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    2. Le Maître de Ballantrae
    3. Chapitre 27
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    ne supportait pas d’avouer, ni peut-être vis-à-vis de lui-même, qu’il eût été vaincu par celui qu’il avait outragé si longtemps et qu’il méprisait aussi cruellement.

    VI

    Ce qui se passa durant la deuxième absence du Maître

    La grave maladie qui se déclara chez mon maître le lendemain matin fut le dernier malheur sans compensation qui le frappa ; et cette maladie même fut peut-être un bienfait déguisé, car nulle peine physique ne pouvait égaler les souffrances de son esprit. Mme Henry et moi veillions à son chevet. Mon vieux lord venait de temps en temps aux nouvelles, mais en général sans franchir le seuil. Une seule fois, je me souviens, alors que tout espoir était perdu, il s’avança jusqu’auprès du lit, considéra le visage de son fils, et s’en alla, avec un geste particulier de la tête et du bras levé, qui me revient à la mémoire comme quelque chose de tragique, tant il exprimait de douleur et de dédain pour les choses sublunaires. Mais la plupart du temps, Mme Henry et moi restions seuls dans la chambre, nous relayant la nuit, et, le jour, supportant notre compagnie réciproque, car ces veillées étaient plutôt lugubres. Mr. Henry, une serviette liée autour de son crâne rasé, s’agitait sans interruption dans son lit, qu’il frappait de ses poings. Sa langue n’arrêtait pas ; sa voix ne cessait de fluer, comme une rivière, à m’en donner presque la nausée. Chose remarquable, et pour moi mortifiante à l’excès, il parlait sans cesse de mesquineries vulgaires : allées et venues, chevaux – qu’il ordonnait de seller pour lui, se figurant peut-être (pauvre âme !) qu’il pouvait fuir sa maladie – jardinages, filets à saumon, et (ce qui me faisait le plus enrager) continuellement de ses affaires, additionnant des chiffres, et discutant avec ses fermiers. Jamais un mot de son père ou de sa femme, ni du Maître, à part une fois ou deux, où il fit un retour sur le passé, et se crut redevenu petit garçon, en train de jouer avec son frère. Ce fut d’autant plus émouvant que le Maître avait, paraît-il, couru un grand danger, et que Mr. Henry s’écria, à plusieurs reprises, avec une chaleur passionnée : « Oh ! Jammie va se noyer !… Oh ! sauvez Jammie ! »

    Ceci, dis-je, nous toucha tous les deux, Mme Henry et moi, mais en général, les divagations de mon maître ne lui faisaient guère honneur. Il semblait avoir pris à tâche de justifier les calomnies de son frère et de prouver qu’il était d’un caractère sec, immergé dans les intérêts matériels. Si j’avais été seul, je n’en aurais pas levé un doigt ; mais je ne cessais, tout en l’écoutant, d’évaluer l’effet produit sur sa femme, et je sentais qu’il tombait chaque jour plus bas dans son estime. J’étais la seule personne à la surface du globe qui le comprît, et j’entendais qu’il y en eût une autre. Allait-il mourir là et périr avec ses vertus ; ou bien n’aurait-il la vie sauve que pour recouvrer ce patrimoine de chagrins, sa vraie mémoire : – je voulais qu’il fût pleuré de tout cœur, dans le premier cas, et accueilli avec simplicité, dans l’autre, par la personne qu’il aimait le plus, sa femme.

    Ne trouvant pas l’occasion de m’exprimer librement, je m’avisai enfin de mettre ma révélation par écrit. Au lieu de me coucher, je consacrai plusieurs nuits où j’étais de loisir à préparer ce que je puis appeler mon bilan. Mais je m’aperçus que, si la rédaction en était facile, l’opération restante – c’est-à-dire de présenter la chose à Mylady – dépassait en quelque sorte les limites de mon courage. Plusieurs jours de suite, je promenai mes papiers sous mon bras, guettant le joint d’un propos qui m’eût servi d’introduction. Je ne puis nier qu’il s’en offrit plusieurs, mais à ces moments-là, je trouvais ma langue clouée à mon palais, et j’aurais pu, je crois, porter mon dossier jusqu’à l’heure actuelle, si un heureux incident n’était venu couper court à mes hésitations. Une nuit que j’allais une fois de plus quitter la chambre, sans avoir rien osé, et désespéré de ma couardise, Mme Henry me demanda :

    – Que portez-vous donc là, Mr. Mackellar ? Voici plusieurs jours que je vous vois entrer et sortir avec ce même rouleau sous le bras.

    Je revins sur mes pas, sans mot dire, déposai les papiers sur la table devant elle, et la laissai à sa lecture. Pour donner une idée de ce qui lui passa sous les yeux, je crois bon de reproduire ici une mienne lettre, la première du dossier, et dont j’ai gardé (suivant ma bonne habitude) le brouillon. Elle fera voir, en outre, la modestie du rôle que j’ai joué dans ces affaires, modestie qui fut contestée par certains.

    « Durrisdeer, 1757.

