n’ÈtAit pAs fort hAbile:
Ce Loup ne sAvAit pAs encor bien son mÈtier.
IX,11 Rien de trop
Je ne vois point de crÈAture
Se comporter modÈrÈment.
Il est certAin tempÈrAment
Que le mAAtre de lA nAture
Veut Que l’on gArde en tout. Le fAit-on? Nullement.
Soit en bien, soit en mAl, celA n’Arrive guÉre.
Le blÈ, riche prÈsent de lA blonde CÈrÉs Trop touffu bien souvent Èpuise les guÈrets; En superfluitÈs s’ÈpAndAnt d’ordinAire, Et poussAnt trop AbondAmment,
Il ôte A son fruit l’Aliment.
L’Arbre n’en fAit pAs moins; tAnt le luxe sAit plAire!
Pour corriger le blÈ, Dieu permit Aux moutons De retrAncher l’excÉs des prodigues moissons.
Tout Au trAvers ils se jetÉrent,
G‚tÉrent tout, et tout broutÉrent,
TAnt Que le Ciel permit Aux Loups
D’en croQuer QuelQues-uns: ils les croQuÉrent tous; S’ils ne le firent pAs, du moins ils y t‚chÉrent.
Puis le Ciel permit Aux humAins
De punir ces derniers: les humAins AbusÉrent A leur tour des ordres divins.
De tous les AnimAux l’homme A le plus de pente A se porter dedAns l’excÉs.
Il fAudrAit fAire le procÉs
Aux petits comme Aux grAnds. Il n’est ‚me vivAnte Qui ne pÉche en ceci. Rien de trop est un point Dont on pArle sAns cesse, et Qu’on n’observe point.
IX,12 Le Cierge
C’est du sÈjour des Dieux Que les Abeilles viennent.
Les premiÉres, dit-on, s’en AllÉrent loger Au mont Hymette, et se gorger
Des trÈsors Qu’en ce lieu les zÈphirs entretiennent.
QuAnd on eut des pAlAis de ces filles du Ciel EnlevÈ l’Ambroisie en leurs chAmbres enclose, Ou, pour dire en FrAnÇAis lA chose,
AprÉs Que les ruches sAns miel
N’eurent plus Que lA Cire, on fit mAinte bougie; MAint Cierge Aussi fut fAÇonnÈ.
Un d’eux voyAnt lA terre en briQue Au feu durcie VAincre l’effort des Ans, il eut lA mAme envie; Et, nouvel EmpÈdocle Aux flAmmes condAmnÈ, PAr sA propre et pure folie,
Il se lAnÇA dedAns. Ce fut mAl rAisonnÈ; Ce Cierge ne sAvAit grAin de Philosophie.
Tout en tout est divers: ôtez-vous de l’esprit Qu’Aucun Atre Ait ÈtÈ composÈ sur le vôtre.
L’EmpÈdocle de Cire Au brAsier se fondit: Il n’ÈtAit pAs plus fou Que l’Autre.
IX,13 Jupiter et le PAssAger
O combien le pÈril enrichirAit les Dieux, Si nous nous souvenions des voeux Qu’il nous fAit fAire!
MAis, le pÈril pAssÈ, l’on ne se souvient guÉre De ce Qu’on A promis Aux Cieux:
On compte seulement ce Qu’on doit A lA terre.
Jupiter, dit l’impie, est un bon crÈAncier: Il ne se sert jAmAis d’Huissier.
– Eh! Qu’est-ce donc Que le tonnerre?
Comment Appelez-vous ces Avertissements?
Un PAssAger, pendAnt l’orAge,
AvAit vouÈ cent boeufs Au vAinQueur des TitAns.
Il n’en AvAit pAs un: vouer cent ElÈphAnts N’AurAit pAs co˚tÈ dAvAntAge.
Il br˚lA QuelQues os QuAnd il fut Au rivAge.
Au nez de Jupiter lA fumÈe en montA.
Sire Jupin, dit-il, prends mon voeu; le voilA: C’est un pArfum de Boeuf Que tA grAndeur respire.
LA fumÈe est tA pArt: je ne te dois plus rien.
Jupiter fit semblAnt de rire;
MAis AprÉs QuelQues jours le Dieu l’AttrApA bien, EnvoyAnt un songe lui dire
Qu’un tel trÈsor ÈtAit en tel lieu. L’homme Au voeu Courut Au trÈsor comme Au feu:
Il trouvA des voleurs, et n’AyAnt dAns sA bourse Qu’un Ècu pour toute ressource,
Il leur promit cent tAlents d’or,
Bien comptÈs, et d’un tel trÈsor:
On l’AvAit enterrÈ dedAns telle BourgAde.
L’endroit pArut suspect Aux voleurs, de fAÇon Qu’A notre prometteur l’un dit: Mon cAmArAde, Tu te moQues de nous, meurs, et vA chez Pluton Porter tes cent tAlents en don.
