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    2. Nouvelles Mille et une Nuits
    3. Chapitre 13
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    manifeste.

    Il n’y avait que deux hommes assis : l’un, près de la fenêtre, les mains plongées dans les poches de son pantalon et la tête basse, mortellement pâle, la sueur au front, ne proférait pas un mot ; on eût dit une véritable ruine d’âme et de corps ; l’autre, sur un sofa qui le séparait de la cheminée, différait étrangement de tout le reste de la compagnie. Peut-être n’avait-il guère que quarante ans, mais on lui en eût donné dix de plus. Florizel pensa qu’il n’avait jamais vu un être plus hideux, plus ravagé par la maladie et les excès. Il n’avait que la peau et les os, était en partie paralysé et portait des lunettes d’une puissance si extraordinaire que ses yeux paraissaient à travers singulièrement grossis et déformés. Excepté le prince et le président, il était dans ce salon l’unique personne qui conservât le calme de la vie ordinaire.

    Les membres du Suicide Club ne se piquaient pas d’une tenue très décente. Quelques-uns tiraient vanité des actions déshonorantes qui les avaient amenés à chercher un refuge dans la mort ; on écoutait sans témoigner de désapprobation. Il y avait un accord tacite contre les arrêts de la morale et quiconque franchissait le seuil du Club jouissait déjà de quelques-unes des immunités de la tombe. Ils burent à la mémoire les uns des autres et à celle des suicidés remarquables du passé. Ils comparaient et développaient leurs vues différentes sur la mort ; ceux-ci déclarant que ce n’était rien que ténèbres et néant, ceux-là, espérant que, cette même nuit, ils iraient escalader les étoiles.

    « À la mémoire éternelle du baron de Trenck, le type des suicidés ! cria quelqu’un. Il passa d’une petite cellule dans une plus petite, afin d’atteindre enfin à la liberté.

    – Pour ma part, dit un second, je ne demande qu’un bandeau sur mes yeux et du coton dans mes oreilles. Seulement, il n’y a pas de coton assez épais en ce monde. »

    Le troisième espérait, dans l’état nouveau où il allait entrer, découvrir les secrets de la vie, et le quatrième avouait qu’il n’aurait jamais fait partie du Club s’il n’eût été amené à croire au système de Darwin.

    « Je n’ai pu supporter, disait-il, l’idée de descendre d’un singe.

    En somme, le prince était tout à fait désillusionné par les manières et la conversation de ses nouveaux collègues.

    « Il n’y a pas de quoi faire tant d’embarras, pensait-il. Dès qu’un homme s’est réconcilié avec l’idée de se tuer, qu’il s’exécute, pour Dieu, en gentilhomme. Cet émoi et ces gros mots sont déplacés. »

    Cependant, le colonel Geraldine était en proie aux plus vives appréhensions : le Club et ses règlements restaient toujours à l’état de mystères, et il regardait autour de la salle afin de trouver quelqu’un qui fût en mesure de le renseigner. Son regard tomba enfin sur le paralytique, dont la sérénité le frappa ; il supplia le président, qui, très pressé, ne faisait que sortir de la chambre et y rentrer, expédiant des affaires, de le présenter à ce monsieur assis sur le canapé.

    Le président répondit que de semblables formalités étaient inutiles chez lui ; néanmoins il présenta Mr. Hammersmith à Mr. Malthus.

    Mr. Malthus regarda le colonel avec curiosité et le pria de prendre place à sa droite.

    « Vous êtes un nouveau venu, dit-il, et vous désirez des renseignements. Eh bien, vous vous adressez à la bonne source. Il y a deux ans que j’ai fait ma première visite à ce Club enchanteur. »

    Le colonel respira. Si Mr. Malthus avait fréquenté ce lieu pendant deux ans, le prince pouvait ne courir aucun danger durant une seule soirée.

    « Comment ! s’écria-t-il, deux ans ? De quelle mystification suis-je donc le jouet ?

    – D’aucune, répliqua Mr. Mathus avec douceur. Mon cas est singulier. Je ne suis pas du tout, à proprement parler, un suicidé, mais un membre honoraire, pour ainsi dire. Je ne visite guère le Club que deux fois par mois. Mon infirmité et la condescendance du président m’ont procuré ce privilège, que d’ailleurs je paye assez cher.

    – Je vous prierai, dit le colonel, de vouloir bien être plus explicite. Rappelez-vous que je ne suis encore que très imparfaitement familier avec les statuts de l’endroit.

    – Un membre ordinaire tel que vous, lancé à la recherche de la mort, revient ici tous les soirs jusqu’à ce que la chance le favorise, répliqua le paralytique ; s’il est sans le sou, il peut même être logé et nourri par le président ; pas de luxe, mais le nécessaire ; on ne saurait faire davantage vu la modicité de la souscription. D’ailleurs, la seule société du président est par elle-même un très vif agrément.

    – En vérité ! s’écria Geraldine, je ne l’aurais pas cru.