    Honorée Madame,

    Je me flatte de ne pas outrepasser mon rôle sans juste raison, mais je vois le mal qu’a engendré dans le passé, pour votre noble maison, ce malheureux abus de la discrétion et des réticences, et les papiers sur lesquels j’ose appeler votre attention sont des papiers de famille qui méritent tous grandement d’être connus de vous.

    J’annexe ci-après une série de notes indispensables, et suis, honorée Madame, de votre Seigneurie,

    L’obligé et obéissant serviteur,

    Éphraïm Mackellar.

    Liste des documents

    A – Brouillon de dix lettres écrites par Éphraïm Mackellar, à l’honorable James Durie, esq., par respect Maître de Ballantrae, durant le séjour à Paris de ce dernier : datées… (suivent les dates)… Nota : À lire en même temps que B et C.

    B. – Sept lettres originales dudit Maître de Ballantrae, audit Éphraïm Mackellar, datées… (suivent les dates)…

    C. – Trois lettres originales dudit Maître de Ballantrae à l’honorable Henry Durie, esq, datées… (suivent les dates)… Nota : À moi données par Mr. Henry pour y répondre. Les copies de mes réponses figurent ici sous les rubriques A4, A5 et A9. le contenu des communications de Mr. Henry, dont je ne retrouve pas les brouillons, peut se déduire de ce qu’écrivait ce frère dénaturé.

    D. – Une correspondance, originaux et brouillons, comprenant une période de trois années, jusqu’en janvier de la présente année, entre lesdits Maître de Ballantrae et X…, sous-secrétaire d’État ; soit 27 lettres en tout. – Nota : Trouvé dans les papiers du Maître.

    La lassitude de mes veilles et l’inquiétude m’empêchèrent de dormir. Toute la nuit, j’arpentai ma chambre, réfléchissant à ce qui résulterait de mon immixtion en des affaires aussi intimes, et, parfois, regrettant ma hardiesse. Dès la première aube, j’étais à la porte du malade. Mme Henry avait ouvert les volets et même la fenêtre, car le temps était doux. Elle regardait fixement devant elle, où il n’y avait rien d’autre à voir que le matin bleu répandu sur les bois. Au bruit de mes pas, elle ne tourna même pas la tête, – circonstance dont je n’augurai rien de bon.

    – Madame, commençai-je ; et je répétai encore une fois : – Madame… Mais je ne trouvai rien de plus à dire. Mme Henry non plus ne prononça pas un seul mot pour me venir en aide. Alors je m’approchai de la table et réunis les documents épars ; mais je m’aperçus tout de suite que leur nombre avait diminué. Je les parcourus une fois, puis deux, sans retrouver la correspondance avec le secrétaire d’État, sur laquelle je comptais beaucoup pour l’avenir. Je regardai dans l’âtre. Parmi les tisons brûlants, des cendres de papiers frémissaient dans le courant d’air. À cette vue, ma timidité disparut.

    – Grand Dieu ! Madame, m’écriai-je, d’un ton fort déplacé dans une chambre de malade, – Grand Dieu ! Madame, qu’avez-vous fait de mes papiers ?

    – Je les ai brûlés, dit Mme Henry, en se tournant vers moi. – Il suffit, et c’est même trop, que vous et moi les ayons lus.

    – Vous avez fait là une jolie besogne, cette nuit ! m’écriai-je. – Et tout cela, pour sauver la réputation d’un homme qui gagnait son pain en répandant le sang de ses amis, comme je gagne le mien avec de l’encre.

    – Pour sauver la réputation de cette famille dont vous êtes un serviteur, Mr. Mackellar, répliqua-t-elle, et pour laquelle vous en avez déjà tant fait.

    – Cette famille, je ne la servirai pas plus longtemps, m’écriai-je, car je désespère, à la fin ! Vous m’avez arraché mes armes, et vous nous laissez sans défense. J’aurais eu, en tout cas, ces lettres à lui brandir sur la tête ; mais désormais, que faire ? Notre situation est tellement fausse que nous ne pouvons mettre cet homme à la porte ; le pays prendrait feu contre nous ; et j’avais barre sur lui par ces seuls papiers… et les voilà disparus !… À présent, il peut revenir demain, et nous serons forcés de nous attabler avec lui, de sortir sur la terrasse avec lui, ou de faire sa partie de cartes, mettons, pour le distraire ! Non, madame ! Que Dieu vous pardonne, s’il en a envie, mais pour ma part, je ne saurais.

    – J’admire votre simplicité, Mr. Mackellar, dit Mme Henry. Quel prix cet homme attache-t-il à l’honneur ? Aucun. Par contre, il sait combien nous l’apprécions ; il sait que nous préférerions mourir plutôt que de publier ces lettres. Croyez-vous qu’il n’userait pas de cette connaissance ? Ce que vous appelez votre arme, Mr. Mackellar, et qui en eût été une, en effet, contre quelqu’un doué d’un reste de pudeur, ne servirait contre lui pas plus qu’un sabre de bois. Il vous rirait au nez si vous l’en menaciez. Il foule aux pieds sa dégradation, c’est elle qui fait sa force. Il est vain de lutter contre de tels caractères.

    Elle lança cette dernière

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