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    2. Dans les mers du sud
    3. Chapitre 51
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    lui, (en l’honneur, je suppose, de la reine Victoria). Une chaleur lourde, étouffante, régnait sous le toit de zinc, et l’air était chargé du parfum des guirlandes. De fines nattes autour des reins, des fibres de noix de coco roulées en anneaux autour de leurs doigts, et couronnés de feuilles jaunes, les chanteurs étaient assis par compagnies sur le sol. Un nombre varié de solistes étaient debout, pour chanter diverses chansons, et ils remplissaient, dans l’ensemble, le rôle principal. Mais toutes les compagnies, même sans chanter, contribuaient continuellement à l’effet général et marquaient la mesure, mimant, grimaçant, levant leurs têtes, leurs yeux, agitant les plumes fixées au bout de leurs doigts, claquant des mains ou se frappant le sein gauche avec un son de timbale. La cadence était exquise, la musique barbare, mais pleine d’un art conscient. J’ai noté quelques formules constamment employées. Ainsi, un changement (de clef, je crois) survenait subitement, sans changement de mesure, mais amplifié par une élévation soudaine et dramatique des voix et un balancement des gestes général. Les voix des solistes s’élevaient chacune sur une note différente, terriblement discordantes, puis se rapprochaient graduellement jusqu’à l’unisson ; et quand elles l’avaient atteint, le chœur entier se joignait à elles et les dominait. Parfois, le mouvement habituel des voix, précipité, rauque et anti-mélodieux était rompu et exalté par un courant de mélodie en forme de psaume, souvent bien construite, ou paraissant telle par contraste. La mesure était très variable et, vers la fin de chaque morceau, quand le rythme devenait pressé et furieux, cette figure revenait :

    On peut difficilement concevoir à quel feu, quel mouvement endiablé ils arrivent dans ces finales martelées ; tout marche ensemble, les voix, les têtes, les yeux, les feuillages et les anneaux ailés des doigts ; sous les regards, le chœur oscille ; les chants palpitent aux oreilles ; les visages sont convulsés par les efforts et l’enthousiasme.

    Tout à coup, la troupe se leva tout d’une pièce, les tambours formant un demi-cercle autour des solistes, ceux-ci au nombre de cinq et quelquefois plus. Les chansons qui suivirent étaient extrêmement dramatiques ; quoique personne ne pût me donner aucune explication, je devinai de temps en temps quelque indice obscur, mais décisif, d’une intrigue, qui me rappelait certaines scènes de disputes de nos grands opéras ; ainsi les voix isolées s’élèvent de la masse et y retombent ; ainsi les acteurs se séparent, se rassemblent, brandissent leurs mains en l’air, et lèvent les yeux au ciel, – ou vers la galerie ! Déjà ceci dépasse le modèle Thespien ; l’art de ce peuple a dépassé l’état embryonnaire ; le chant, la danse, les tambours, les quartettes et les soli : c’est le drame pleinement développé, quoique encore en miniature. De toutes les danses ainsi nommées des mers du Sud, celle que j’ai vue à Butaritari est la principale. La hula, telle que les globe-trotters affolés peuvent la voir à Honolulu, est sûrement la plus ennuyeuse des inventions humaines, et le spectateur, tandis qu’elle se déroule, interminable, bâille comme à une lecture du collège ou à un débat du Parlement. Mais la danse des îles Gilbert captive l’esprit ; elle frémit, excite, subjugue ; elle possède l’essence de tout art, une signification inexplorée, imminente.

    Là, où un si grand nombre de personnes sont engagées et où toutes doivent faire (à un moment donné), le même mouvement rapide, précis et souvent arbitraire, le travail préparatoire est extrême. Mais ils commencent tout jeunes. On peut voir souvent dans un maniap’ un homme et un enfant : l’homme chantant et gesticulant, l’enfant debout devant lui, ruisselant de larmes, et copiant en tremblant ses gestes et ses chants ; c’est l’artiste des îles Gilbert apprenant (comme font tous les artistes) son art dans la souffrance.

