▶ Lire le livre gratuitement en ligne | Entièrement gratuit | Oui c'est vrai!
  • Home
  • Tous les livres
    • Livres populaires
    • Livres tendance
  • BLOG
Recherche avancée
Sign in Sign up
  • Home
  • Tous les livres
    • Livres populaires
    • Livres tendance
  • BLOG
    Sign in Sign up
    1. Home
    2. Le Maître de Ballantrae
    3. Chapitre 28
    Prev
    Next

    phrase avec une sorte de désespoir et reprit ensuite plus posément :

    – Non, Mr. Mackellar, j’ai réfléchi toute la nuit sur cette matière, et il n’y a pas d’issue. Papiers ou non, la porte de ce château lui est ouverte, c’est lui l’héritier légitime, songez-y ! Si nous prétendions la lui interdire, tout retomberait sur le pauvre Henry, et je le verrais lapider dans la rue. Ah ! si Henry venait à mourir, ce serait une autre affaire. Ils ont entamé le capital comme ils le jugeaient bon, mais le domaine revient à ma fille, et je voudrais voir qu’on y portât la main ! Mais si Henry vit, mon pauvre Mackellar, et que cet homme revienne, nous aurons à souffrir ; seulement, cette fois, ce sera ensemble.

    Au fond, j’étais fort satisfait de la disposition d’esprit de Mme Henry ; et je ne pouvais nier qu’il n’y eût quelque apparence de vérité dans ce qu’elle avançait au sujet des papiers.

    – N’en parlons plus, dis-je. Je regrette seulement d’avoir confié les originaux à une dame, ce qui était à tout prendre une façon d’agir peu régulière. Quant à quitter le service de la famille, ma langue seule a parlé, rassurez-vous. J’appartiens à Durrisder, Mme Henry, comme si j’y étais né.

    Je dois lui rendre cette justice de dire qu’elle parut extrêmement soulagée ; et nous commençâmes cette journée, comme nous devions passer tant d’années, sur un terrain solide d’indulgence et d’estime réciproques.

    Ce même jour, qui était sûrement prédestiné à la joie, apparurent chez Mr. Henry les premiers symptômes de guérison. Vers trois heures de l’après-midi, il recouvra sa lucidité, et me salua par mon nom, avec les plus vifs témoignages d’affection. Mme Henry était également dans la chambre, au pied du lit ; mais il ne fit pas mine de s’en apercevoir. Et d’ailleurs (la fièvre ayant disparu), il était si faible qu’il se borna à cet unique effort, et retomba dans sa léthargie. Les progrès de la convalescence furent lents mais continus ; au bout de quelques jours, son appétit revint ; au bout d’une semaine, on le vit reprendre des forces et de l’embonpoint ; et le mois n’était pas écoulé qu’il se levait et se faisait porter dans un fauteuil sur la terrasse.

