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    2. L'Étrange Cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde
    3. Chapitre 9
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    ses efforts, il avait l’esprit accablé sous un angoissant pressentiment de catastrophe. Lorsqu’ils arrivèrent sur la place, le vent y soulevait des tourbillons de poussière, et les ramures squelettiques du jardin flagellaient les grilles. Poole, qui durant tout le trajet n’avait cessé de marcher un pas ou deux en avant, fit halte au milieu de la chaussée, et malgré l’âpre bise, il retira son chapeau et s’épongea le front avec un mouchoir de poche rouge. Mais en dépit de la course rapide, ce qu’il essuyait n’était pas la transpiration due à l’exercice, mais bien la sueur d’une angoisse qui l’étranglait, car sa face était blême et sa voix, lorsqu’il prit la parole, rauque et entrecoupée.

    – Eh bien, monsieur, dit-il, nous y voici, et Dieu fasse qu’il ne soit pas arrivé de malheur.

    – Ainsi soit-il, Poole, dit le notaire.

    Là-dessus le valet heurta d’une façon très discrète ; la porte s’ouvrit, retenue par la chaîne ; et de l’intérieur une voix interrogea :

    – C’est vous, Poole ?

    – Tout va bien, répondit Poole. Ouvrez.

    Le vestibule, où ils pénétrèrent, était brillamment éclairé ; on avait fait un grand feu, et autour de l’âtre toute la domesticité, mâle et femelle, se tenait rassemblée en tas comme un troupeau de moutons. À la vue de M. Utterson, la femme de chambre fut prise de geignements nerveux ; et la cuisinière, s’écriant : « Dieu merci ! voilà M. Utterson ! » s’élança au-devant de lui comme pour lui sauter au cou.

    – Quoi donc ? quoi donc ? Que faites-vous tous ici ? interrogea le notaire avec aigreur. C’est très irrégulier, très incorrect ; s’il le savait, votre maître serait loin d’être satisfait.

    – C’est qu’ils ont tous peur, dit Poole.

    Nul ne protesta, et il se fit un grand silence ; on n’entendait que la femme de chambre, qui s’était mise à pleurer tout haut.

    – Taisez-vous ! lui dit Poole, d’un ton furieux qui témoignait de son énervement personnel. (Et de fait, quand la femme de chambre avait tout à coup haussé la gamme de ses lamentations, tous avaient tressailli et s’étaient tournés vers la porte intérieure avec des airs de crainte et d’anxiété.) Et maintenant, continua le maître d’hôtel en s’adressant au marmiton, passez-moi un bougeoir, nous allons tirer cela au clair tout de suite.

    Puis, ayant prié M. Utterson de le suivre, il l’emmena dans le jardin de derrière.

    – À présent, monsieur, lui dit-il, vous allez faire le moins de bruit possible. Je tiens à ce que vous entendiez et je ne tiens pas à ce qu’on vous entende. Et surtout, monsieur, si par hasard il vous demandait d’entrer, n’y allez pas.

    À cette conclusion imprévue, M. Utterson eut un sursaut nerveux qui manqua lui faire perdre l’équilibre ; mais il rassembla son courage et suivit le maître d’hôtel dans le bâtiment du laboratoire, puis traversant l’amphithéâtre de dissection, encombré de touries et de flacons, il arriva au pied de l’escalier. Là, Poole lui fit signe de se reculer de côté et d’écouter ; et lui-même, déposant le bougeoir et faisant un appel visible à toute sa résolution, monta les marches et d’une main mal assurée frappa sur la serge rouge de la porte du cabinet.

    – Monsieur, c’est M. Utterson qui demande à vous voir, annonça-t-il.

    Et en même temps, d’un geste impératif, il engagea le notaire à prêter l’oreille.

    Une voix plaintive répondit de l’intérieur :

    – Dites-lui qu’il m’est impossible de recevoir qui que ce soit.

    – Bien, monsieur, dit Poole, avec dans la voix une sorte d’accent de triomphe.

    Et, reprenant le bougeoir, il remmena M. Utterson par la cour jusque dans la grande cuisine, où le feu était éteint et où les blattes sautillaient sur le carreau.

    – Monsieur, dit-il en regardant M. Utterson dans les yeux, était-ce la voix de mon maître ?

    – Elle m’a paru bien changée, répondit le notaire, très pâle, mais sans détourner le regard.

    – Changée ? Certes oui, je le pense, reprit le maître d’hôtel. Après vingt ans passés dans la demeure de cet homme, pourrais-je ne pas connaître sa voix ? Non, monsieur, on a fait disparaître mon maître ; on l’a fait disparaître, il y a huit jours, lorsque nous l’avons entendu invoquer le nom de Dieu ; et qui est là à l’intérieur à sa place, et pourquoi on reste là, monsieur Utterson, c’est une chose qui crie vengeance au Ciel !

    – Voici un conte bien étrange, Poole, voici un conte plutôt invraisemblable, mon ami, dit M. Utterson, en se mordillant le doigt. À supposer qu’il en soit comme vous l’imaginez, à supposer que le Dr Jekyll ait été… eh bien, oui, assassiné, quel motif de rester pourrait avoir son meurtrier ? Cela ne tient pas debout, cela ne supporte pas l’examen.

