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    2. Le Maître de Ballantrae
    3. Chapitre 12
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    seconde plus tard, il retombait le nez dans la vase.

    Ballantrae en avait déjà par-dessus les chevilles ; mais il se dépêtra et revint vers moi. Mes genoux s’entrechoquaient.

    – Le diable vous emporte, Francis, dit-il. Je crois après tout que vous n’êtes qu’un poltron. Je viens de faire justice d’un pirate. Et nous voici entièrement libres de la Sarah ! Qui peut dire à présent si nous avons trempé dans quelque irrégularité ?

    Je lui assurai qu’il me faisait injure ; mais mon sens de l’humanité était si touché par cette action atroce que le souffle me manquait pour lui répondre.

    – Allons, dit-il, tâchez d’être plus résolu. Notre besoin de cet homme cessait du moment où il vous avait montré le sentier ; et vous ne nierez pas que j’eusse été fou de laisser échapper une si belle occasion.

    Je reconnus qu’il avait raison, en principe. Néanmoins, je ne pouvais m’empêcher de verser des pleurs, – nullement déshonorants ; et il me fallut boire une gorgée de rhum pour me rendre la force d’avancer. Je le répète, je suis loin d’avoir honte de ma généreuse émotion : la pitié honore le guerrier ; et cependant je ne saurais tout à fait blâmer Ballantrae, dont le geste fut réellement heureux, car nous trouvâmes le sentier sans autre mésaventure et, le même soir, vers le coucher du soleil, nous atteignîmes l’extrémité du marais.

    Nous étions trop harassés pour aller plus loin ; sur le sable sec, encore échauffé par les rayons du soleil, et à l’abri d’un bois de pins, nous nous couchâmes et fûmes aussitôt plongés dans le sommeil.

    Nous nous éveillâmes très tôt, fort abattus, et commençâmes un entretien qui faillit dégénérer en coups. Nous étions là, jetés sur la côte des provinces du Sud, à mille milles de tout établissement français : voyage redoutable, au cours duquel nous attendaient mille périls ; et à coup sûr, si notre amitié fut jamais nécessaire, c’était en une pareille heure. J’imagine que Ballantrae avait perdu le sens exact de la politesse ; en fait, ma supposition n’a rien d’étrange, après notre longue cohabitation avec de tels loups de mer ; mais bref, il me rabroua si grossièrement, que tout homme d’honneur s’en serait formalisé.

    Je lui dis sous quel aspect je voyais sa conduite ; il s’éloigna de quelques pas, tandis que je le suivais, parlant toujours ; enfin, il m’arrêta d’un geste.

    – Francis, dit-il, vous savez ce que nous avons juré ; cependant, il n’existerait pas de serment capable de me faire avaler pareilles expressions, si je ne vous étais sincèrement attaché. Il est impossible que vous en doutiez : vous en avez la preuve. Il me fallait emmener Dutton, parce qu’il connaissait le passage, et Grady, parce que Dutton ne voulait pas marcher sans lui ; mais quel besoin avais-je de vous ? Vous êtes pour moi un danger perpétuel avec votre maudite langue irlandaise. Régulièrement, vous devriez être à cette heure aux fers sur le croiseur. Et vous me cherchez noise puérilement, pour des vétilles !

    Je considère ce discours comme un des plus désobligeants qui furent jamais et, aujourd’hui encore, je ne puis concilier son souvenir avec celui du gentilhomme qu’était mon ami. Je lui renvoyais que son accent écossais, sans avoir rien d’exagéré, suffisait néanmoins à le rendre incorrect et ridicule ; et, comme je parlais sans circonlocutions, l’affaire aurait pu aller loin s’il ne s’était produit une alerte inquiétante.

    Nous avions fait quelques pas sur le sable. L’endroit où nous avions dormi, avec les ballots tout défaits, et de l’argent éparpillé alentour, se trouvait alors entre nous et les pins ; et ce dut être de derrière ceux-ci que l’étranger sortit. En tout cas, il y avait là devant nous un grand et solide gaillard du pays, portant une large hache sur l’épaule, qui regardait bouche bée tantôt le trésor, juste à ses pieds, et tantôt notre combat, car nous venions de tirer nos épées. À peine l’eûmes-nous remarqué, il retrouva l’usage de ses jambes, et s’éclipsa derrière les pins.

    Cette apparition était peu propre à nous rassurer. Deux hommes armés et vêtus en marins, que l’on trouve à se quereller auprès d’un trésor, non loin de l’endroit où l’on vient de capturer un pirate, – c’en était assez pour nous amener tout le pays. La querelle ne fut pas simplement interrompue : elle nous sortit de l’esprit ; en un clin d’œil, nos ballots étaient refaits et nous repartis, courant de la meilleure volonté du monde. Mais le malheur fut que nous ne connaissions pas le chemin, et qu’il nous fallut sans cesse retourner sur nos pas. Ballantrae avait en effet tiré de Dutton tous les renseignements possibles, mais il n’est pas aisé de voyager par ouï-dire ; et l’estuaire, qui forme un vaste havre irrégulier, nous présentait de tous côtés une nouvelle étendue d’eau.

