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    2. Dans les mers du sud
    3. Chapitre 42
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    laquelle la route dessinait un ruban de sable, ou sur le remblais d’une nappe d’eau qui formait un bassin peu profond. Les unes et les autres étaient faites du même bois de palmier et les feuilles de palmier en avaient été les matériaux ; aucun clou n’avait été planté, aucun marteau employé dans leur construction et elles étaient réunies par des cordages en fibres de palmier.

    Au milieu du chemin, l’église s’élève, haute et claire, avec des rangées de fenêtres ; une belle charpente soutient sa toiture, et à chacune de ses extrémités, on a de la porte une échappée sur la rue. Les proportions du monument et la matière de sa construction prenaient dans ce cadre un caractère auguste, et nous pénétrâmes sous sa nef avec le même sentiment qu’en entrant dans une cathédrale. Des bancs s’alignaient des deux côtés ; au milieu, sur une estrade délabrée, deux chaises étaient préparées pour le Roi et la Reine, au cas où, d’aventure, ils viendraient prier ; au-dessus de leurs têtes, un cercle, provenant évidemment d’un tonneau, était suspendu par un morceau de coton rouge ; et le cercle lui-même (pendu tout de travers), était recouvert de bandes de même étoffe, rouges et blanches.

    Ceci fut la première marque de dignité royale que nous rencontrâmes avant de nous trouver devant le lieu où elle siège. Le palais est bâti sur un plan européen et avec du bois d’importation ; le toit est en tôle ondulée, le jardin entouré de murs, la grille surmontée d’une sorte d’auvent. On ne peut dire qu’il soit grand ; un laboureur de chez nous est parfois plus commodément logé, mais quand nous eûmes la chance d’y pénétrer, nous le trouvâmes enrichi (au-delà de toutes prévisions en ces parages) de prospectus coloriés et de coupures de journaux illustrés. Jusque devant les grilles quelques-uns des trésors de la couronne étaient exposés : une cloche d’une certaine taille, deux pièces de canon et un unique coquillage. La cloche ne peut être sonnée ni les canons tirés ; ce sont de pures curiosités, des preuves de puissance ; une partie de la parade de la royauté, et ils s’offrent à l’admiration comme des statues dans un square. Un bras de rivière, droit comme un canal, passe presque devant la porte du palais ; les quais qui l’enserrent sont de corail et fort bien construits ; du côté de son embouchure, par ce qui semble un effet de paysage artificiel, l’île-forteresse où s’élève la prison coupe le lagon. Des chefs vassaux avec leurs tribus, des monarques voisins venus en maraude, abordant là, devaient envisager avec surprise ces travaux publics considérables et être tenus en respect par ces bouches de canon silencieuses. Impossible de voir cet endroit sans l’imaginer comme le décor d’un spectacle. Mais pour l’instant le théâtre était vide, la demeure royale déserte, ses portes et fenêtres béantes, et tout le quartier de la ville baigné de silence. Du côté opposé du canal, sur un débarcadère couvert, un ancien gentleman dormait en public, seul habitant visible ; et plus loin, sur le lagon, un canot déployait sa voile rayée, seule chose mouvante.

    Le canal est bordé au sud par un môle ou jetée, avec un parapet. Tout au bout, le parapet cesse, et les quais se prolongent en une sorte de péninsule oblongue sur le lagon, qui est la résidence d’été du Roi et le lieu où il vient respirer. Le milieu est occupé par une maison ouverte, sorte de tente permanente – appelée ici maniapa ou, comme on le prononce maintenant, un maniap, – mesurant au bas mot quarante pieds sur soixante. Le toit de tôle haut, mais descendant si bas qu’une femme doit se baisser pour entrer, est soutenu à l’extérieur par des piliers de corail, à l’intérieur par une charpente de bois. Le sol est de corail en poudre et divisé en plusieurs bas-côtés par les montants de la charpente ; la maison est assez loin du bord pour jouir de la brise qui y pénètre librement et disperse les moustiques ; et de sous les bords de la toiture, on peut voir le soleil miroiter et les vagues danser sur le lagon.