    – Ah ! c’est que vous ne connaissez pas l’homme. L’esprit le plus drôle ! Des histoires ! Un cynisme !… Il sait la vie sur le bout du doigt ; et, entre nous, c’est le coquin le plus corrompu de toute la chrétienté.

    – Est-il, lui aussi, membre permanent comme vous-même, si je puis poser cette question sans vous offenser ?

    – Il est permanent dans un sens bien différent, répliqua M. Malthus. J’ai été gracieusement épargné jusqu’ici, mais, enfin, tôt ou tard, je dois partir. Lui ne joue jamais ; il mêle et donne les cartes et fait les arrangements nécessaires. Cet homme, Mr. Hammersmith, est l’adresse même. Depuis trois ans il poursuit à Londres son utile profession, que je pourrais appeler un art, et jamais l’ombre d’un soupçon ne s’est élevée contre lui. Moi-même, je le crois inspiré. Sans doute, vous vous rappelez ce cas célèbre, il y a six mois, d’un gentleman accidentellement empoisonné dans une pharmacie ? Et ce ne fut encore qu’une de ses inventions les moins riches. Mais comme c’était simple, et comme il est sorti sauf de l’aventure !

    – Vous m’étonnez, dit le colonel ; ce malheureux était-il une des… – il allait dire victimes ; mais il se reprit à temps, – un des membres du Club ? »

    En même temps il se rappela que Mr. Malthus lui-même n’avait pas paru ambitieux de mourir pour son propre compte ; il ajouta avec empressement :

    « Mais je m’aperçois que je suis encore dans l’obscurité. Vous parliez de mêler et de donner les cartes ; dans quel but ? Puisque vous avez l’air plutôt mal disposé à mourir qu’autrement, je dois avouer que je ne puis concevoir ce qui vous amène ici.

    – Vous dites vrai, vous êtes dans les ténèbres, répliqua Mr. Malthus avec plus d’animation. Cher monsieur, ce Club est le temple même de l’ivresse ; si ma santé affaiblie pouvait mieux supporter de pareilles excitations, je viendrais plus souvent, je vous le jure. Il faut tout le sentiment du devoir, qu’engendre une longue habitude de mauvaise santé et de régime rigoureux, pour me retenir d’abuser de ce qui est, je puis le dire, mon dernier plaisir. Je les ai épuisés tous, monsieur, continua-t-il en posant sa main sur le bras de Geraldine, tous sans exception, et je vous déclare, sur mon honneur, qu’il n’y en a pas un dont le prix n’ait été grossièrement exagéré. On joue avec l’amour ; moi, je nie que l’amour soit une forte passion. La peur en est une plus forte ; c’est avec la peur qu’il faut badiner, si l’on veut goûter les joies intenses de la vie. Enviez-moi, enviez-moi, ajouta-t-il avec un ricanement ignoble, je suis poltron. »

    Geraldine ne parvint à dissimuler son dégoût qu’avec peine, mais il prit sur soi et poursuivit l’interrogatoire. :

    « Comment cette excitation peut-elle être si habilement prolongée ? Il y a donc quelque élément d’incertitude ?

    – Je vais vous expliquer par quel moyen la victime de chaque soir est choisie, répondit M. Malthus, et non seulement la victime, mais un autre membre qui est destiné à jouer le rôle d’instrument entre les mains du Club, à devenir le grand prêtre de la mort.

    – Mon Dieu ! ils s’entre-tuent donc alors ?

    – Le tourment du suicide est supprimé de cette manière, dit Malthus avec un signe de tête.

    – Miséricorde ! s’écria le colonel, et pouvez-vous… puis-je… peut-il… mon ami… je veux dire… quelqu’un de nous peut-il être condamné ce soir à devenir le meurtrier du corps et de l’âme d’un autre être ? Des choses semblables sont-elles possibles entre hommes nés de la femme ? Oh ! infamie des infamies ! »

    Dans son effroi, il était sur le point de se lever, lorsqu’il rencontra le regard du prince. Ce regard courroucé était fixé sur lui à travers la chambre. En un instant Geraldine eut repris son calme.

    « Après tout, ajouta-t-il, pourquoi pas ? Et, puisque vous dites que le jeu est intéressant, vogue la galère ! Je suis du Club ! »

    Mr. Malthus avait joui d’une façon toute particulière de l’effroi de son interlocuteur.

    « Après un premier moment de surprise, vous êtes, je le vois, en état d’apprécier les délices de notre Société, monsieur… Elle réunit les émotions de la table de jeu, celles du duel et celles d’un amphithéâtre romain. Les païens étaient allés assez loin déjà, certes, et j’admire les raffinements de leur imagination en pareille matière ; mais il était réservé à un pays chrétien d’atteindre cet extrême degré, cette quintessence, cet absolu du plaisir poignant. Vous comprenez combien tous les amusements doivent paraître fades à l’homme qui a pris le goût de celui-ci. La partie que nous jouons, continua-t-il, est d’une extrême simplicité. Un jeu complet… Mais… venez donc, vous êtes à même de voir la chose par vos propres yeux. Voulez-vous me prêter l’appui de votre bras ? Malheureusement, je suis

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    Tags:
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