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    2. Le Maître de Ballantrae
    3. Chapitre 15
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    aucune part.

    – Vous avez l’air de vous figurer que je le fais pour mon plaisir, dit-il. Mais j’ai maintenant un enfant ; et, de plus, j’aime l’ordre et pour dire la simple vérité, Mackellar, je commençais à mettre ma fierté dans le domaine. – Il réfléchit une minute. – Mais que voulez-vous, poursuivit-il. Rien n’est à moi, rien. Depuis ce que je viens d’apprendre, mon existence a perdu toute valeur. Je suis réduit au nom et à l’ombre des choses, – oui, à l’ombre ; il n’y a pas de réalité dans mes droits.

    – Ils se trouveront assez réels devant les tribunaux, répliquai-je.

    Il me jeta un regard enflammé, et parut sur le point de dire quelque chose ; et je me repentis de ce que je venais de dire, car je voyais que, tout en parlant du domaine, il avait aussi en vue son mariage. Et alors, brusquement, il tira de sa poche la lettre toute froissée, la lissa sur la table avec rage, et me lut d’une voix tremblante ces mots : « Mon cher Jacob… voilà comme il débute, s’écria-t-il. – Mon cher Jacob, je vous ai donné ce nom une fois, vous vous le rappelez sans doute, et vous avez à présent réalisé la chose, et m’avez envoyé par-dessus les moulins… » Que pensez-vous de ceci, Mackellar, venant d’un frère unique ? J’affirme devant Dieu que je l’aimais bien ; je lui fus toujours attaché, et voilà ce qu’il m’écrit ! Mais je ne veux pas rester sous cette imputation – (marchant de long en large) – je le vaux bien ; je vaux mieux que lui, je le prouverai devant Dieu ! je ne saurais lui donner les sommes énormes qu’il réclame ; il sait que nos biens n’y suffiraient pas, mais je veux lui donner ce que j’ai, et c’est plus qu’il n’espère. J’ai supporté tout ceci trop longtemps… Voyez ce qu’il écrit encore, lisez vous-même : « Je vous connais pour un chien d’avaricieux… » Un chien d’avaricieux ! Moi, avaricieux ! Est-ce vrai, Mackellar ? le croyez-vous ? – (Je pensai réellement qu’il allait me frapper.) – Oh ! vous le croyez tous ! Eh bien, vous verrez, et il verra, et Dieu verra. Dussé-je ruiner le domaine et aller nu-pieds, je gorgerai cette sangsue. Qu’il demande tout… tout, et il l’aura ! Tout est à lui, régulièrement… Ah ! s’écria-t-il, et dire que j’avais prévu tout ceci, et pis même, quand il refusa de me laisser partir.

    Il se versa encore un verre de vin, et allait le porter à ses lèvres, quand je me permis de poser le doigt sur son bras. Il s’arrêta.

    – Vous avez raison, dit-il. – Et il jeta dans l’âtre le verre avec son contenu. – Allons compter l’argent.

    Je n’osai plus l’empêcher ; d’ailleurs, j’étais fort affecté de voir tellement bouleversé un homme d’habitude si retenu. Je m’assis à côté de lui, comptai l’argent, et l’empaquetai, pour la plus grande commodité du colonel, qui devait le prendre avec lui. Ceci fait, Mr. Henry s’en retourna dans la salle, où Mylord et lui passèrent la nuit à causer avec leur hôte.

    Un peu avant l’aube, on m’appela pour escorter le colonel. Il eût préféré sans doute un autre convoyeur, car il s’estimait beaucoup ; mais nous ne pûmes lui en offrir un plus digne, car Mr. Henry ne devait pas se faire voir avec les contrebandiers. C’était une matinée de vent très âpre et, comme nous descendions sous la grande charmille, le colonel s’emmitoufla dans son manteau.

    – Monsieur, dis-je, c’est une grosse somme d’argent que réclame votre ami. Je suppose qu’il a de très grands besoins.

    – Supposons-le, dit-il (un peu sèchement, pensai-je, mais c’était peut-être à cause du manteau sur sa bouche).

    – Je ne suis que le serviteur de la famille, repris-je. Vous pouvez causer sans détours avec moi. Je pense que nous n’avons pas grand-chose de bon à espérer de lui ?

    – Mon cher ami, dit le colonel, Ballantrae est un gentilhomme des plus hautes capacités naturelles, et je l’admire et le révère jusqu’à la semelle de ses bottes.

    Et alors, il me parut qu’il rencontrait une difficulté.

    – Mais, malgré tout, dis-je, nous n’avons pas grand-chose de bon à espérer de lui ?

    – Pour sûr, et vous avez raison de le croire, mon cher ami, dit le colonel.

    Nous étions arrivés au bord de la crique où le canot l’attendait.

    – Eh bien, dit-il, je reste à coup sûr votre débiteur pour vos civilités, Mr. Quel-est-votre-nom ; et pour dernier mot, et puisque vous montrez une curiosité si intelligente, je vous confierai un petit détail qui peut servir à la famille. Car je crois que mon ami a oublié de mentionner que le Secours-Écossais lui sert une pension plus forte qu’à aucun réfugié de Paris, et le plus honteux, monsieur, ajouta-t-il en s’échauffant, – c’est qu’ils n’ont pas un traître sou pour moi !