    Je parais peut-être trop enthousiaste ; voici un passage du Journal de ma femme qui prouve que je ne fus pas seul ému, et qui complète le tableau : « Le conducteur donna le signal et tous les danseurs, agitant leurs bras, balançant leur corps et se frappant la poitrine en mesure, ouvrirent la danse en forme d’introduction. Les artistes restèrent assis, excepté deux et une fois trois, deux fois un seul des solistes. Ceux-ci alors restaient debout, au milieu du groupe, faisant un léger mouvement avec les pieds, et leurs corps frissonnant en mesure tandis qu’ils chantaient. Après l’introduction il y eut une pause, puis la véritable trame de l’opéra – car ce n’était pas moins – commença de se dérouler ; un opéra où chaque chanteur se montrait un acteur parfait. Le premier sujet, dans une extase passionnée qui le possédait de la tête aux pieds, semblait transfiguré. Un moment, on eût dit qu’un vent violent passait sur l’estrade ; – leurs bras, leurs doigts empennés frissonnant d’une émotion qui s’empara de mes nerfs : têtes et corps suivaient comme un champ de blé sous une rafale. Je sentis mon sang bouillonner, puis se glacer ; des larmes me venaient aux yeux, ma tête tournait, une impulsion presque irrésistible me poussait à me joindre aux danseurs. Je crois avoir assez bien compris un des drames. Un vieillard fier et sauvage prit la partie de solo. Il chanta la naissance d’un prince, et comme sa mère le berçait tendrement dans ses bras ; son enfance, quand il dépassait tous ses compagnons dans l’art de nager, de grimper et dans tous les sports athlétiques ; sa jeunesse, quand il allait sur la mer, dans son bateau et Péchait ; son âge d’homme quand il épousa une femme qui, à son tour, berça un enfant dans ses bras. Puis vinrent les alarmes de la guerre ; puis une grande bataille dont l’issue, quelque temps, demeura douteuse ; mais le héros était victorieux comme toujours, et aux transports indicibles des vainqueurs. la pièce se termina. Il y avait aussi des pièces comiques qui provoquèrent beaucoup de gaieté. Pendant l’une d’elles, un vieillard qui était derrière moi, me saisit par le bras, me menaça du doigt avec un sourire malin et murmura quelque chose avec un ricanement qui me parut signifier : « Oh ! vous femmes ! vous femmes ! c’est aussi vrai de vous toutes. » Et je crains qu’il ne s’agit pas là d’un compliment. À aucun moment nous ne saisîmes le moindre signe de la vilaine indécence des îles orientales. Tout était poésie pure et simple. La musique elle-même était aussi complexe que la nôtre, quoique construite sur une base entièrement différente ; une ou deux fois je fus surprise par un éclair de quelque chose qui ressemblait étrangement à notre meilleure musique sacrée, mais pour un instant seulement. À la fin, il y eut une pause plus longue, et cette fois, tous les danseurs furent sur pied. L’intérêt allait croissant à mesure que le drame se déroulait. Les acteurs s’adressèrent les uns aux autres, puis à l’auditoire, puis au ciel ! ils prirent conseil les uns des autres ; les conspirateurs se groupèrent ensemble ; c’était tout à fait un opéra, les tambours intervenant à des intervalles propres, le ténor, le baryton, la basse, tous à leur place, – seulement les voix étaient toutes du même calibre. Une femme chanta à un moment, du dernier rang, avec une très jolie voix de contralto, gâtée parce qu’elle la rendait artificiellement nasillarde ; et je remarque que toutes les femmes ont ce défaut désagréable. Une autre fois, le solo fut chanté par un garçon d’une beauté angélique ; une autre, fois encore, un enfant de six à huit ans, sans doute un petit phénomène, fut placé au centre. Le pauvre petit semblait, au début, désespérément effrayé et embarrassé ; mais vers la fin il prit feu et déploya un grand talent dramatique. Les changements d’expression sur la figure des danseurs étaient si éloquents qu’il y avait, semblait-il, une vraie stupidité à ne pas les comprendre. »

    Notre voisin à cette représentation, Karaïti, met quelque peu en valeur, par comparaison, Sa Majesté Butaritarienne, dans sa silhouette et ses traits, étant comme elle corpulent, barbu et oriental. Moralement, il parait être tout l’opposé : alerte, souriant, jovial, plaisant et industrieux. Chez lui, dans son île, il travaille en personne comme un esclave et fait travailler son peuple comme un surveillant d’esclaves. Il s’intéresse aux idées. Georges, le négociant, lui ayant parlé de machines volantes : « Est-ce vrai, Georges ? » demanda-t-il. – « C’est dans les journaux », répliqua Georges. – « Eh bien », dit Karaïti, « si cet homme peut faire cela avec une machine, moi, je peux le faire sans machine. » Il dessina et fabriqua une paire d’ailes, les attacha à ses épaules, alla au bout d’une jetée, se lança dans l’espace et tomba lourdement dans la mer. Ses femmes le repêchèrent car les ailes l’empêchaient de nager. « Georges », – dit-il, en s’arrêtant tandis qu’il allait se changer, – « Georges, vous mentez. » Il avait huit épouses, car son royaume était encore soumis aux anciennes coutumes ; mais il montra quelque embarras quand on expliqua cela à ma femme. « Dites-lui que je n’en ai amené qu’une ici », dit-il avec angoisse. Tel qu’il était, ce Douglas noir nous plaisait beaucoup ; et comme nous entendions de nouveaux détails sur le malaise du Roi, et remarquions aussi que toutes les armes de la Résidence d’été avaient été cachées, nous observions avec une admiration d’autant plus grande la cause de toutes ces anxiétés, roulant sur ses grandes jambes avec sa large face souriante apparemment sans armes, et certainement sans escorte, à travers la ville hostile. Le Douglas Rouge, Kuma le bedonnant, ayant

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