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    2. Dans les mers du sud
    3. Chapitre 43
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    tout épouses et reines et nul homme n’avait le droit de porter ses regards sur leur visage. Comme le basilic, elles donnaient la mort par leur seul regard, et pour un coup d’œil involontaire jeté sur une de ces femmes-matelots on était fouetté jusqu’au sang. Aux jours de Nakaeia, le palais était entouré de hauts cocotiers qui en défendaient l’entrée. Il advint qu’un soir, tandis que Nakaeia était assis en bas, soupant avec ses femmes, le propriétaire du bois était perché au sommet d’un arbre, récoltant du vin de palme ; le hasard lui fit abaisser les yeux au moment où le Roi levait les siens, et leurs regards se rencontrèrent. Seule une fuite instantanée sauva le criminel. Mais pendant tout le reste du règne il dut se cacher avec le secours d’amis à lui, dans les parties de l’île les plus reculées ; Nakaeia le poursuivit sans merci, quoique toujours en vain ; et les palmiers, complices de l’aventure, furent abattus sans pitié. Tel était l’idéal de la pureté féminine dans une île où les vierges nubiles se promenaient nues comme au Paradis. Et pourtant le scandale pénétra dans le harem si bien gardé de Nakaeia. Il était alors propriétaire d’une goélette dont il se servait comme d’un bateau de plaisance, logeant à bord tandis qu’elle était à l’ancre ; c’est là qu’un jour il convoqua une nouvelle épouse. Elle lui avait été réservée, car il avait épousé sa sœur, et le mari d’une sœur aînée pouvait s’attribuer de ce fait toutes les cadettes. Elle fut parée pour la circonstance ; elle vint, parfumée, enguirlandée, couverte de fines nattes et de bijoux de famille : pour les épousailles, pensaient ses amies, – pour mourir, comme elle le savait bien. « Dites-moi son nom et je vous épargnerai », dit Nakaeia. Mais la jeune fille était loyale ; elle resta muette, sauva son amant, et les reines l’étranglèrent entre leurs nattes.

    Nakaeia était craint ; il ne semble pas qu’il fût haï. Certains actes qui ont pour nous un parfum de meurtre revêtaient aux yeux de ses sujets l’aspect respectable de la justice ; ses orgies le rendaient populaire ; les naturels évoquent encore la fermeté de son gouvernement ; et les blancs eux-mêmes, qu’il combattit longtemps et tint à distance, le nomment (dans la phrase canonique des mers du Sud) « un parfait gentleman lorsque sobre ».

    Lorsqu’il fut couché sans espoir sur le lit de la mort, il fit venir son frère Nantéitéi, lui tint un discours sur la politique royale et l’avertit qu’il était trop faible pour régner. L’avertissement fut pris à cœur, et pendant quelque temps le gouvernement subsista sur le modèle de celui de Nakaeia. Nantéitéi supprima ses gardes et arpentait le pays seul, avec un revolver dans une sacoche de cuir. Pour dissimuler sa faiblesse, il affectait un silence rigoureux ; vous pouviez lui parler un jour entier : avis, reproches, appels et menaces demeuraient également sans réponse. Le nombre de ses femmes s’élevait à dix-sept ; beaucoup d’entre elles étaient des héritières ; car la maison royale est pauvre et le mariage était en ces jours un des principaux moyens employés pour consolider le trône. Nakaeia occupait son harem à son profit ; Nantéitéi le louait volontiers au service d’autrui. C’est ainsi que sous son règne MM. Wightman construisirent une jetée avec une véranda au nord-est de la ville. La maçonnerie fut l’œuvre des dix-sept reines qui travaillèrent et pataugèrent là comme de jeunes pêcheuses ; mais l’homme désigné pour faire la toiture ne put commencer avant qu’elles eussent fini, dans la crainte qu’abaissant les yeux par hasard, il ne les aperçut.

    Ce fut peut-être la dernière apparition de la troupe du harem. Depuis quelque temps déjà des missionnaires hawaïens étaient installés à Butaritari – Maka et Kanoa, deux hommes puérils et excellents. Nakaeia ne voulut rien savoir de leurs doctrines ; peut-être était-il jaloux de leur présence ; étant humain, il avait quelque affection pour leurs personnes. Un jour, dans sa maison, sous les yeux de Kanoa, il mit à mort trois matelots d’Oahu, accroupi sur leur dos pour les poignarder et menaçant le missionnaire s’il intervenait ; cependant, non seulement il l’épargna sur le moment, mais le rappela (quand il eut pris la fuite), avec quelques expressions de respect. Nantéitéi, l’homme faible, tomba plus complètement sous le charme. Maka, enjoué, affectueux – et pourtant très strict dans sa profession, – prit sur le Roi une influence qui grandit et devint très vite absolue. Nantéitéi se convertit publiquement avec toute la maison royale ; et, avec une sévérité que les missionnaires libéraux désavouent, le harem fut immédiatement supprimé. Ce fut un acte un peu radical. Le trône se trouva par-là appauvri, son influence ébranlée, les familles des reines humiliées et seize femmes de chefs (dont quelques-unes très fortunées), jetées en bloc sur le marché. J’ai été camarade de bord d’un matelot hawaïen qui avait épousé successivement deux de ces veuves impromptu et divorça les deux fois à cause de leur inconduite. Que deux riches grandes dames (car ces deux-là étaient riches) aient épousé « un homme d’une autre île », cela prouve la dissolution de la société. De plus, les lois furent complètement remaniées et pas toutes pour le mieux. J’aime Maka en tant qu’homme ; en tant que législateur il a deux défauts : il est faible dans la punition des crimes, sévère dans la répression des plaisirs innocents.