    Il mit son chapeau de côté en me regardant, comme s’il me rendait responsable de cette injustice ; puis il revint à son habituel excès de politesse, me serra la main, et descendit vers le canot, son argent sous le bras, et sifflant l’air pathétique de Shule Aroon. C’était la première fois que j’entendais cet air ; je devais l’entendre à nouveau, avec les paroles, comme on le verra, mais je me souviens que cette simple mesure me trotta dans la tête après que les contrebandiers l’eurent fait taire d’un : « Chut ! au nom du diable ! » Les avirons grincèrent, et je restai à regarder l’aube se répandre sur la mer, où le canot s’éloignait, vers le lougre qui l’attendait, sa voile d’avant masquée.

    La brèche faite à notre budget nous embarrassa beaucoup, et entre autres conséquences, il me fallut faire le voyage d’Édimbourg et, là, obtenir un nouveau prêt, à des conditions fort onéreuses pour maintenir l’autre à flot ; et je fus ainsi, pendant près de trois semaines, absent du château de Durrisdeer.

    Ce qui se passa dans l’intervalle, je n’eus personne pour me le raconter, mais à mon retour, je trouvai Mme Henry fort changée d’allures. Les entretiens de jadis avec Mylord étaient devenus rares ; elle avait parfois l’air d’adresser comme une prière muette à son mari, et il me sembla qu’elle lui parlait plus souvent ; enfin, elle était absolument férue de Miss Katharine. On croit peut-être que ce changement était agréable à Mr. Henry ? En aucune façon. Au contraire, chacune de ces innovations lui portait un coup ; il croyait y lire l’aveu des coupables désirs de sa femme. Cette fidélité constante au Maître, dont elle était si fière lorsque nous le pensions mort, elle avait à en rougir, depuis qu’elle le savait en vie, et cette vergogne était la source de sa nouvelle manière d’être. Je ne dois cacher aucune vérité ; et je le dirai ici nettement, ce fut, je crois, l’époque où Mr. Henry se comporta le plus mal. En public, il savait se contenir ; mais on percevait en lui une irritation profonde et latente. Avec moi, il prenait moins de précautions pour la dissimuler, et se montrait souvent des plus injustes. Même avec sa femme, il lui échappait des réponses acerbes : soit qu’elle l’eût froissé par quelque amabilité intempestive ; ou peut-être sans motif plausible, et par un simple épanchement spontané de l’irritation habituelle chez lui. Quand il s’oubliait de la sorte (ce qui jurait singulièrement avec les conditions de leur union), un malaise passait sur la société, et le couple se regardait avec une sorte d’étonnement douloureux.

    Tout ce temps aussi, outre qu’il se nuisait par ce défaut d’humeur, il compromettait sa position par un silence dont je n’ose décider s’il provenait de la générosité ou de l’orgueil. Les contrebandiers revinrent à plusieurs reprises, amenant des messagers du Maître, et aucun ne s’en retourna les mains vides. Je n’osais plus discuter avec Mr. Henry ; il donnait ce qui lui était demandé, avec une sorte de noble rage. Peut-être parce qu’il se savait d’un naturel enclin à la parcimonie, il prenait un plaisir pervers à fournir sans trêve aux exigences de son frère. Peut-être la fausseté de sa position aurait aiguillonné un homme moins fier jusqu’au même excès. Mais le domaine gémissait, pour ainsi dire, sous le faix ; nos dépenses quotidiennes se restreignaient chaque jour ; les écuries se vidaient, il n’y resta plus que quatre bidets de fatigue ; les domestiques furent congédiés, ce qui fit murmurer hautement dans le pays, et raviva l’ancienne animosité contre Mr. Henry. Finalement, il fallut renoncer au voyage annuel d’Édimbourg.

    Ceci advint en 1756. Il faut se rendre compte que depuis sept ans cette sangsue pompait le sang et la vie de Durrisdeer, et que durant tout ce laps de temps, mon maître s’était tu. C’était en effet de sa diabolique malice que le Maître s’adressait à Mr. Henry seul sur le chapitre des demandes, et qu’il n’en touchait pas un mot à Mylord. La famille avait considéré avec surprise nos économies. Elle s’était plainte, je n’en ai pas le moindre doute, que mon maître fût devenu d’une telle ladrerie, – défaut toujours méprisable, mais répugnant chez les personnes jeunes, et Mr. Henry n’avait pas trente ans.

    À cette époque, je crois bien que mon maître et sa femme se voyaient à peine en dehors des repas. Immédiatement après la révélation du colonel Burke, Mme Henry avait fait des avances visibles à son mari ; on pourrait presque dire qu’elle lui fit alors une espèce de cour timide, en absolu contraste avec ses manières d’autrefois, indifférentes et hautaines. Je n’ai jamais eu le courage de blâmer Mr. Henry pour

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