IX,14 Le ChAt et le RenArd
Le ChAt et le RenArd, comme beAux petits sAints, S’en AllAient en pÉlerinAge.
C’ÈtAient deux vrAis TArtufs, deux ArchipAtelins, Deux frAncs PAtte-pelus Qui, des frAis du voyAge, CroQuAnt mAinte volAille, escroQuAnt mAint fromAge, S’indemnisAient A Qui mieux mieux.
Le chemin ÈtAit long, et pArtAnt ennuyeux, Pour l’Accourcir ils disputÉrent.
LA dispute est d’un grAnd secours;
SAns elle on dormirAit toujours.
Nos pÉlerins s’ÈgosillÉrent.
AyAnt bien disputÈ, l’on pArlA du prochAin.
Le RenArd Au ChAt dit enfin:
Tu prÈtends Atre fort hAbile:
En sAis-tu tAnt Que moi? J’Ai cent ruses Au sAc.
– Non, dit l’Autre: je n’Ai Qu’un tour dAns mon bissAc, MAis je soutiens Qu’il en vAut mille.
Eux de recommencer lA dispute A l’envi, Sur le Que si, Que non, tous deux ÈtAnt Ainsi, Une meute ApAisA lA noise.
Le ChAt dit Au RenArd: Fouille en ton sAc, Ami: Cherche en tA cervelle mAtoise
Un strAtAgÉme s˚r. Pour moi, voici le mien.
A ces mots sur un Arbre il grimpA bel et bien.
L’Autre fit cent tours inutiles,
EntrA dAns cent terriers, mit cent fois en dÈfAut Tous les confrÉres de BrifAut.
PArtout il tentA des Asiles,
Et ce fut pArtout sAns succÉs:
LA fumÈe y pourvut, Ainsi Que les bAssets.
Au sortir d’un Terrier, deux chiens Aux pieds Agiles L’ÈtrAnglÉrent du premier bond.
Le trop d’expÈdients peut g‚ter une AffAire; On perd du temps Au choix, on tente, on veut tout fAire.
N’en Ayons Qu’un, mAis Qu’il soit bon.
IX,15 Le MAri, lA Femme, et le Voleur
Un MAri fort Amoureux,
Fort Amoureux de sA Femme,
Bien Qu’il f˚t jouissAnt, se croyAit mAlheureux.
JAmAis oeillAde de lA DAme,
Propos flAtteur et grAcieux,
Mot d’AmitiÈ, ni doux sourire,
DÈifiAnt le pAuvre Sire,
N’AvAient fAit soupÇonner Qu’il f˚t vrAiment chÈri.
Je le crois, c’ÈtAit un mAri.
Il ne tint point A l’hymÈnÈe
Que content de sA destinÈe
Il n’en remerci‚t les Dieux;
MAis Quoi? Si l’Amour n’AssAisonne
Les plAisirs Que l’hymen nous donne,
Je ne vois pAs Qu’on en soit mieux.
Notre Èpouse ÈtAnt donc de lA sorte b‚tie, Et n’AyAnt cAressÈ son mAri de sA vie,
Il en fAisAit sA plAinte une nuit. Un voleur Interrompit lA dolÈAnce.
LA pAuvre femme eut si grAnd’peur
Qu’elle cherchA QuelQue AssurAnce
Entre les brAs de son Èpoux.
Ami Voleur, dit-il, sAns toi ce bien si doux Me serAit inconnu. Prends donc en rÈcompense Tout ce Qui peut chez nous Atre A tA biensÈAnce; Prends le logis Aussi. Les voleurs ne sont pAs Gens honteux, ni fort dÈlicAts:
Celui-ci fit sA mAin. J’infÉre de ce conte Que lA plus forte pAssion
C’est lA peur: elle fAit vAincre l’Aversion, Et l’Amour QuelQuefois; QuelQuefois il lA dompte; J’en Ai pour preuve cet AmAnt
Qui br˚lA sA mAison pour embrAsser sA DAme, L’emportAnt A trAvers lA flAmme.
J’Aime Assez cet emportement;
Le conte m’en A plu toujours infiniment: Il est bien d’une ‚me EspAgnole,
Et plus grAnde encore Que folle.
IX,16 Le TrÈsor et les deux Hommes
Un Homme n’AyAnt plus ni crÈdit, ni ressource, Et logeAnt le DiAble en sA bourse,
C’est-A-dire, n’y logeAnt rien,
S’imAginA Qu’il ferAit bien
De se pendre, et finir lui-mAme sA misÉre, PuisQue Aussi bien sAns lui lA fAim le viendrAit fAire, Genre de mort Qui ne duit pAs
A gens peu curieux de go˚ter le trÈpAs.
DAns cette intention, une vieille mAsure Fut lA scÉne oA devAit se pAsser l’Aventure.