    La guerre et la révolution sont les suites habituelles des réformes ; cependant, Nantéitéi mourut (d’une trop haute dose de chloroforme) dans la tranquille possession de son trône, et c’est sous le règne du troisième frère, Nabakatokia, un homme brave de sa personne, mais faible de caractère, que la tempête éclata. Le gouvernement des grands chefs et des notables semble avoir toujours soutenu la monarchie et alterné avec elle. Les « Vieux Hommes » (comme on les appelait), ont le droit de siéger avec le Roi au Parlement et de discuter ; et la principale supériorité du Roi est une sorte de conclusion : « La séance est terminée. » Après la longue autocratie de Nakaiea, et l’évolution, de Nantéitéi, les Vieux-Hommes s’étaient lassés, sans doute, de l’obscurité dans laquelle ils étaient relégués, et étaient, en plus, jaloux de l’influence de Maka. La calomnie, ou plutôt la caricature, fut appelée à la rescousse ; une charge fit le tour de la société ; Maka était accusé d’avoir dit à l’église que le Roi était le premier homme dans l’île et lui le second ; piqués au vif par cet affront supposé, les chefs se rebellèrent ouvertement et levèrent des troupes. Dans l’espace d’un matin, le trône de Nakaeia fut renversé dans la poussière. Le Roi était assis dans le maniap’, devant la grille du palais, guettant ses recrues ; Maka à ses côtés ; tous deux anxieux ; et pendant ce temps, au seuil d’une maison, à l’entrée du nord de la ville, un chef avait pris position et détourné les secours au fur et à mesure qu’ils arrivaient. Ils venaient solitaires ou par groupes, chacun avec son fusil ou son pistolet passé en bandoulière. « Où allez-vous ? » demandait le chef. « Le Roi nous a appelés », répondaient-ils. « Voici votre place ; asseyez-vous », répliquait le chef. Tous obéirent avec une incroyable déloyauté ; et des forces suffisantes ayant été ainsi rassemblées des deux côtés, Nabakato-kia fut sommé de se rendre et déposé. À peu près à cette époque, dans presque toutes les parties du groupe, les rois furent massacrés ; et à Tapituea, le squelette du dernier d’entre eux est encore, en ce jour, suspendu dans le Parlement principal de l’île, comme une menace à toute ambition. Nabakatokia fut plus heureux ; la vie et l’appareil royal lui furent, concédés, mais il fut dépouillé du pouvoir. Les Vieux-Hommes s’offrirent un régal de discours publics ; les lois furent constamment transformées ; jamais exécutées ; le peuple eut plus d’un sujet de regretter les mérites de Nakaiea ; et le Roi, privé de la ressource de faire de riches mariages, privé aussi des services d’une troupe de femmes, s’enfonça, non seulement dans la déconsidération, mais dans les dettes.

    Il mourut quelques mois avant mon arrivée aux îles, et personne ne le regrettait ; mais tous regardait bien plutôt, pleins d’espoir, vers son successeur. Celui-ci passait pour le héros de la famille. Seul, parmi les quatre frères, il avait un héritier, un grand fils, Natiata, et une fille de trois ans ; c’est vers lui qu’à l’heure de la révolte, Nabakatokia se tourna pour obtenir un secours trop tardif ; en des jours plus lointains, il avait été le bras droit du vigoureux Nakaeia. Nantemat. – « Mr. Corpse [24] », était son macabre surnom, – et il l’avait bien gagné. Encore et toujours, au commandement de Nakaeia, il avait cerné les maisons à la tombée de la nuit, coupé les moustiquaires et massacré des familles entières. C’était la main de fer ; c’était Nakaeia redux. Il vint, convoqué par le gouvernement tributaire de la Petite Makin ; il fut installé, se montra une marionnette timorée, volant pesant que se renvoyaient les orateurs, et le lecteur a vu ce qui restait de lui, dans sa maison d’été, sous le nom de Tebureimoa.

    Le changement de caractère de l’homme fut commenté sur toute l’île et expliqué de diverses façons par l’opium et le Christianisme. À mon sens, il n’y avait aucun changement, mais bien une constance extrême. Mr. Corpse avait peur de son frère ; le Roi Tebureimoa a peur des Vieux-Hommes. La terreur du premier

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