    Nous n’avions, depuis quelque temps, rencontré que des dormeurs ; et quand nous arrivâmes au bout du môle et tombâmes dans cet élégant hangar, nous fûmes surpris de le trouver occupé par une société de gens éveillés, une vingtaine d’âmes en tout, la cour et les gardes de Butaritari. Les dames de la cour tressaient des nattes ; les gardes bâillaient et s’étiraient. Une demi-douzaine de carabines étaient posées sur un rocher et un coutelas contre un pilier : c’étaient les armes de ces somnolents mousquetaires. Tout au bout, une petite maison close déployait quelques rideaux clinquants, et, inspection faite, se trouva être un lieu d’aisance sur le modèle européen. Devant, sur quelques nattes, s’étalait Tebureimoa, le Roi ; derrière lui, sur les panneaux de la maison, deux fusils croisés représentaient des faisceaux. Il portait un pyjama qui messeyait péniblement à son obésité ; son nez était busqué et cruel ; son corps envahi par une corpulence flasque ; son regard craintif et terne ; il semblait tout à la fois oppressé par la somnolence et tenu en éveil par la peur : tel doit être à peu près l’aspect d’un rajah du pays des épices, hébété par l’opium et guettant l’approché d’une armée hollandaise. Nous devions faire plus ample connaissance, mais, du commencement à la fin, mon impression fut la même ; il semblait toujours sommeiller, mais toujours l’oreille tendue et sursautant à tout coup ; et que ce soit le remords ou la peur, il est certain qu’il cherche un refuge dans l’abus des drogues.

    Le rajah ne manifesta aucun signe d’intérêt à notre arrivée. Mais la Reine, qui était assise à ses côtés sur un sac de pourpre, se montra plus accessible ; et il y avait là un interprète d’une bonne volonté si bruyante que sa volubilité hâta notre départ. Il nous avait reçus à notre arrivée : « Voici l’Honorable Roi et je suis son interprète », nous dit-il avec plus d’emphase que de véracité. Car il n’avait aucune situation officielle à la cour, semblait très peu familier avec la langue de l’île et se trouvait là, comme nous-mêmes, par le fait d’une simple visite de politesse. M. Williams était son nom : moricaud américain, cook échappé des cuisines de son bateau et propriétaire du bar The land we live in [23], à Butaritari. Je n’ai jamais vu un homme aussi prodigue de paroles et aussi avare de vérité ; ni la mélancolie du monarque, ni mes propres efforts pour le maintenir à distance ne le décourageaient le moins du monde, et quand tout était fini, le moricaud parlait toujours.

    Le ville dormait encore, on avait à peine commencé à se soulever et s’étirer ; elle était toujours plongée dans la chaleur et le silence. D’autant plus vivante fut l’impression que nous emportâmes de la maison sur l’îlot, du Saul micronésien veillant parmi ses gardes, et de son David anti-mélodieux, M. Williams, jacassant au long des heures somnolentes.

    CHAPITRE II

    Les quatre frères

    Le royaume de Tebureimoa comprend deux îles, la Grande et la Petite Makin ; quelque deux mille sujets lui payent le tribut et deux chefs de clan, semi-indépendants, lui rendent hommage. L’importance de la charge dépend de l’homme ; il peut être une nullité ; il peut être absolu ; et il y a eu des exemples de ces deux extrêmes parmi les résidents qui ne sont plus.

    À la mort du Roi Tetimararoa, son fils aîné, et le père de Tebureimoa, Nakaeia lui succéda. C’était un individu d’une force physique extraordinaire, autoritaire, violent, avec une certaine avarice barbare et quelque intelligence des hommes et des affaires : Seul dans ses îles il traitait et bénéficiait ; il était à lui seul le planteur et le marchand, et ses sujets peinaient à son profit dans la servitude. Quand ils avaient bien et longtemps travaillé, leur maître leur donnait congé et organisait une débauche générale. Il y pourvoyait avec magnificence ; il répandait pour 600 dollars de gin et de brandy ; le petit pays résonnait du bruit des réjouissances, et il n’était pas rare de voir les sujets (eux-mêmes chancelants), élever leur roi ivre à l’avant d’une épave, comme sur un pavois, roi et peuple chantant et hurlant de concert. Sur un mot de Nakaeia, la fête cessait ; Makin redevenait une fois de plus une île d’esclaves et de disciples de la tempérance ; et au matin, toute la population était sur les routes ou dans les plantations de taro, travaillant sous les yeux éraillés de son souverain.

    La peur de Nakaeia dominait tout le pays. La justice n’affectait aucune régularité ; il n’y avait ni procès ni magistrats ; il semblait n’y avoir qu’une peine : la capitale, et les attaques le jour et les meurtres la nuit étaient les seules formes de procès. Le Roi remplissait lui-même le rôle d’exécuteur, et ses coups étaient portés à la dérobée sans autre secours ni assistance que celle de ses femmes. Un jour, celles-ci ramaient ; l’une d’elles ayant attrapé un crabe, il l’assomma incontinent avec la barre du gouvernail ; ainsi disciplinées, elles le transportaient à la nuit sur le théâtre de sa vengeance ; il accomplissait celle-ci tout seul, et s’en retournait, satisfait, avec son équipage conjugal. Les habitantes du harem vivaient dans une condition difficile à concevoir pour nous. Bêtes de somme, menées par la peur de la mort, elles étaient pourtant intimement mêlées à la vie de leur souverain ; elles restaient malgré

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    Tags:
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