), avant de devenir en 1905 provincial des jésuites d’Irlande. James Joyce garda de lui un bon souvenir, à en juger par la biographie de Herbert Gorman, où il est décrit comme « un humaniste affable et courtois » (James Joyce, New York, Holt, Rinehart & Wintson, 1948 (1940), p. 22). Le rôle qu’il joue dans la dernière section de ce chapitre, pas plus que le portrait un peu ironique qui en est fait dans Ulysse, éd. cit., p. 214-219, ne démentent vraiment cette appréciation.
27. Hamilton Rowan : patriote irlandais, 1751-1834, qui participa en 1794 aux complots de Wolfe Tone. Trahi, Rowan dut s’enfuir. S’étant caché à Clongowes Wood, il y fut poursuivi par des soldats dont les lingots marquent encore certaine porte (voir ci-dessous p. 106) ; mais, jetant son chapeau dans le fossé, près du haha, il fit croire à son évasion et put se cacher quelque temps dans le château avant de passer en France. Joyce donnera le nom de (Richard) Rowan à l’un des héros de sa pièce, Les Exilés.
28. Doctor Cornwell’s Spelling Book. Spelling for Beginners, a method of teaching spelling and reading at the same time, 1870, est le troisième d’une série de douze traités, comportant principalement des géographies, publiée chez Simpkin, Marshall & Co, Hamilton, Adams & Co, Londres, entre 1867 et 1913 : Dr Cornwell’s Educational Works.
29. Thomas Wolsey, 1473-1530, archevêque d’York, cardinal et lord-chancelier du royaume. Il tomba en disgrâce pour n’avoir pu obtenir du pape Clément XII l’annulation du mariage de Henry VII avec Catherine d’Aragon.
30. Square ditch, littéralement « fossé carré ». En fait, en argot d’écolier, du moins à Clongowes Wood College, the square désigne « les cabinets »… Selon Richard Ellmann, pareille aventure serait arrivée à Joyce au printemps de 1891.
31. À Clongowes Wood College, James Joyce avait une petite tabatière noire, en forme de cercueil, qui lui avait été donnée par son parrain Philip McCann. Cette tabatière réapparaîtra dans l’un de ses rêves, au moment où il achevait Ulysse : voir Pléiade, p. 1680.
32. À l’époque où ils vivaient à Bray, les Joyce avaient encore une domestique.
33. Stanislaus Joyce semble fondé à dire que Mrs Conway voulut inculquer au jeune James un catholicisme très étroit. Le trait commun des connaissances énumérées ici est le reflet glorieux quelles jettent sur les jésuites : le Mozambique fut la première étape du long voyage d’évangélisation de saint François-Xavier en direction de l’Orient ; le P. Marquette descendit le Mississippi en 1673 ; c’est le P. Riccioli, de Bologne, qui en 1651, se fondant sur les observations du P. Grimaldi, donna aux montagnes de la lune le nom de membres de la Compagnie.
34. Le père Arnall : personnage semble-t-il calqué sur le P. William Power, responsable des classes élémentaires.
35. Aigreurs : heartburn, littéralement « brûlure du cœur ».
36. La troisième division comprenait les enfants âgés de moins de treize ans (classes élémentaires [elements] et grammaire 3), celle des moyens les élèves de treize à quinze ans (grammaire 2 et grammaire 1), la division des grands les élèves de quinze à dix-huit ans (poésie et rhétorique). Voir ci-dessous p. 54 et 58.
37. Simon Moonan : ce personnage, dont le nom ne correspond à aucun ancien élève de cette génération, était, dans le manuscrit et dans la version du roman publiée en livraisons dans la revue anglaise The Egoist, appelé Mangan, comme le poète romantique irlandais cher à Joyce, et comme la petite fille de « Arabie » dans Dublinois. Le Moonan qui apparaîtra plus tard, p. 280 et 306, est peut-être un personnage différent. On notera en outre que ce nom évoque la lune, moon, qui joue dans notre roman un rôle thématique non négligeable.