    Ce fut peut-être à cette époque que Mme Henry et moi éprouvâmes le plus d’inquiétude. Nous avions cessé de craindre pour sa vie ; mais cette crainte fut remplacée par une appréhension pire. Quotidiennement nous pensions voir venir le jour où il se retrouverait lui-même ; et cependant les jours passaient, sans que rien se produisît. Mr. Henry regagnait ses forces, il avait avec nous de longs entretiens sur des sujets variés, son père venait s’asseoir auprès de lui et repartait, sans qu’il fût fait la moindre allusion au drame, ou aux incidents qui l’avaient provoqué. S’en souvenait-il, et nous cachait-il son affreuse connaissance ? ou le tout s’était-il effacé de sa mémoire ? Tel était le problème qui nous tenait en suspens et nous faisait trembler tout le jour lorsque nous étions en sa compagnie, le problème qui nous tenait réveillés la nuit dans notre lit solitaire. Nous ne savions même quelle alternative espérer, tant l’une et l’autre apparaissaient troublantes et eussent décelé un cerveau dérangé. Obsédé par cette crainte, je surveillai sa conduite avec une attention extrême. Elle avait quelque chose de puéril : une gaieté fort étrangère à sa manière d’être antérieure, un intérêt vite éveillé, et alors très soutenu, pour des bagatelles qu’il avait jusque-là dédaignées. À l’époque où le mal le terrassa, j’étais son seul confident, je puis dire son seul ami, et il était en mauvais termes avec sa femme ; après sa guérison, tout changea, le passé fut oublié, sa femme devint son principal, voire son unique souci. Assuré de sa sympathie, il lui dédiait tous ses sentiments, comme fait un enfant avec sa mère ; il l’appelait dans tous ses besoins avec un peu de cette familiarité quinteuse qui dénote la certitude d’être écouté ; et je dois dire, pour être juste envers sa femme, qu’il ne fut jamais déçu. Pour elle, en effet, ce changement de conduite était des plus attendrissants ; elle y discernait, je pense, un reproche secret ; et même je l’ai vue, dans les premiers temps, quitter la chambre afin de pouvoir pleurer sans contrainte. À mes yeux, toutefois, cette modification ne paraissait pas naturelle ; et lorsque je la considère avec le reste, j’en viens à me demander, mélancoliquement, si sa raison était tout à fait intacte.

    Comme ce doute s’est prolongé pendant plusieurs années, qu’il a duré. en somme jusqu’au décès de mon maître, et a influé sur nos relations ultérieures, je dois l’examiner plus au long. Lorsque Mr. Henry fut en état de reprendre un soin partiel de ses affaires, j’eus maintes occasions de mettre à l’épreuve son exactitude. Il n’y avait pas défaut de compréhension, ni de volonté ; mais l’intérêt soutenu de jadis s’était entièrement évanoui ; il se fatiguait vite, et se mettait à bâiller ; en outre, il apportait dans les relations pécuniaires, où elle est certes très déplacée, une facilité qui confinait à la négligence. Au vrai, comme nous n’avions plus à lutter contre les exactions du Maître, il n’y avait plus de raison pour ériger la parcimonie en principe, ou batailler à propos d’un farthing. Au vrai encore, ce relâchement n’avait rien d’excessif, sinon j’y aurais refusé ma complicité. Mais il révélait, en somme, un changement très léger quoique fort perceptible ; et si l’on n’avait pas le droit de dire que mon maître eût perdu la raison, indéniablement son caractère s’était altéré. Il fut le même jusqu’à la fin, dans ses manières et son apparence, il lui restait dans les veines comme une chaleur de la fièvre, qui précipitait un peu ses mouvements, et faisait son discours notablement plus volubile, sans aller toutefois jusqu’à le rendre confus. Tout son être s’épanouissait aux impressions agréables, qu’il accueillait avec délices ; mais la moindre apparence de tracas ou de peine éveillait en lui une impatience visible, et il s’en débarrassait au plus vite. Ce fut à cette humeur qu’il dut la félicité de ses derniers jours ; et pourtant ce fut alors, ou jamais, qu’on eût pu l’appeler insensé. Un grand point dans la vie consiste à prévoir ce qu’il est impossible d’éviter ; mais Mr. Henry, lorsqu’il n’arrivait pas à écarter le souci par un effort mental, devait sur-le-champ et à tout prix en abolir la cause. Il imitait tour à tour l’autruche et le taureau. C’est à cette excessive lâcheté devant la douleur que je dois attribuer toutes les démarches outrancières et malheureuses de son existence ultérieure. C’est pour cette raison, à coup sûr, qu’il battit Mac Manus, le groom, chose tellement étrangère à sa manière d’agir antécédente, et qui provoqua tant de commentaires à l’époque. C’est encore à cette raison que j’attribue la perte totale de près de deux cents livres, dont la moitié eût été sauvée, si son impatience m’eût laissé faire. Mais il préférait une perte ou n’importe quel moyen désespéré, à la souffrance mentale prolongée.