    – Eh bien, monsieur Utterson, vous êtes difficile à convaincre, mais je ne désespère pas d’y arriver, dit Poole. Toute cette dernière semaine, sachez-le donc, cet homme, ou cet être, ou ce je ne sais quoi qui loge dans le cabinet n’a cessé jour et nuit de réclamer à cor et à cri un certain médicament sans arriver à l’obtenir à son idée. Il lui arrivait de temps à autre… c’est de mon maître que je parle… d’écrire ses ordres sur une feuille de papier qu’il jetait dans l’escalier. Nous n’avons rien eu d’autre ces huit derniers jours ; rien que des papiers, et porte de bois ; et jusqu’aux repas qu’on lui laissait là, et qu’il rentrait en cachette lorsque personne ne le voyait. Eh bien, monsieur, tous les jours, oui, et même des deux ou trois fois dans une seule journée, c’étaient des ordres et des réclamations, et il m’a fallu courir chez tous les droguistes en gros de la ville. Chaque fois que je rapportais le produit, c’était un nouveau papier pour me dire de le renvoyer parce qu’il n’était pas pur, et un nouvel ordre pour une autre maison. Ce produit, monsieur, on en a terriblement besoin, pour je ne sais quel usage.

    – Avez-vous gardé quelqu’un de ces papiers ? demanda M. Utterson.

    Poole fouilla dans sa poche et en sortit un billet tout froissé, que le notaire, se penchant plus près de la bougie, déchiffra avec attention. En voici le contenu : « Le Dr Jekyll présente ses salutations à MM. Maw. Il leur affirme que le dernier échantillon qu’ils lui ont fait parvenir est impur et absolument inutilisable pour son présent besoin. En l’année 18…, le Dr Jekyll en a acheté une assez grande quantité chez MM. Maw. Il les prie aujourd’hui de vouloir bien faire les recherches les plus diligentes, et s’il leur en reste un peu de la même qualité, de le lui envoyer aussitôt. Peu importe le coût. Ce produit est pour le Dr Jekyll d’une importance tout à fait exceptionnelle. » Jusqu’ici l’allure du billet s’était maintenue suffisamment normale, mais arrivé là, écorchant soudain le papier d’une plume rageuse, le scripteur avait donné libre cours à ses sentiments. « Pour l’amour de Dieu, ajoutait-il, retrouvez-m’en un peu de l’ancien. »

    – Voici un billet étrange, dit M. Utterson ; puis avec sévérité : Comment se fait-il que vous l’ayez, tout décacheté, en votre possession ?

    – L’employé de chez Maw était si fort en colère, monsieur, qu’il me l’a rejeté comme de l’ordure, répondit Poole.

    – C’est indiscutablement l’écriture du docteur, vous savez ? reprit le notaire.

    – Je me disais bien qu’elle y ressemblait, dit le serviteur, mal convaincu. Et puis, sur un nouveau ton, il reprit : Mais qu’importe l’écriture, puisque je l’ai vu !

    – Vous l’avez vu ? répéta M. Utterson. Et alors ?

    – Tenez ! dit Poole, voici la chose. Je suis entré tout d’un coup dans l’amphithéâtre, venant du jardin. Il avait dû se glisser au dehors pour se mettre en quête du produit, ou faire je ne sais quoi ; car la porte du cabinet était ouverte, et il se trouvait tout au fond de la salle en train de fourrager parmi les touries. À mon arrivée, il leva les yeux, poussa comme un cri plaintif, et s’enfuit par l’escalier jusque dans le cabinet. Je ne l’ai vu qu’une minute, mais les cheveux m’en ont dressé sur le crâne comme des baguettes. Dites, monsieur, si c’était là mon maître, pourquoi avait-il un masque sur la figure ? Si c’était mon maître, pourquoi a-t-il poussé ce cri de rat, et pourquoi s’est-il sauvé en me voyant ? je l’ai servi assez longtemps. Et puis…

    Mais l’homme se tut et se passa la main sur le visage.

    – Toutes ces circonstances sont en effet bien bizarres, dit M. Utterson, mais je crois que je commence à y voir clair. Votre maître, Poole, est sans nul doute atteint d’une de ces maladies qui torturent à la fois et défigurent leur victime ; de là, selon toute probabilité, l’altération de sa voix ; de là le masque et son éloignement de ses amis ; de là son anxiété de trouver ce produit, grâce auquel la pauvre âme garde l’espoir d’une guérison finale. Dieu fasse que cet espoir ne soit pas trompé ! Voilà mon explication : elle est suffisamment triste, Poole, voire même affreuse à envisager, mais elle est simple et naturelle, elle est cohérente, et elle nous délivre de toutes craintes exagérées.

    – Monsieur, dit le maître d’hôtel, envahi d’une pâleur livide, cet être n’était pas mon maître, et voilà la vérité. Mon maître (et ce disant il regarda autour de lui et baissa la voix) est un homme grand et bien fait, et celui-ci était une sorte de nabot.

    Utterson voulut protester.

    – Oh ! monsieur, s’écria Poole, croyez-vous que je ne connaisse pas mon maître au bout de vingt ans ? Croyez-vous que je ne sache

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