    Nous en perdions la tête et n’en pouvions plus de courir, lorsque, arrivant au haut d’une dune, nous nous vîmes encore une fois coupés par une autre ramification de la baie. Cette crique-ci, toutefois, était très différente de celles qui nous avaient arrêtés auparavant ; elle était formée par des rochers si abruptement taillés qu’un petit navire avait pu aborder tout contre, et s’y amarrer ; même, son équipage avait disposé une planche pour accéder au rivage. Là auprès, ils étaient assis, autour d’un feu, à manger. Quant au navire, c’était un de ceux que l’on construit aux Bermudes.

    La soif de l’or et la grande haine que chacun nourrit envers les pirates étaient bien de quoi lancer tout le pays à nos trousses. De plus, nous n’étions maintenant que trop certains de nous trouver sur une sorte de presqu’île découpée à l’instar des doigts de la main ; et le poignet, c’est-à-dire l’accès à la terre ferme, que nous aurions dû suivre tout d’abord, était à cette heure probablement gardé. Ces considérations nous firent prendre un parti des plus téméraires. Aussi longtemps que nous l’osâmes, nous attendant sans cesse à percevoir des bruits de poursuite, nous restâmes couchés derrière les buissons, sur la dune. Puis, ayant repris haleine, et un peu plus présentables, nous descendîmes enfin, affectant un air très détaché, vers la compagnie assise auprès du feu.

    C’étaient un trafiquant et ses nègres, du port d’Albany, dans la province de New York, qui revenaient des Indes, avec une cargaison ; – je ne puis me rappeler son nom. Nous fûmes stupéfaits d’apprendre qu’il s’était réfugié ici par crainte de la Sarah ; car nous n’avions pas idée que nos exploits fussent si notoires. Dès que l’Albanien sut qu’elle avait été prise la veille, il se leva d’un bond, nous donna un gobelet de rhum pour notre bonne nouvelle, et envoya ses nègres mettre à la voile sur le bermudan. De notre côté, nous profitâmes de la goutte pour devenir plus communicatifs, et nous offrir à la fin comme passagers. Il regarda de travers nos vêtements tachés de goudron et nos pistolets, et répondit poliment qu’il n’avait pas trop de place pour lui. Impossible, ni par nos prières, ni par nos offres d’argent, de plus en plus fortes, d’ébranler sa résolution.

    – Je vois que vous n’avez pas confiance en nous, dit Ballantrae, mais je vais vous prouver la nôtre en vous disant la vérité. Nous sommes des Jacobites fugitifs, et nos têtes sont mises à prix.

    Ce discours toucha visiblement l’Albanien. Il nous posa sur la guerre en Écosse maintes questions, auxquelles Ballantrae répondit fort patiemment. Puis, avec un clin d’œil, et d’un ton vulgaire, l’homme conclut :

    – Il me semble que vous et votre prince Charles en avez pris plus que vous ne désiriez.

    – Parbleu, c’est bien ça, dis-je. Et, mon cher ami, je souhaite que vous en donniez une nouvelle preuve, en nous prenant à votre bord.

    Je dis cette phrase à la façon irlandaise, que l’on s’accorde à trouver assez plaisante. C’est un fait remarquable et qui témoigne de la faveur avec laquelle on regarde notre peuple, que cette façon ne manque guère son effet sur les honnêtes gens. Je ne saurais dire combien de fois j’ai vu un simple soldat esquiver une punition, ou un mendiant attraper une bonne aumône, grâce à son accent. Et, en fait, aussitôt que l’Albanien eut ri de moi, je fus tout à fait tranquille. Même alors, il est vrai, il posa beaucoup de conditions et, – entre autres, – nous enleva nos armes, avant de nous admettre à son bord. Ce fut le signal de l’appareillage et, un instant plus tard, nous filions sur la baie avec une bonne brise, bénissant Dieu de notre délivrance. Presque à l’entrée de l’estuaire, nous dépassâmes le croiseur et, un peu plus loin, la pauvre Sarah avec son équipage de prise ; et la vue de ces deux navires était bien propre à nous faire trembler. Sur le bermudan, toutefois, nous étions saufs et la réussite de notre coup d’audace nous parut plus heureuse, de nous rappeler ainsi le sort de nos compagnons. Malgré cela, nous n’avions guère que changé de piège, sauté de la poêle à frire dans le feu, couru de la vergue au billot, et fui l’hostilité ouverte du vaisseau de guerre, pour nous en remettre à la bonne foi douteuse de notre marchand albanien.

    Plusieurs circonstances nous démontrèrent bientôt que nous étions plus en sûreté qu’on ne pouvait l’espérer. Les gens d’Albany, à cette époque, s’occupaient beaucoup de la contrebande, à travers le désert, avec les Indiens et les Français. Ces trafics illégaux relâchaient leur loyauté et, les mettant en relations avec le peuple le plus policé de la terre, divisaient leurs sympathies. Bref ils étaient comme tous les contrebandiers du monde, espions et

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