38. Chou-chou : suck, de to suck, sucer.
39. Hôtel-restaurant du centre de Dublin, 6-8 Wicklow Street.
40. Sums : « sommes », mais aussi « problèmes ».
41. On remarquera que, dans cet exercice à l’image de la Guerre des Deux Roses (1455-1485), Stephen porte la rose blanche de York, choisie par le parti irlandais, tandis que le champion des Lancaster, à la rose rouge, a un nom bien anglais, qui évoque le règne de la loi, law. On rapprochera ce passage d’une chanson populaire du temps, « Porterai-je une rose blanche ? », où dans les premiers vers apparaît également la thématique de la couronne (voir p. 62 et n. 66) :
Porterai-je une rose blanche ? En porterai-je une rouge ?
Recherchera-t-il des guirlandes ? Quelle couronne aurai-je ?
Molly Bloom, dans le monologue final d’Ulysse, se souvient de l’avoir chantée (éd. cit., p. 684). Rappelons également que la signification symbolique ou mystique de la rose repose en grande partie sur l’opposition des couleurs qui lui sont attribuées, le blanc ou le rouge. C’est ainsi que chez les alchimistes, dont Joyce avait pratiqué les écrits dans sa jeunesse, la rose blanche est associée au but du petit œuvre, la rose rouge à celui du grand œuvre, la rose bleue étant le symbole de l’impossible (cf. n. 43) : voir J. Van Lennep, Art et alchimie, Bruxelles, 1966, p. 27.
42. Forge ahead ! « Allez-y ! Foncez ! » Mais le forge transitif que l’on rencontre à plusieurs reprises plus bas (p. 253, 266, 362) signifie, comme en français, « forger », et aussi « contrefaire ».
43. Le vert est la couleur nationale de l’Irlande (voir aussi p. 124 la couleur émeraude du cahier de Stephen). Allusion sans doute aussi au livre de Robert Hitchens, The Green Carnation [L’Œillet vert], paru en 1894, satire de l’esthétisme contemporain et en particulier des théories et des gestes d’Oscar Wilde. Voir également ci-dessus n. 13.
44. Le père de Michael Saurin, élève du collège de 1887 à 1893, était magistrat. Voir ci-dessous p. 69.
45. Dalkey : petite agglomération au bord de la mer d’Irlande, entre Bray et Dublin.
46. Peut-être un écho d’une vieille chanson irlandaise de l’Ouest, I know my love [Je reconnais mon amour], dont les premiers vers sont :
Je reconnais mon amour à sa façon de marcher
Et je reconnais mon amour à sa façon de parler…
et le refrain :
Et si mon amour me quitte, que ferai-je ?
47. Tullabeg : siège du noviciat jésuite. St Stanislaus College fusionna avec Clongowes en 1885.
48. Saint Louis de Gonzague, l’un des modèles de la Compagnie de Jésus (voir p. 106), était « trop pur » pour embrasser sa mère. Sur ce point, il sera rapproché de Pascal p. 347.
49. C’est l’adresse exacte du collège, situé à une soixantaine de kilomètres à l’ouest de Dublin.
50. Voir Ulysse, éd. cit., p. 206, où le même (?) Stephen Dedalus médite sur son nom et sur celui de Shakespeare : « Qu’y a-t-il dans un nom ? C’est ce que nous nous demandons quand nous sommes enfants en écrivant ce nom qu’on nous dit être le nôtre […]. » On remarquera que Stephen prend comme point de départ une citation de Shakespeare qui constitue, une fois de plus, une interrogation sur le sens de la rose : « Qu’y a-t-il dans un nom ? Ce que nous appelons une rose / Portant tout autre nom sentirait aussi bon », Roméo et Juliette, acte II, sc. II, vers 43-44. Voir aussi ci-dessus n. 23 et n. 41.
51. M. Casey : ce personnage représente assez fidèlement un ami de la famille Joyce, John Kelly, originaire de la ville de Tralee, dans le sud-ouest de l’Irlande. Voir n. 84 et n. 102.
52. Voir n. 36.
53. Les colonnes de cette chapelle sont en réalité en bois, mais peintes en faux marbre.
54. Voir les souvenirs d’enfance de Stanislaus Joyce, dans Le Gardien de mon frère, éd. cit., p. 25-26 : « Nous vivions à cette époque à Bray, à deux pas de la mer, sur la terrasse Martello, près des bains. La “ terrasse ” descendait tout droit jusqu’au bord de l’eau et, en hiver, la mer