    Cette digression m’a entraîné bien loin de notre inquiétude immédiate : se rappelait-il, ou avait-il oublié son dernier geste tragique ; et s’il se le rappelait, sous quel jour le voyait-il ? La vérité nous apparut soudain, et ce fut là une des plus grandes surprises de ma vie. Il était sorti plusieurs fois, et commençait à se promener à mon bras ; il advint un jour que je me trouvai seul avec lui sur la terrasse. Il se tourna vers moi avec un sourire singulièrement furtif, comme en ont les écoliers pris en faute ; et il me dit, tout bas, et sans le moindre préambule :

    – Où l’avez-vous enterré ?

    Il me fut impossible de répondre un mot.

    – Où l’avez-vous enterré ? reprit-il. Je veux voir sa tombe.

    Je compris que mieux valait prendre le taureau par les cornes.

    – Mr. Henry, dis-je, j’ai à vous annoncer une nouvelle qui vous réjouira beaucoup. Selon toute vraisemblance, vos mains sont pures de sang. Je raisonne d’après certains indices ; et ils semblent démontrer que votre frère n’était pas mort, mais évanoui, et qu’il fut transporté à bord du lougre. Présentement, il doit être tout à fait rétabli.

    Son visage me demeura indéchiffrable.

    – James ? demanda-t-il.

    – Votre frère James, répondis-je. Je ne voudrais pas vous donner une fausse joie, mais en mon for intérieur, je crois qu’il est très probablement en vie.

    – Ah ! dit Mr. Henry. Puis soudain, se levant de son siège avec plus d’alacrité qu’il n’en avait montré encore, il posa l’index sur ma poitrine et me cria pour ainsi dire tout bas : – Mackellar – (je cite ses paroles textuelles) – rien ne peut tuer cet homme. Il n’est pas mortel. Je l’ai sur le dos pour toute l’éternité… pour toute l’éternité de Dieu ! – Et, se rasseyant, il s’enfonça dans un silence obstiné.

    Un jour ou deux plus tard, avec le même sourire coupable, et regardant d’abord autour de lui, comme pour s’assurer que nous étions seuls :

    – Mackellar, dit-il, lorsque vous saurez quelque chose, avertissez-moi. Il nous faut prendre garde à lui, sinon il nous surprendra lorsque nous nous y attendrons le moins.

    – Il n’osera plus se montrer ici, dis-je.

    – Oh ! si fait ! dit Mr. Henry. Où que je sois, il y sera.

    Et de nouveau il regarda autour de lui.

    – Il ne faut pas vous préoccuper de la sorte, Mr. Henry, dis-je.

    – Non, dit-il, votre avis est très bon. Nous n’y penserons jamais, excepté lorsque vous aurez des nouvelles. Et puis, on

    Prev
    Next

    YOU MAY ALSO LIKE

    La Fleche noire – Robert Louis Stevenson
    La Flèche noire
    August 17, 2020
    Dans les mers du sud – Robert Louis Stevenson
    Dans les mers du sud
    August 17, 2020
    L’Etrange Cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde – Robert Louis Stevenson
    L’Étrange Cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde
    August 17, 2020
    Une apologie des oisifs – Robert Louis Stevenson
    Une apologie des oisifs
    August 17, 2020
    Tags:
    Classique, Fiction, Historique, L'aventure
    • Privacy Policy
    • ABOUT US
    • Contact Us
    • Copyright
    • DMCA Notice

    © 2020 Copyright par l'auteur des livres. Tous les droits sont réservés.

    Sign in

    Lost your password?

    ← Back to ▶ Lire le livre gratuitement en ligne | Entièrement gratuit | Oui c'est vrai!

    Sign Up

    Register For This Site.

    Log in | Lost your password?

    ← Back to ▶ Lire le livre gratuitement en ligne | Entièrement gratuit | Oui c'est vrai!

    Lost your password?

    Please enter your username or email address. You will receive a link to create a new password via email.

    ← Back to ▶ Lire le livre gratuitement en ligne | Entièrement gratuit | Oui c'est vrai!