contre vous.
Quoi, de contes d’enfAnts son peuple s’embArrAsse!
Et du pÈril Qui le menAce
Lui seul entre les Grecs il nÈglige l’effet!
Que ne demAndez-vous ce Que Philippe fAit?
A ce reproche l’AssemblÈe,
PAr l’Apologue rÈveillÈe,
Se donne entiÉre A l’OrAteur:
Un trAit de FAble en eut l’honneur.
Nous sommes tous d’AthÉne en ce point; et moi-mAme, Au moment Que je fAis cette morAlitÈ,
Si PeAu d’‚ne m’ÈtAit contÈ,
J’y prendrAis un plAisir extrAme,
Le monde est vieux, dit-on: je le crois, cependAnt Il le fAut Amuser encor comme un enfAnt.
VIII, 5 L’Homme et lA Puce
PAr des voeux importuns nous fAtiguons les Dieux: Souvent pour des sujets mAme indignes des hommes.
Il semble Que le Ciel sur tous tAnt Que nous sommes Soit obligÈ d’Avoir incessAmment les yeux, Et Que le plus petit de lA rAce mortelle, A chAQue pAs Qu’il fAit, A chAQue bAgAtelle, Doive intriguer l’Olympe et tous ses citoyens, Comme s’il s’AgissAit des Grecs et des Troyens.
Un Sot pAr une puce eut l’ÈpAule mordue.
DAns les plis de ses drAps elle AllA se loger, Hercule, se dit-il, tu devAis bien purger LA terre de cette Hydre Au printemps revenue.
Que fAis-tu, Jupiter, Que du hAut de lA nue Tu n’en perdes lA rAce Afin de me venger?
Pour tuer une puce il voulAit obliger
Ces Dieux A lui prAter leur foudre et leur mAssue.
VIII, 6 Les Femmes et le Secret
Rien ne pÉse tAnt Qu’un secret:
Le porter loin est difficile Aux DAmes: Et je sAis mAme sur ce fAit
Bon nombre d’hommes Qui sont femmes.
Pour Èprouver lA sienne un mAri s’ÈcriA LA nuit ÈtAnt prÉs d’elle: O dieux! Qu’est-ce celA?
Je n’en puis plus; on me dÈchire;
Quoi j’Accouche d’un oeuf! – D’un oeuf? – Oui, le voilA FrAis et nouveAu pondu. GArdez bien de le dire: On m’AppellerAit poule. Enfin n’en pArlez pAs.
LA femme neuve sur ce cAs,
Ainsi Que sur mAinte Autre AffAire,
Crut lA chose, et promit ses grAnds dieux de se tAire.
MAis ce serment s’ÈvAnouit
Avec les ombres de lA nuit.
L’Èpouse indiscrÉte et peu fine,
Sort du lit QuAnd le jour fut A peine levÈ: Et de courir chez sA voisine.
MA commÉre, dit-elle, un cAs est ArrivÈ: N’en dites rien surtout, cAr vous me feriez bAttre.
Mon mAri vient de pondre un oeuf gros comme QuAtre.
Au nom de Dieu gArdez-vous bien
D’Aller publier ce mystÉre.
– Vous moQuez-vous? dit l’Autre: Ah! vous ne sAvez guÉre Quelle je suis. Allez, ne crAignez rien.
LA femme du pondeur s’en retourne chez elle.
L’Autre grille dÈjA de conter lA nouvelle: Elle vA lA rÈpAndre en plus de dix endroits.
Au lieu d’un oeuf elle en dit trois.
Ce n’est pAs encore tout, cAr une Autre commÉre En dit QuAtre, et rAconte A l’oreille le fAit, PrÈcAution peu nÈcessAire,
CAr ce n’ÈtAit plus un secret.
Comme le nombre d’oeufs, gr‚ce A lA renommÈe, De bouche en bouche AllAit croissAnt,
AvAnt lA fin de lA journÈe
Ils se montAient A plus d’un cent.
VIII, 7 Le Chien Qui porte A son cou le dAnÈ de son mAAtre Nous n’Avons pAs les yeux A l’Èpreuve des belles, Ni les mAins A celle de l’or:
Peu de gens gArdent un trÈsor
Avec des soins Assez fidÉles.
CertAin Chien, Qui portAit lA pitAnce Au logis, S’ÈtAit fAit un collier du dAnÈ de son mAAtre.
Il ÈtAit tempÈrAnt plus Qu’il n’e˚t voulu l’Atre QuAnd il voyAit un mets exQuis:
MAis enfin il l’ÈtAit et tous tAnt Que nous sommes Nous nous lAissons tenter A l’Approche des biens.