Il y porte une corde, et veut Avec un clou Au hAut d’un certAin mur AttAcher le licou.
LA murAille, vieille et peu forte,
S’ÈbrAnle Aux premiers coups, tombe Avec un trÈsor.
Notre dÈsespÈrÈ le rAmAsse, et l’emporte, LAisse lA le licou, s’en retourne Avec l’or, SAns compter: ronde ou non, lA somme plut Au sire.
TAndis Que le gAlAnt A grAnds pAs se retire, L’homme Au trÈsor Arrive, et trouve son Argent Absent.
Quoi, dit-il, sAns mourir je perdrAi cette somme?
Je ne me pendrAi pAs? Et vrAiment si ferAi, Ou de corde je mAnQuerAi.
Le lAcs ÈtAit tout prAt; il n’y mAnQuAit Qu’un homme: Celui-ci se l’AttAche, et se pend bien et beAu.
Ce Qui le consolA peut-Atre
Fut Qu’un Autre e˚t pour lui fAit les frAis du cordeAu.
Aussi bien Que l’Argent le licou trouvA mAAtre.
L’AvAre rArement finit ses jours sAns pleurs: Il A le moins de pArt Au trÈsor Qu’il enserre, ThÈsAurisAnt pour les voleurs,
Pour ses pArents, ou pour lA terre.
MAis Que dire du troc Que lA fortune fit?
Ce sont lA de ses trAits; elle s’en divertit.
Plus le tour est bizArre, et plus elle est contente.
Cette DÈesse inconstAnte
Se mit Alors en l’esprit
De voir un homme se pendre;
Et celui Qui se pendit
S’y devAit le moins Attendre.
IX,17 Le Singe et le ChAt
BertrAnd Avec RAton, l’un Singe et l’Autre ChAt, CommensAux d’un logis, AvAient un commun MAAtre.
D’AnimAux mAlfAisAnts c’ÈtAit un trÉs bon plAt; Ils n’y crAignAient tous deux Aucun, Quel Qu’il p˚t Atre.
TrouvAit-on QuelQue chose Au logis de g‚tÈ, L’on ne s’en prenAit point Aux gens du voisinAge.
BertrAnd dÈrobAit tout; RAton de son côtÈ
EtAit moins Attentif Aux souris Qu’Au fromAge.
Un jour Au coin du feu nos deux mAAtres fripons RegArdAient rôtir des mArrons.
Les escroQuer ÈtAit une trÉs bonne AffAire: Nos gAlAnds y voyAient double profit A fAire, Leur bien premiÉrement, et puis le mAl d’Autrui.
BertrAnd dit A RAton: FrÉre, il fAut Aujourd’hui Que tu fAsses un coup de mAAtre.
Tire-moi ces mArrons. Si Dieu m’AvAit fAit nAAtre Propre A tirer mArrons du feu,
Certes mArrons verrAient beAu jeu.
Aussitôt fAit Que dit: RAton Avec sA pAtte, D’une mAniÉre dÈlicAte,
EcArte un peu lA cendre, et retire les doigts, Puis les reporte A plusieurs fois;
Tire un mArron, puis deux, et puis trois en escroQue.
Et cependAnt BertrAnd les croQue.
Une servAnte vient: Adieu mes gens. RAton N’ÈtAit pAs content, ce dit-on.
Aussi ne le sont pAs lA plupArt de ces Princes Qui, flAttÈs d’un pAreil emploi,
Vont s’ÈchAuder en des Provinces
Pour le profit de QuelQue Roi.
IX,18 Le MilAn et le Rossignol
AprÉs Que le MilAn, mAnifeste voleur,
Eut rÈpAndu l’AlArme en tout le voisinAge Et fAit crier sur lui les enfAnts du villAge, Un Rossignol tombA dAns ses mAins, pAr mAlheur.
Le hÈrAut du Printemps lui demAnde lA vie: Aussi bien Que mAnger en Qui n’A Que le son?
Ecoutez plutôt mA chAnson;
Je vous rAconterAi TÈrÈe et son envie.
– Qui, TÈrÈe? est-ce un mets propre pour les MilAns?
– Non pAs; c’ÈtAit un Roi dont les feux violents Me firent ressentir leur Ardeur criminelle: Je m’en vAis vous en dire une chAnson si belle Qu’elle vous rAvirA: mon chAnt plAAt A chAcun.
Le MilAn Alors lui rÈpliQue:
VrAiment, nous voici bien: lorsQue je suis A jeun, Tu me viens pArler de musiQue.
– J’en pArle bien Aux rois.- QuAnd un roi te prendrA, Tu peux lui conter ces merveilles.
Pour un milAn, il s’en rirA:
Ventre AffAmÈ n’A point d’oreilles.
IX,19 Le Berger et son troupeAu
Quoi? toujours il