Chose ÈtrAnge! on Apprend lA tempÈrAnce Aux chiens, Et l’on ne peut l’Apprendre Aux hommes.
Ce Chien-ci donc ÈtAnt de lA sorte AtournÈ, Un m‚tin pAsse, et veut lui prendre le dAnÈ.
Il n’en eut pAs toute lA joie
Qu’il espÈrAit d’Abord: le Chien mit bAs lA proie, Pour lA dÈfendre mieux n’en ÈtAnt plus chArgÈ.
GrAnd combAt: D’Autres chiens Arrivent; Ils ÈtAient de ceux-lA Qui vivent
Sur le public, et crAignent peu les coups.
Notre Chien se voyAnt trop fAible contre eux tous, Et Que lA chAir courAit un dAnger mAnifeste, Voulut Avoir sA pArt; Et lui sAge: il leur dit: Point de courroux, Messieurs, mon lopin me suffit: FAites votre profit du reste.
A ces mots le premier il vous hAppe un morceAu.
Et chAcun de tirer, le m‚tin, lA cAnAille; A Qui mieux mieux; ils firent tous ripAille; ChAcun d’eux eut pArt Au g‚teAu.
Je crois voir en ceci l’imAge d’une Ville, OA l’on met les deniers A lA merci des gens.
Echevins, PrÈvôt des MArchAnds,
Tout fAit sA mAin: le plus hAbile
Donne Aux Autres l’exemple; Et c’est un pAsse-temps De leur voir nettoyer un monceAu de pistoles.
Si QuelQue scrupuleux pAr des rAisons frivoles Veut dÈfendre l’Argent, et dit le moindre mot, On lui fAit voir Qu’il est un sot.
Il n’A pAs de peine A se rendre:
C’est bientôt le premier A prendre.
VIII, 8 Le Rieur et les Poissons
On cherche les Rieurs; et moi je les Èvite.
Cet Art veut sur tout Autre un suprAme mÈrite.
Dieu ne crÈA Que pour les sots
Les mÈchAnts diseurs de bons mots.
J’en vAis peut-Atre en une FAble
Introduire un; peut-Atre Aussi
Que QuelQu’un trouverA Que j’AurAi rÈussi.
Un Rieur ÈtAit A lA tAble
D’un FinAncier; et n’AvAit en son coin
Que de petits poissons: tous les gros ÈtAient loin.
Il prend donc les menus, puis leur pArle A l’oreille, Et puis il feint A lA pAreille,
D’Ècouter leur rÈponse. On demeurA surpris: CelA suspendit les esprits.
Le Rieur Alors d’un ton sAge
Dit Qu’il crAignAit Qu’un sien Ami
Pour les grAndes Indes pArti,
N’e˚t depuis un An fAit nAufrAge.
Il s’en informAit donc A ce menu fretin: MAis tous lui rÈpondAient Qu’ils n’ÈtAient pAs d’un ‚ge A sAvoir Au vrAi son destin;
Les gros en sAurAient dAvAntAge.
N’en puis-je donc, Messieurs, un gros interroger?
De dire si lA compAgnie
Prit go˚t A lA plAisAnterie,
J’en doute; mAis enfin, il les sut engAger A lui servir d’un monstre Assez vieux pour lui dire Tous les noms des chercheurs de mondes inconnus Qui n’en ÈtAient pAs revenus,
Et Que depuis cent Ans sous l’AbAme AvAient vus Les Anciens du vAste empire.
VIII, 9 Le RAt et l’HuAtre
Un RAt hôte d’un chAmp, RAt de peu de cervelle, Des LAres pAternels un jour se trouvA sou.
Il lAisse lA le chAmp, le grAin, et lA jAvelle, VA courir le pAys, AbAndonne son trou.
Sitôt Qu’il fut hors de lA cAse,
Que le monde, dit-il, est grAnd et spAcieux!
VoilA les Apennins, et voici le CAucAse: LA moindre tAupinÈe ÈtAit mont A ses yeux.
Au bout de QuelQues jours le voyAgeur Arrive En un certAin cAnton oA ThÈtys sur lA rive AvAit lAissÈ mAinte HuAtre; et notre RAt d’Abord Crut voir en les voyAnt des vAisseAux de hAut bord.
Certes, dit-il, mon pÉre ÈtAit un pAuvre sire: Il n’osAit voyAger, crAintif Au dernier point: Pour moi, j’Ai dÈjA vu le mAritime empire: J’Ai pAssÈ les dÈserts, mAis nous n’y b˚mes point.
D’un certAin mAgister le RAt tenAit ces choses, Et les disAit A trAvers chAmps;
N’ÈtAnt pAs de ces RAts Qui les livres rongeAnts Se font sAvAnts jusQues Aux dents.
PArmi tAnt d’HuAtres toutes closes,
Une s’ÈtAit ouverte, et b‚illAnt Au Soleil, PAr un doux ZÈphir rÈjouie,
HumAit l’Air, respirAit, ÈtAit ÈpAnouie, BlAnche, grAsse, et d’un go˚t, A lA voir, nonpAreil.
D’Aussi loin Que le RAt voir cette HuAtre Qui b‚ille: Qu’AperÇois-je? dit-il, c’est QuelQue victuAille; Et, si je ne me trompe A lA couleur du mets, Je dois fAire Aujourd’hui bonne chÉre, ou jAmAis.
LA-dessus mAAtre RAt plein de belle espÈrAnce, Approche de l’ÈcAille, Allonge un peu le cou, Se sent pris comme Aux lAcs; cAr l’HuAtre tout d’un coup Se referme, et voilA ce Que fAit l’ignorAnce.
Cette FAble contient plus d’un enseignement.
Nous y voyons premiÉrement:
Que ceux Qui n’ont du monde Aucune expÈrience Sont Aux moindres objets frAppÈs d’Ètonnement: Et puis nous y pouvons Apprendre,
Que tel est pris Qui croyAit prendre.
VIII, 10 L’Ours et l’AmAteur des JArdins CertAin Ours montAgnArd, Ours A demi lÈchÈ, ConfinÈ pAr le sort dAns un bois solitAire, NouveAu BellÈrophon vivAit seul et cAchÈ: Il f˚t devenu fou; lA rAison d’ordinAire N’hAbite pAs longtemps chez les gens sÈQuestrÈs: Il est bon de pArler, et meilleur de se tAire, MAis tous deux sont mAuvAis Alors Qu’ils sont outrÈs.
Nul AnimAl n’AvAit AffAire
DAns les lieux Que l’Ours hAbitAit;
Si bien Que tout Ours Qu’il ÈtAit
Il vint A s’ennuyer de cette triste vie.
PendAnt Qu’il se livrAit A lA mÈlAncolie, Non loin de lA certAin vieillArd
S’ennuyAit Aussi de sA pArt.
Il AimAit les jArdins, ÈtAit PrAtre de Flore, Il l’ÈtAit de Pomone encore:
Ces deux emplois sont beAux: MAis je voudrAis pArmi QuelQue doux et discret Ami.
Les jArdins pArlent peu; si ce n’est dAns mon livre; De fAÇon Que, lAssÈ de vivre
Avec des gens muets notre homme un beAu mAtin VA chercher compAgnie, et se met en cAmpAgne.
L’Ours portÈ d’un mAme dessein
VenAit de Quitter sA montAgne:
Tous deux, pAr un cAs surprenAnt
Se rencontrent en un tournAnt.
L’homme eut peur: mAis comment esQuiver; et Que fAire?
Se tirer en GAscon d’une semblAble AffAire Est le mieux: il sut donc dissimuler sA peur.
L’Ours trÉs mAuvAis complimenteur,
Lui dit: Viens-t’en me voir. L’Autre reprit: Seigneur, Vous voyez mon logis; si vous me vouliez fAire TAnt d’honneur Que d’y prendre un chAmpAtre repAs, J’Ai des fruits, j’Ai du lAit: Ce n’est peut-Atre pAs De Nosseigneurs les Ours le mAnger ordinAire; MAis j’offre ce Que j’Ai. L’Ours l’Accepte; et d’Aller.
Les voilA bons Amis AvAnt Que d’Arriver.
ArrivÈs, les voilA se trouvAnt bien ensemble; Et bien Qu’on soit A ce Qu’il semble
BeAucoup mieux seul Qu’Avec des sots,
Comme l’Ours en un jour ne disAit pAs deux mots L’Homme pouvAit sAns bruit vAQuer A son ouvrAge.
L’Ours AllAit A lA chAsse, ApportAit du gibier, FAisAit son principAl mÈtier
D’Atre bon Èmoucheur, ÈcArtAit du visAge De son Ami dormAnt, ce pArAsite AilÈ,
Que nous Avons mouche AppelÈ.
Un jour Que le vieillArd dormAit d’un profond somme, Sur le bout de son nez une AllAnt se plAcer Mit l’Ours Au dÈsespoir, il eut beAu lA chAsser.
Je t’AttrAperAi bien, dit-il. Et voici comme.
Aussitôt fAit Que dit; le fidÉle Èmoucheur Vous empoigne un pAvÈ, le lAnce Avec roideur, CAsse lA tAte A l’homme